M. Jean-Christophe Cambadélis attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la mise en place d'une commission électorale réellement indépendante en Afghanistan. Il a reçu, le 23 février 2010, M. Abdullah Abdullah, candidat à l'élection présidentielle en Afghanistan en 2009, qui se trouve actuellement en France à l'invitation de la fondation Jean-Jaurès. M. Abdullah a exprimé sa volonté de fonder un large mouvement politique national pour préparer l'alternance et le changement en Afghanistan. L'élection présidentielle de 2009 a été entachée de fraudes massives contribuant largement à la décrédibiliser. C'est pourquoi M. Abdullah estime que la mise en place d'une commission électorale réellement indépendante est la condition sine qua non pour que les prochaines élections législatives soient transparentes, justes et équitables. Alors que l'opposition afghane attendait une modification de la commission électorale qui garantisse l'indépendance de ses membres, le président afghan vient d'exprimer sa volonté de changer la loi électorale pour restreindre davantage cette indépendance. En effet, l'amendement à la loi électorale qui est proposé permettrait au président afghan de nommer les cinq membres de la commission des plaintes électorales. Après le désastre de l'élection présidentielle de 2009, l'organisation des élections législatives dans les mêmes conditions aurait des conséquences extrêmement négatives sur l'avenir de l'Afghanistan. Nulle stratégie de paix ne peut réussir sans un gouvernement et un parlement légitimement élus et soutenus par la majorité de la population. La décision du président afghan a créé beaucoup d'inquiétude en Afghanistan et dans le monde. Il lui demande donc quelle initiative il envisage de prendre pour que la loi électorale afghane garantisse l'indépendance de la commission électorale et la transparence des prochaines élections afghanes.
La tenue d'élections législatives libres et transparentes, le 18 septembre 2010, en Afghanistan, doit permettre la désignation d'un Parlement légitimement élu et soutenu par la majorité de la population. Il s'agira d'une étape importante dans la construction d'un État afghan stable et démocratique. Toutes les leçons doivent être tirées des difficultés rencontrées dans la tenue de l'élection présidentielle de 2009. L'indépendance des instances électorales chargées de l'organisation du scrutin mérite tout particulièrement d'être garantie. Engagée aux côtés des Nations unies et des autorités afghanes pour y parvenir, la France est attentive aux actions qui sont menées dans ce but. La commission afghane des plaintes électorales (ECC), dont trois des cinq commissaires étaient, selon les termes de la loi électorale de 2005, des internationaux nommés par le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies (RSSGNU), avait, forte de son indépendance, révélé durant le dernier scrutin présidentiel les nombreuses fraudes commises. Son action avait conduit au principe d'un second tour, finalement annulé. Le président Karzaï a tenté, par décret du 17 février 2010, de s'octroyer le droit de nommer l'ensemble des cinq membres de l'ECC. Si cette décision est conforme à la volonté du président, exprimée lors de son discours d'investiture du 19 novembre 2010, d'« afghaniser » le processus électoral, elle a toutefois suscité des craintes sur les conditions d'organisation des élections législatives. Le jugeant inconstitutionnel, l'Assemblée nationale a rejeté, le 31 mars et le 19 avril, le décret présidentiel du 17 février, ce qui a abouti à une situation de blocage avec le chef de l'État. Conformément à son mandat, dont la France a défendu le recentrage sur les aspects politiques (« bons offices »), le nouveau RSSGNU, M. Staffan de Mistura, a aidé le Parlement et le Gouvernement à surmonter leurs désaccords. Un comité ad hoc, comprenant huit députés, le ministre de la justice et des conseillers du président, a été chargé d'élaborer un nouveau texte, conforme à la Constitution, qui sera signé par le président au cours du prochain congé parlementaire (procédure de décret-loi) et qui avalisera la nouvelle composition de l'ECC. À cet égard, le président Karzaï a accepté de nommer au sein de l'ECC deux commissaires internationaux (un Irakien et un Sud-Africain). Outre la composition et l'indépendance de l'ECC, d'autres réformes électorales sont attendues, surtout s'agissant de la commission électorale indépendante (IEC), qui est chargée de la conduite de l'ensemble du processus électoral, de la préparation matérielle du scrutin à la proclamation des résultats. Les faiblesses du scrutin de 2009 lui sont pour la plupart imputables et sont, depuis, à l'origine d'une défiance à son égard de la part des forces politiques. Un rééquilibrage de sa composition au profit de l'opposition serait souhaitable. Le président de l'IEC et son adjoint, dont la responsabilité était engagée dans les erreurs de 2009, ont démissionné le 7 avril 2010. Le président Karzaï a désigné, le 17 avril, un nouveau président à la tête de l'IEC, M. Fazel Ahmed Manawi, ancien juge à la Cour suprême, qui se montre soucieux de garantir la qualité du processus électoral. L'amélioration du fonctionnement de cette instance dépendra de la mise en oeuvre effective de nouvelles méthodes de travail. La préparation des élections progresse, mais sans que soit éliminé le risque de fraudes semblables à celles de 2009. Alors que la communauté internationale entend tenir ses engagements pour le financement des élections, elle attend en retour que les autorités afghanes assument leur part de responsabilités dans le bon déroulement du scrutin, tout en ayant conscience des contraintes qui pèseront sur celui-ci en termes de sécurité. Pour soutenir l'organisation des prochaines élections afghanes, la France contribuera cette année à hauteur de 1,1 M$ au projet de renforcement des capacités juridiques et électorales pour demain (ELECT) du programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Ce projet d'assistance électorale se concentrera, pour les élections législatives, sur les aspects logistiques et opérationnels (inscription des électeurs, recrutement et formation du personnel chargé du scrutin, production et transport du matériel électoral, vérification des résultats), tout en respectant la prise en charge du processus électoral par les autorités nationales, conformément à l'annonce, faite à la conférence de Londres de janvier 2010, d'une transition vers une appropriation accrue des responsabilités par les Afghans.
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