Mme Valérie Rosso-Debord interroge M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les effets de la décentralisation sur les finances publiques. Elle lui demande de lui indiquer si la décentralisation est abordée comme un moyen de diminuer les déficits publics pour se conformer aux critères du droit communautaire ou si la décentralisation est abordée comme moyen d'améliorer la gestion des finances publiques dans leur ensemble.
La décentralisation a constitué une mutation profonde du mode d'organisation institutionnelle et administrative de la France. Pensée comme une nouvelle modalité de gestion publique, elle prend notamment forme à partir des lois de 1982 par des transferts de compétences importants aux collectivités locales. Par ailleurs, à l'occasion de la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003, de nombreuses garanties au profit des collectivités locales ont été inscrites dans la Constitution. Ainsi, l'article 72-2 de la Constitution pose les principes fondateurs de l'autonomie financière des collectivités locales. Il oblige l'État à compenser à l'euro près les compétences qu'il transfère, à garantir une part déterminante de ressources propres dans l'ensemble des ressources des collectivités territoriales, ou encore à accentuer les efforts en matière de péréquation. C'est à l'aune de ces principes qu'a notamment été mis en oeuvre l'acte II de la décentralisation. Tous les transferts de compétences ont été compensés, conformément aux obligations posées dans la Constitution, sur la base de la dépense que supportait l'État au préalable et majoritairement par des transferts de recettes fiscales. Chaque compensation a été validée par la commission consultative d'évaluation des charges (CCEC), présidée par un élu local et placée auprès du comité des finances locales (CFL). Il est d'ailleurs fréquemment arrivé que l'État réponde à la demande des élus locaux en accordant des compléments de compensation, au-delà de ses obligations constitutionnelles. Ainsi en a-t-il été, par exemple, avec la mise en place du Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI) par l'article 37 de la loi de finances pour 2006, dont les dotations viennent notamment compléter la compensation versée aux départements au titre du transfert du revenu minimum d'insertion (RMI). Tel fut encore le cas avec l'adoption de la loi du 1er décembre 2008 portant généralisation du revenu de solidarité active (RSA) dont l'article 7 prévoit que la compensation versée aux départements au titre de la prise en charge du montant forfaitaire majoré du RSA (anciennement allocation de parent isolé) est calculée, non pas sur la base de la dépense préalablement supportée par l'État, mais sur la base des dépenses réelles exposées par les départements au titre de l'exercice 2010. De manière générale, les obligations communautaires de la France en termes de réduction des déficits publics s'analysent toutes administrations publiques confondues (État, sécurité sociale et collectivités territoriales). Une amélioration de la situation relative d'un sous-secteur d'administration publique aux dépens de celle d'un autre serait ainsi neutralisée et totalement dépourvue d'intérêt au regard du respect de ces obligations communautaires. C'est pourquoi la décentralisation, entourée de garanties constitutionnelles pour les collectivités locales, ne saurait en rien constituer un moyen de diminuer les déficits publics. Celle-ci vise en revanche à donner aux collectivités locales des compétences, distinctes de celles de l'État, propres à assurer un meilleur équilibre des pouvoirs sur l'ensemble du territoire, à améliorer la gestion des services publics décentralisés et à rapprocher le processus de décision des citoyens, favorisant ainsi l'émergence d'une démocratie de proximité. Pour autant, les collectivités territoriales doivent naturellement être associées, comme tous les acteurs de la dépense publique, aux efforts mis en oeuvre pour réduire les déficits publics. C'est ainsi que la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2011 à 2014 affiche une trajectoire indicative de solde des administrations publiques qui intègre la participation des collectivités locales à l'effort de maîtrise des dépenses. Cette participation passe notamment par la stabilisation en valeur, sur la période 2011-2013, des concours de l'État aux collectivités locales, hors nouveaux transferts de compétences, hors fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (le FCTVA ayant été sorti de l'enveloppe des concours comme le demandaient de nombreux élus locaux et conformément aux recommandations formulées par le groupe Carrez-Thénault) et hors impacts liés à la réforme de la fiscalité locale.
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