M. Daniel Garrigue fait part à M. le Premier ministre de son étonnement devant les propos que ce dernier a tenus le 3 février 2010, lors d'un dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), au sujet d'une campagne de boycottage qui concernerait les produits israéliens mais aussi, selon lui, les produits casher. Il lui rappelle que, de fait, la société civile palestinienne - associations, universitaires, artistes, sportifs - a lancé le 9 juillet 2005 un appel au boycottage, aux désinvestissements et aux sanctions contre Israël jusqu'à la fin de l'occupation des territoires palestiniens et tant qu'Israël ne respecte pas le droit international. Cet appel, connu sous le nom de campagne « BDS » a été relayé à l'échelle internationale par un certain nombre de personnalités, dont une essayiste canadienne, et d'associations. Cet appel n'a jamais comporté aucune dimension religieuse. On peut certes se demander, en l'absence de décision impliquant la France, quelle est la régularité d'un appel au boycottage sur notre territoire. Interrogée lors des questions d'actualité du mercredi 20 mai 2009, Madame Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l'intérieur, avait répondu, à propos de l'intervention d'associations de défense de la cause palestinienne dans des grandes surfaces que « si des plaintes précises étaient déposées, ou si des infractions pénales étaient constituées, des poursuites auraient lieu », mais qu'à cette date, aucune plainte n'avait été déposée. Mais, selon elle, également, « ces opérations, il faut bien le préciser, touchent des produits importés d'Israël et non des produits casher ». Aussi, il lui demande à pour quelle raison il a procédé à un amalgame qu'avait formellement écarté Madame la ministre de l'intérieur, attribuant à ces opérations une dimension religieuse qui n'est nullement poursuivie par les associations de défense de la cause palestinienne, et engageant ainsi le Gouvernement dans une prise de position de nature religieuse et partisane qui n'est pas conforme au principe de laïcité. Il lui demande, d'autre part, quels contrôles sont mis en oeuvre par les autorités françaises pour s'assurer que les produits en provenance des colonies israéliennes dans les territoires occupés ne bénéficient pas des accords commerciaux conclus entre l'Union européenne et Israël.
La France a déjà plusieurs fois eu l'occasion de rappeler son opposition à toutes les formes de boycottage des produits israéliens, quelle que soit leur justification. Elle appelle ceux qui entendent servir la cause de la paix et contribuer à résoudre le conflit israélo-palestinien à s'abstenir de telles actions, qui sont non seulement contre-productives mais également contraires au droit français (notamment aux dispositions des articles 225-1 et suivants du code pénal). Pour autant, conformément à l'avis aux importateurs C-20 publié au Journal officiel de l'Union européenne du 25 janvier 2005, les produits fabriqués dans les colonies israéliennes ne sauraient bénéficier du régime douanier préférentiel accordé aux produits originaires du territoire israélien en vertu de l'accord d'association du 20 novembre 1995 qui lie Israël à l'Union européenne. Cette position a été confirmée par l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 25 février 2010 dans l'affaire Brita. En la matière aussi, le droit doit s'appliquer. L'avis aux importateurs de 2005 énonce des principes clairs d'indication du lieu de production : le nom de la localité ou de la zone industrielle de production et son code postal doivent être indiqués sur tous les certificats israéliens de circulation des marchandises pour permettre de contrôler l'applicabilité du régime préférentiel issu de l'accord. La France, comme ses partenaires européens, se conforme naturellement à cet accord et les services douaniers français procèdent à des contrôles réguliers. Dans certains cas, ils sollicitent des précisions de la part des autorités israéliennes, notamment lorsque les certificats sont incomplets. Deux missions de terrain de la Commission européenne, en 2009, ont conclu au fonctionnement satisfaisant des dispositions prises.
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