Mme Martine Billard interroge M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la position de la France concernant un capitaine de frégate de la marine argentine, et les suites qu'elle entend donner à sa condamnation, par contumace, à la détention criminelle à perpétuité par la cour d'assises de Paris en 1990 pour l'assassinat de deux ressortissantes françaises. Cette condamnation est restée sans effet bien que notre pays ait lancé un mandat d'arrêt international contre lui. Il est vrai qu'il n'existe malheureusement pas de convention d'extradition entre la France et l'Argentine et la condamnation, en France, de l'intéressé restera sans effet si notre pays ne prend aucune initiative en la matière. Celui-ci est aussi actuellement jugé à Buenos-Aires, pour les crimes commis durant la dictature militaire entre 1976 et 1983. Cet ancien officier a été également jugé et condamné par les autorités judiciaires italiennes en 2007 et plusieurs autres pays européens. La Suède et l'Espagne, notamment, ont également lancé des mandats d'arrêts internationaux contre lui pour l'assassinat de leurs ressortissants. Aussi, elle demande si le Gouvernement français envisage de proposer aux autorités de Buenos-Aires la conclusion d'une convention d'extradition, seule à même de permettre son extradition, et à quelle échéance cela pourrait être envisagé. Dans le cas contraire, elle souhaiterait connaître les raisons qui pourraient motiver le refus d'une telle convention. Elle demande aussi si d'autres démarches et moyens sont envisagés.
La législation pénale argentine et le droit interne français ne font pas de l'existence d'une convention internationale un préalable indispensable à la mise en oeuvre de procédures d'extradition. C'est ainsi que la France, avec constance, et dès la condamnation d'Alfredo Astiz par la cour d'assises de Paris, a réclamé l'intéressé aux autorités argentines. Les demandes françaises d'extradition le concernant, introduites en 1990 et 2001, ont été écartées en raison, d'abord, des lois « du point final » et du « devoir d'obéissance » intervenues en 1986 et 1987, puis, une fois ce dispositif législatif abrogé, au motif que des poursuites étaient désormais engagées contre les ex-tortionnaires argentins devant la justice de ce pays à laquelle ils devaient répondre en priorité. Une nouvelle demande formée en 2003 se trouve toujours en cours d'examen par le tribunal de Bahia Blanca. Au-delà de ce cas individuel, il n'en reste pas moins qu'un instrument juridique international faciliterait le traitement des demandes d'extradition entre la France et l'Argentine. Une réflexion commune au ministère des affaires étrangères et européennes et au ministère de la justice et des libertés est en cours sur l'opportunité de soumettre un projet d'accord aux autorités argentines. En effet, le constat a été récemment fait que l'instruction des demandes d'extradition formulées par la France dans des affaires de différentes natures se heurte, actuellement, à des difficultés découlant d'une interprétation plus restrictive par les juges argentins de leur législation. Cette dernière exige, en effet, sous peine d'irrecevabilité, que la demande d'extradition soit transmise par un magistrat du siège et non du parquet, comme c'est le cas actuellement en France. Il semble par ailleurs que les demandes d'extradition présentées par le Portugal, la Russie et la Chine rencontrent les mêmes difficultés. Ce constat est venu confirmer l'intérêt de négocier un instrument juridique spécifique en cette matière. En revanche, il n'est pas certain qu'une convention permette de dépasser les problèmes d'inconstitutionnalité soulevés en Argentine par les demandes formulées à la suite de jugements rendus en l'absence des personnes poursuivies. Au vu des délais habituellement nécessaires pour finaliser la signature d'une convention d'extradition et son entrée en vigueur, il est à craindre que la peine prononcée à l'encontre de M. Astiz ne soit prescrite à cette échéance, tout comme l'action publique à l'encontre de l'intéressé. En outre, il est vraisemblable que ce dernier aura entre-temps été jugé en Argentine pour ses agissements, circonstance dont les autorités de ce pays se prévaudront sans doute par la suite pour s'opposer à son extradition.
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