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Jean-Paul Bacquet
Question N° 69190 au Ministère de l'Alimentation


Question soumise le 26 janvier 2010

M. Jean-Paul Bacquet attire l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur les modalités des bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) pour 2010. La fédération régionale des syndicats d'exploitants du Massif central et les jeunes agriculteurs du Massif central demandent, s'agissant de la BCAE « herbe », l'alignement de la gestion des prairies permanentes (PP) sur la gestion des prairies temporaires de plus de 5 ans (PT5) avec un retournement possible s'il y a réimplantation équivalente. En outre, ils souhaitent la concrétisation de la tolérance proposée sur la surface réimplantée en PT5, sous réserve d'un équilibre départemental (en tenant compte des dernières évolutions des ratios). S'agissant de la BCAE « particularités topographiques », ils demandent la réduction à 3% de la surface maximale consacrée à cet objectif en 2012 (au lieu des 5% prévu). Enfin, s'agissant de la BCAE « herbe » et « particularités topographiques », ils souhaitent la suppression de la faute intentionnelle et l'abaissement du niveau des sanctions prévues (l'intentionnelle baisse à 3%, le 3% baisse à 1% et le 1% se limite à un rappel à la réglementation). Il lui demande donc d'indiquer s'il entend répondre favorablement aux revendications des syndicats.

Réponse émise le 9 mars 2010

Les conditions de mise en oeuvre du bilan de santé de la politique agricole commune (PAC) sont issues d'un long processus de concertation mené notamment avec l'ensemble des organisations professionnelles agricoles au premier semestre de l'année 2009. Les derniers arbitrages concernant la bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) « herbe » et « particularités topographiques » ont été rendus publics à la fin du mois de juillet et publiés dans la presse agricole en août 2009. Ce processus de concertation a abouti à la réorientation de 700 millions d'euros d'aides en faveur des exploitations herbagères par la mise en place de droits à paiements unique (DPU) « herbe ». Afin de garantir que les exploitations herbagères maintiennent bien leurs surfaces en herbe malgré la mise en place de ce DPU, aide découplée de la nature de la production, des règles d'encadrement, voire d'interdiction de retournement de certaines catégories de prairies ont été introduites à travers une conditionnalité : la BCAE « gestion des surfaces en herbe ». Ces dispositions s'inscrivent dans la réglementation communautaire qui impose aux États membres de respecter un ratio de prairies permanentes (ensemble des prairies naturelles et des prairies temporaires de plus de cinq ans) dans la surface agricole utile par rapport à 2005. En cas de détérioration, les États membres doivent se donner les moyens de limiter l'érosion des pâturages permanents, voire d'en obliger la réimplantation si la baisse atteint 10 %. Ce ratio ne s'est pas dégradé au regard de son niveau de 2005. Au regard de ce constat, les règles de la BCAE relative à la gestion des surfaces en herbe, et plus précisément l'interdiction stricte de retournement des prairies naturelles, ont été modifiées. Cette interdiction conduit en effet à figer excessivement les parcelles agricoles et bloquer les possibilités de gestion courante des exploitations, notamment de remaniement des parcelles, d'aménagement de l'exploitation et d'entretien des prairies. Avec les assouplissements déjà décidés début octobre, dans un souci de pragmatisme et de pédagogie, les règles de gestion des prairies sont désormais les suivantes : les prairies naturelles peuvent être retournées selon les mêmes règles que les prairies temporaires de plus de cinq ans, c'est-à-dire à condition d'être réimplantées à l'identique pour une surface similaire sur une autre parcelle de l'exploitation ; une tolérance est accordée dans les surfaces réimplantées pour tenir compte de la réalité des exploitations et notamment du parcellaire agricole qui n'est pas de taille constante. Le ratio de prairies sera examiné chaque année au niveau départemental pour vérifier que cette tolérance n'entraîne pas de dégradation des surfaces en herbe ; aucune déclaration n'est nécessaire avant de retourner ces prairies ; les prairies temporaires de moins de cinq ans pourront être retournées dans la limite de 50 % ; les exigences seront adaptées pour les jeunes agriculteurs qui s'installent au regard de leurs projets d'installation ; des dérogations seront accordées aux exploitations en reconversion aidée par l'État ; les surfaces qui étaient déclarées en prairies temporaires l'année de référence alors qu'elles étaient en gel l'année précédente ne seront pas retenues dans la référence ; les surfaces en prairies temporaires engagées dans une mesure agroenvironnementale de reconversion des terres arables ne seront pas non plus comptabilisées. Ces nouvelles dispositions permettent de redonner de la souplesse de gestion aux exploitations agricoles et de respecter l'équilibre général de la mise en oeuvre du bilan de santé de la PAC ainsi que les engagements communautaires de la France. En effet, les prairies naturelles piègent et stockent du carbone et sont des réservoirs de biodiversité, ce qui justifie leur maintien ; en cas de retournement, le stock de carbone est relâché rapidement et les conditions nécessaires au maintien de biodiversité sont fortement détériorées. Les assouplissements apportés à la BCAE herbe visent simplement, en gardant une superficie de prairies constante, à permettre les adaptations marginales des exploitations et ainsi à rendre cette mesure applicable sur le terrain. Ils visent également, et paradoxalement, à ne pas pénaliser des exploitations qui, ayant développé des pratiques herbagères, se retrouveraient complètement figées et bloquées dans leur stratégie vertueuse d'un point de vue environnemental. La principale garantie que le bilan carbone national des prairies ne sera pas détérioré réside dans le fait que le ratio de prairies permanentes au niveau national ne doit pas se dégrader. Ainsi les stocks de carbone dans les sols sont maintenus à l'échelle de la France entière. Pour ce qui concerne le maintien des particularités topographiques, la règle communautaire est de maintenir les particularités topographiques existantes en 2010, notamment dans un but de préservation de la biodiversité. Compte tenu de l'impossibilité de fixer une référence des particularités topographiques existantes qui n'ont jamais fait l'objet de déclaration, le choix a été fait, en France, de fixer un pourcentage de particularités topographiques en équivalent de surface agricole utile à l'échelle de l'exploitation. Le Gouvernement a fixé ces pourcentages au niveau de 1 % en 2010, 3 % en 2011 et 5 % en 2012. Pour le calcul du pourcentage, la diversité des systèmes de production et des territoires a été prise en compte à travers une liste très large d'éléments affectés d'un équivalent surface forfaitaire en fonction de leur intérêt écologique. Par exemple, 100 mètres de haie ou de lisère de bois ou une mare de 30 mètres de diamètre équivalent à 1 hectare, 1 hectare de tourbières équivaut à 10 hectares et 1 hectare de verger à 5 hectares. Les bordures de champs sont également comptabilisées, comme les fossés et cours d'eau. Ainsi, en 2010, une exploitation de 100 hectares devra comporter par exemple au moins 50 mètres de haie et 50 mètres de lisière de bois, ou un verger de 0,2 hectare. Cette BCAE ne consiste donc pas en un gel brut de surface agricole. Afin de tenir compte des inquiétudes des agriculteurs, un point d'étape sera fait chaque année pour évaluer les difficultés rencontrées. Par ailleurs, cette exigence ne s'appliquera pas aux exploitations disposant d'une surface inférieure à 15 hectares. L'attribution des aides communautaires est liée au respect d'exigences par les bénéficiaires, garanti par des contrôles réguliers et des sanctions. La Commission contrôle, lors d'audits, que les États membres appliquent de manière suffisamment rigoureuse ce principe. Pour la France, la Commission a relevé un certain nombre de faiblesses, notamment des sanctions insuffisantes. Cela a conduit la Commission à sanctionner la France de 71 millions d'euros pour les années 2005 et 2006 et des sanctions pour les années suivantes sont prévisibles au regard des contrôles déjà réalisés. Compte tenu de cet impact financier d'une part et du fait que la France est le premier pays bénéficiaire des aides communautaires d'autre part, il n'est pas possible d'accéder à la demande de la suppression de la faute intentionnelle et de l'abaissement du niveau des sanctions. Au moment où la difficile négociation sur la réforme de la PAC s'engage, poursuivre dans la voie d'une mise en oeuvre de la PAC qui a conduit la Commission à sanctionner la France lourdement, n'est pas de nature à mettre notre pays dans la meilleure position de négociation.

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