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Bérengère Poletti
Question N° 73722 au Ministère de la Santé


Question soumise le 9 mars 2010

Mme Bérengère Poletti attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les enjeux du dépistage du cancer de la prostate. Chaque année plus de 40 000 hommes sont touchés par le cancer de la prostate, et on comptabilise 10 000 décès par an. La détection précoce de cette maladie permet un traitement plus efficace. Face à un tel bilan, on peut estimer logique un dépistage systématique pour tous les hommes de plus de 50 ans ; d'ailleurs, depuis plusieurs années, l'Association française d'urologie (AFU) plaide en faveur d'un dépistage de masse du cancer de la prostate dès 50 ans. Selon l'ancien président de l'AFU, le cancer de la prostate ne donne aucun symptôme, ni lors de sa phase d'évolution, ni lorsqu'il est à la fois curable et détectable (par dosage d'un marqueur sanguin le PSA et toucher rectal). Si l'on attend que les symptômes apparaissent, le traitement ne permettra que de ralentir l'évolution de la maladie. Le problème réside ainsi dans la précocité du diagnostic d'une maladie dont les symptômes restent silencieux. En France, on a mis en place pour la femme un dépistage systématique et organisé du cancer du sein, et cette démarche donne des résultats. C'est pourquoi elle lui demande si la systématisation du dépistage du cancer de la prostate chez l'homme peut être organisée.

Réponse émise le 11 mai 2010

Avec plus de 62 000 nouveaux cas annuels et 9 200 décès, le cancer de la prostate est le premier cancer chez l'homme en termes d'incidence et le second en termes de mortalité. Près de 90 % des décès par cancer de la prostate surviennent après 70 ans. Le dépistage du cancer de la prostate repose sur un test de dosage de l'antigène spécifique de prostate (PSA) associé à un toucher rectal. Les études montrent qu'un toucher rectal utilisé seul n'est pas un outil de dépistage approprié. Le diagnostic de cancer de la prostate est ensuite affirmé par une biopsie prostatique transrectale échoguidée. En cas de diagnostic positif, un bilan du cancer est réalisé par des examens complémentaires. Par ailleurs, il convient de noter qu'une biopsie négative n'écarte pas totalement l'existence d'un cancer de la prostate. Enfin, les traitements curatifs du cancer de la prostate comportent des effets secondaires non négligeables, qui peuvent se manifester par une incontinence urinaire ou des troubles digestifs et sexuels. Ainsi, il n'a pas été démontré à ce jour que le dépistage du cancer de la prostate soit associé à un bénéfice significatif en termes de réduction de la mortalité globale et qu'un traitement immédiat à un stade précoce améliore le pronostic individuel. La mise en place d'un dépistage systématique du cancer de la prostate n'est actuellement pas recommandée par la Haute Autorité de santé, et aucun pays n'a instauré un tel programme. Les résultats récents de deux grandes études internationales, en début d'année 2009, apportent des conclusions contradictoires, et justifient donc de poursuivre la réflexion sur la stratégie de dépistage du cancer de la prostate. L'étude European Randomized Study of Screening for Prostate Cancer (ERSPC) montre une réduction de la mortalité spécifique de 20 %, 0,71 décès pour 1 000 hommes, et un surdiagnostic qui est évalué à au moins 30 %. Le surdiagnostic se définit comme le diagnostic d'un cancer qui ne se serait jamais révélé du vivant de la personne. Le diagnostic de ces cancers latents est donc responsable de la réalisation de biopsies inutiles. Les suites de ce surdiagnostic voient la qualité de vie de la personne diminuer par l'angoisse, générée par l'annonce du diagnostic, et les surtraitements, exposant le patient aux effets secondaires sans en tirer de bénéfice en termes de survie. Au même moment, l'étude américaine American Prostate, Colon, Lung, and Ovarian Trial (PLCO) ne montre pas de réduction de la mortalité dans le groupe dépisté. Les questions autour du dépistage restent aujourd'hui posées, en particulier sur le diagnostic des cancers latents. Une des mesures du plan Cancer 2009-2013 consiste à définir une stratégie nationale de dépistage précoce du cancer de la prostate, en s'appuyant notamment sur un programme d'actions intégrées de recherche et en assurant la diffusion, par les prescripteurs, d'une information claire sur les bénéfices et les risques du dépistage. Enfin, la récente position du professeur Richard ABLIN, à l'origine du test sanguin de recherche de PSA, qui met en garde contre les méfaits individuels et le coût d'un dépistage systématique abusif, illustre l'absolue nécessité d'une réflexion approfondie sur l'utilité et, le cas échéant, les modalités de mise en place d'un dépistage.

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