M. François Asensi attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la situation d'Haïti, victime d'un séisme d'une rare puissance dévastatrice, causant selon un bilan provisoire la mort de 150 000 personnes. Nul ne peut ignorer que le bilan de cette catastrophe naturelle n'aurait été aussi tragique dans une république haïtienne dotée d'un niveau socio-économique satisfaisant et d'institutions stables. Depuis sa lutte victorieuse contre l'esclavagisme et le colonialisme aboutissant à l'indépendance, la « perle des Antilles » a lentement décliné, en raison notamment de sa subordination économique aux puissances occidentales, au point de devenir le seul pays d'Amérique classé dans la catégorie des « pays les moins avancés ». À une première dette illégitime exigée par la France contre l'indépendance de l'île, s'est ajoutée une seconde dette toute aussi illégitime, accordée par les institutions internationales et certains pays créanciers à un régime dictatorial haïtien notoirement accusé de corruption. À l'heure actuelle, cette dette grève lourdement le budget de l'État d'Haïti, dont les dépenses d'éducation ou de santé sont fréquemment deux fois inférieures au remboursement du service de la dette. Si le pays est entré dans le cadre de l'initiative PPTE pour l'annulation d'une partie de la dette en juillet 2009, après des années de refus fortement préjudiciables, cette annulation demeure partielle avec un encours estimé à près d'un milliard de dollars. Et pour être éligible à l'initiative PPTE, Haïti s'est vu contraint d'appliquer les sempiternelles politiques néolibérales, dans un pays qui nécessiterait pourtant une plus forte intervention de l'État et une protection contre l'ouverture sans règle des marchés. Il souhaite savoir si le Gouvernement français va procéder à l'annulation immédiate et sans condition de la dette bilatérale de 49 millions d'euros avec Haïti, et non à un simple ajournement ou rééchelonnement. Il voudrait connaître les initiatives la France compte prendre au sein des institutions internationales, principales créancières d'Haïti, pour qu'une même solution voit le jour.
Le séisme du 12 janvier 2010 a suscité un puissant élan de solidarité en faveur d'Haïti auquel la France prend toute sa part. Au cours de sa visite sur place, le 17 février, le Président de la République a ainsi annoncé que notre pays ferait un effort d'une exceptionnelle ampleur pour la reconstruction d'Haïti, puisque le montant de notre assistance se situera à hauteur de 326 MEUR. La question de la dette haïtienne a fait l'objet de la conférence de Washington en avril 2009. Cette conférence avait pour objectif de permettre à Haïti de parvenir au point d'achèvement de l'initiative PPTE (« Pays pauvres très endettés »). Les bailleurs, en particulier les États-Unis, le Japon et les institutions financières multilatérales, ont attribué 44 M supplémentaires à Haïti, ce qui a permis à ce pays de combler son déficit budgétaire. La France a contribué de manière significative à cet effort avec 7 MEUR d'aide budgétaire. Grâce, entre autres, à ces apports, le FMI et la Banque mondiale ont décrété, en juin 2009, l'arrivée d'Haïti au point d'achèvement de l'initiative PPTE, lui permettant d'obtenir de fortes réductions de sa dette externe (1,2 milliard de dollars dont 972,7 millions de dollars auprès des institutions financières multilatérales). Le séisme du 12 janvier a rendu l'action en faveur du rétablissement des finances haïtiennes encore plus urgente. C'est pourquoi le Président de la République a également annoncé, lors de sa visite du 17 février, l'annulation totale de la dette de ce pays à l'égard de la France qui s'élève à 56 MEUR. Par ailleurs, à notre initiative, les créanciers du Club de Paris ont appelé les autres créanciers bilatéraux d'Haïti à annuler l'intégralité de leurs créances envers ce pays. À ce stade, le Venezuela a ainsi annoncé l'annulation de ses créances qui s'élèvent à 296 millions de dollars. Parallèlement, la communauté internationale envisage l'hypothèse d'une annulation de la dette multilatérale. Celle-ci représente, en effet, la part la plus importante de la dette résiduelle d'Haïti, soit environ 820 millions de dollars, après la mise en oeuvre de l'initiative PPTE. Les dirigeants de la Banque interaméricaine de développement, de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international ont ainsi fait part de leur intention d'annuler la totalité de leurs créances. En outre, lors de la dernière réunion des ministres des finances du G7 (les 4 et 5 février 2010), les ministres se sont prononcés en faveur d'une annulation de l'ensemble de la dette multilatérale d'Haïti et des dettes bilatérales subsistant après les annulations en Club de Paris.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.