M. Patrice Martin-Lalande attire l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur les comptes prévisionnels de l'agriculture publiés mi-décembre par le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche qui sont dramatiquement éloquents : après avoir déjà baissé de 20 % en 2008, les revenus des agriculteurs français ont encore chuté de 34 % en 2009. L'agriculture française est en crise. Les causes de cette crise sont multiples mais, au premier rang de ces causes, figure la différence de normes et de charges pesant sur les produits agricoles français par rapport aux produits agricoles étrangers concurrents. Par rapport à de nombreux pays, la France est en effet souvent en avance en termes de progrès social, environnemental ou sanitaire. Trop souvent, nos produits subissent de ce fait, de la part de la concurrence étrangère, un véritable « dumping » social, environnemental, sanitaire, fiscal, etc. Dans la perspective de l'examen par le Parlement des projets de loi sur l'agriculture et sur le « Grenelle 2 », il lui demande de communiquer un tableau comparatif présentant les principales normes et charges imposées aux produits agricoles français par rapport à celles auxquelles sont encore soumis les produits agricoles des principaux pays concurrents. Il lui demande aussi de présenter les mesures qu'il entend mettre provisoirement en oeuvre pour que, sur le marché intérieur français et pendant la période où les produits français supportent des normes et charges plus exigeantes que celles auxquelles sont encore soumis les produits européens et extra-européens, les producteurs français ne subissent pas une trop lourde distorsion structurelle de concurrence.
La compétitivité des exploitations agricoles françaises est la première préoccupation du ministère chargé de l'agriculture en cette période de crise pour l'ensemble des filières. C'est cette préoccupation qui a motivé l'annonce, le 27 octobre 2009 par le Président de la République, d'un plan de soutien en faveur de l'agriculture d'une ampleur sans précédent comportant 1 Md de prêts bancaires et 650 Md de soutiens exceptionnels de l'État. Devant le succès des mesures, ces montants ont été portés à plus de 1,8 Md de prêts aidés et plus de 650 Md d'aide d'État. Dans le cadre de ce plan, les exploitants agricoles peuvent bénéficier de prêts aidés de reconstitution de fonds de roulement et de prêts bonifiés de consolidation. Ils visent, respectivement, à apporter des liquidités aux entreprises et à différer le remboursement des emprunts contractés par les exploitations agricoles. Ces dispositifs sont opérationnels et aujourd'hui, près de 79 000 exploitations ont bénéficié de prêts pour un montant de 1,6 Md. À côté des prêts bancaires, des mesures d'allègement de charges financières, sociales et fiscales, ainsi qu'une mesure d'accompagnement spécifique en fonction de l'ampleur des difficultés rencontrées, ont été mises en place. Une enveloppe de 150 Md a été engagée pour alléger les charges d'intérêts d'emprunts dues par les exploitants qui ont des difficultés à faire face aux remboursements de leurs emprunts. D'autre part, 100 Md supplémentaires ont été alloués aux mesures d'accompagnement des exploitations qui connaissent des difficultés plus structurelles. Celles-ci peuvent ainsi bénéficier d'une aide à la prise en charge des intérêts bancaires, des cotisations sociales, ainsi qu'à la restructuration de la dette. Dans les cas les plus difficiles, une aide à la reconversion professionnelle peut leur être accordée. L'État a pris en charge également, selon la situation financière de chacun, les cotisations sociales patronales dues par les agriculteurs employeurs de main-d'oeuvre à la Mutualité sociale agricole pour un montant de 50 Md. Cette mesure est intervenue sur l'appel à cotisations de février. Enfin, 50 Md supplémentaires sont consacrés au remboursement de la taxe sur le foncier non bâti et 170 Md au remboursement de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers et le gaz naturel, payées par l'ensemble des agriculteurs en 2010. Les dispositifs du plan de soutien exceptionnel à l'agriculture ciblent des difficultés différentes auxquelles doivent faire face les exploitations agricoles souffrant de la crise économique. Cette palette de mesures permet ainsi de trouver une réponse appropriée à toutes les situations qui le nécessitent. Les distorsions de concurrences, qu'elles soient environnementales ou sociales, sont autant de menaces qui pèsent sur la compétitivité et le dynamisme de notre secteur agricole. Mais ces menaces ne doivent pas nous conduire à un alignement sur le « moins disant », renonçant ainsi aux exigences de qualité qui permettent de protéger les conditions de travail, l'environnement et la santé de nos concitoyens. Pour autant, une approche pragmatique et responsable est nécessaire. C'est dans cet esprit que le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche insiste désormais pour que les nouvelles mesures environnementales soient compatibles avec la réalité économique des exploitations et s'inscrivent dans un cadre communautaire assurant que les mêmes règles s'imposent à tous. Il a ainsi mis en place, avec son homologue en charge du développement durable et conformément au mandat que leur a donné le Président de la République, un groupe de travail sur l'agriculture durable qui a pour mission d'évaluer l'impact économique des exigences environnementales imposées dans les différents États membres de l'Union afin de parvenir à une nécessaire harmonisation européenne, notamment dans le cadre de la nouvelle PAC, pour limiter les distorsions de concurrences au sein de l'Union. Ce groupe de travail doit aboutir à de premiers résultats avant l'été. Concernant le coût de l'emploi en agriculture, le Gouvernement a élaboré une mesure dans la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 qui améliore le dispositif d'exonération dont bénéficient les employeurs de travailleurs saisonniers, en appliquant une réduction supplémentaire de charges patronales identique pour toutes les filières. Avec cette mesure applicable aux cotisations dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2010, le coût de l'emploi au SMIC horaire est ramené à 9,29 EUR. En réduisant le coût de l'emploi des travailleurs occasionnels, cette mesure cherche à lutter contre le travail clandestin, qui demeure trop fréquent en agriculture, surtout pour les activités saisonnières. Cette situation crée aussi une distorsion de concurrence dont profitent les employeurs les moins scrupuleux avec, comme corollaire, l'abus ou la privation totale des droits sociaux des travailleurs agricoles. Un projet de directive européenne concernant le travail saisonnier de travailleurs provenant de pays tiers est, par ailleurs, en cours d'élaboration.
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