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Pierre Morel-A-L'Huissier
Question N° 7023 au Ministère de l'Agriculture


Question soumise le 16 octobre 2007

M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les mycotoxines. Depuis quelques années, certains propriétaires d'animaux de compagnie s'inquiètent des risques de contamination des aliments qui contiennent des produits céréaliers, dans lesquels les mycotoxines se développent naturellement. Les mycotoxines sont des métabolites fongiques toxiques pour les humains et les animaux. Cette inquiétude repose en partie sur les données actuelles sur la toxicité des mycotoxines chez les animaux de laboratoire et de la ferme. La contamination des aliments pourrait être plus grave pour les animaux de compagnie puisqu'ils en consomment pendant plus longtemps que les animaux de la ferme et que, par conséquent, ils risquent davantage une exposition chronique aux toxines. Les fabricants d'aliments pour animaux de compagnie admettent que la contamination par les mycotoxines cause de plus en plus de problèmes dans leur industrie. Les ingrédients qui risquent d'être contaminés sont le blé et ses produits, le maïs et ses produits, le tourteau et la pellicule de soya, l'orge et l'avoine. Les mycotoxines peuvent se développer avant la récolte ; leur concentration dépend alors du climat et de l'environnement naturel, notamment de l'humidité, de la température, du pH et de facteurs comme la sécheresse, et de la croissance d'autres champignons et microbes. Les céréales et les grains de provende peuvent aussi être contaminés pendant le séchage ou pendant leur entreposage. Une fois les aliments contaminés, il est difficile de les débarrasser des toxines. Les principales mycotoxines qui risquent de contaminer les aliments pour animaux de compagnie sont les aflatoxines, la vomitoxine, la zéaralénone, les fumonisines, et l'ochratoxine A. Trois genres de champignons, Aspergillus, Penicillium et Fusarium (Gibberella), sont le plus souvent en cause dans la contamination par des mycotoxines. Les aflatoxines figurent parmi les cancérogènes naturels connus les plus puissants et ils sont associés à divers problèmes de santé chez les humains et les animaux. Toutes les espèces semblent vulnérables à cette toxine, à divers degrés selon l'espèce. Les aflatoxines s'attaquent principalement au foie, et les chiens qui ingèrent des aliments contaminés contractent des affections du foie. La vomitoxine, connue sous le nom chimique de désoxynivalénol (DON), compromet la prise de poids et l'appétit chez le porc, et une concentration de 10 ppm produira de l'anorexie, des vomissements et une perte de poids. On sait aussi qu'elle affaiblit le système immunitaire, bien que la concentration à partir de laquelle elle produit cet effet soit encore inconnue. Nous en savons encore bien peu sur sa toxicité pour les animaux de compagnie. Nous savons que les chiens sont vulnérables à des concentrations relativement faibles de vomitoxine et qu'ils manifestent des troubles de santé semblables à ceux des porcs. Les chats, les bovins, la volaille et les humains peuvent également être affectés. On a signalé des cas où la zéaralénone avait provoqué des symptômes cliniques chez la volaille, le porc et l'humain, mais pas chez les chats ni les chiens. La structure chimique de la zéaralénone est semblable à celle de l'oestrogène et cause de l'hyperoestrogénisme chez les animaux de laboratoire et le bétail. Elle agit principalement sur l'appareil reproducteur. Chez le porc, elle peut causer de graves problèmes de reproduction, y compris une absence de démonstration des chaleurs et une réduction de la libido. Elle peut aussi compromettre le développement du foetus et la viabilité des nouveau-nés. L'intensité des symptômes dépend de la quantité de toxine consommée. Les fumonisines s'attaquent au métabolisme de la membrane cellulaire et les symptômes cliniques de l'intoxication varient selon les espèces. Les seules études sur les effets des fumonisines sur les animaux de compagnie ont été menées chez des lapins. L'ochratoxine A est une néphrotoxine (c'est-à-dire qu'elle est toxique pour les reins) et elle est tératogène (c'est-à-dire qu'elle cause des malformations foetales pendant les trois premiers mois de la grossesse) chez toutes les espèces étudiées. Elle s'attaque aussi au système immunitaire et on la soupçonne d'être cancérigène. Afin de détecter la présence de mycotoxines dans les aliments pour animaux de compagnie, les fabricants appliquent actuellement des programmes de dépistage qui consistent à analyser les ingrédients avant la préparation des aliments, chez le fournisseur et chez le fabricant. En outre, les fabricants effectuent une analyse périodique de leurs produits pour y détecter les mycotoxines. Le bien-fondé des préoccupations à l'égard de la présence de mycotoxines dans les aliments pour animaux de compagnie fait encore l'objet de débats. Puisqu'il existe relativement peu de données sur les effets toxiques des mycotoxines sur les chiens et les chats, il faudra mener d'autres études pour déterminer la nature et la source des mycotoxines qui pourraient contaminer les aliments pour animaux de compagnie, ainsi que leurs effets sur les animaux. Entre-temps, les fabricants d'aliments doivent veiller à la stricte application de leur programme de dépistage des mycotoxines. Il souhaiterait connaître ses intentions en la matière.

Réponse émise le 27 novembre 2007

De nombreuses questions de consommateurs mais aussi de scientifiques sont régulièrement soulevées sur la toxicité des mycotoxines. En effet, si pour certaines mycotoxines les risques commencent à être bien identifiés, pour d'autres leur impact toxicologique reste mal connu. Ainsi, un rapport de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) paru en décembre 2006 conclut sur l'impact de la zéaralénone sur la santé des animaux de compagnie. Selon l'agence, « il n'est pas possible d'écarter formellement l'éventuelle responsabilité d'une contamination même faible des aliments pour carnivores utilisés par les femelles potentiellement reproductrices dans la survenue de troubles de la fécondité en élevage (oestrus prolongé, kystes ovariens, pyomètre, etc.) ». Fort de cette confirmation scientifique, le législateur européen avait d'ores et déjà initié une réflexion sur ces nouvelles substances indésirables dans l'alimentation des animaux. La Commission européenne a publié une recommandation le 17 août 2006 concernant la présence de déoxynivalénol, de zéaralénone, d'ochratoxine A, des toxines T-2 et HT-2 et de fumonisines dans les produits destinés à l'alimentation animale. Elle fixe des teneurs maximales recommandées équivalentes à des valeurs de référence, mais qui ne pourront conduire à des retraits du marché. De telles teneurs sont bien définies pour toutes les matières premières végétales entrant dans la composition des aliments pour animaux. S'agissant des aliments finis pour animaux de compagnie, seuls des seuils en fumonisines ont été établis. Les directions départementales des services vétérinaires sont chargées de veiller à ce que les fabricants d'aliments pour animaux se conforment à ces recommandations. Ces dernières doivent être prises en compte lors de la mise en place de leur système de maîtrise des risques (HACCP), rendu obligatoire depuis le 1er janvier 2006 par la réforme européenne dite du « paquet hygiène ». Ces recommandations sont aussi mentionnées dans le guide de bonnes pratiques d'hygiène de la Fédération européenne de l'industrie des aliments pour animaux de compagnie. Ce guide, reconnu officiellement en janvier 2007 par la Commission européenne et les États membres, a été défendu par la France, désignée comme rapporteur du dossier. Ceci démontre combien le ministère de l'agriculture et de la pêche est soucieux de la qualité et de la sécurité des aliments pour animaux de compagnie. Les services du ministère de l'agriculture et de la pêche suivent avec attention l'évolution de ce dossier au niveau européen.

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