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Damien Meslot
Question N° 68862 au Ministère de l'Immigration


Question soumise le 19 janvier 2010

M. Damien Meslot attire l'attention de M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire sur la modification par le conseil d'administration de l'OFPRA de la liste des pays d'origine sûrs par l'ajout de la Serbie, de l'Arménie et de la Turquie. En effet, l'examen de cette modification par le conseil d'administration de l'OFPRA suscite une vive inquiétude parmi les membres d'Amnesty international dans la mesure où l'ordre du jour précisant les pays concernés par la révision ne leur a été communiqué que trois jours avant la date du conseil d'administration. La situation des États concernés a été examinée sur place, en une seule fois et sur la base de dossiers documentaires fournis. La question de la Turquie n'a fait l'objet d'aucun débat et ce pays a été ajouté sur cette liste. L'inscription d'un État sur la liste des pays d'origine sûrs a pour conséquence de diviser par six le temps d'examen d'une demande d'asile, de priver la personne de tout accès à un centre d'accueil pour demandeur d'asile, de lui refuser le bénéfice de toute aide financière le temps de sa demande. Surtout, en cas de rejet de sa demande d'asile par l'OFPRA, le recours devant la Cour nationale du droit d'asile n'est pas suspensif. La personne peut être éloignée dans son pays alors même qu'elle craint de n'y être persécutée. Il est donc surprenant que la procédure d'inscription d'un État sur la liste des pays d'origine sûrs ne soit pas strictement prévue par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour en assumer la transparence nécessaire. De plus, contrairement à ce qu'affirment régulièrement les autorités françaises aux instances internationales, et en dernier lieu au commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe en 2008, aucune procédure permettant « un suivi vigilant et permanent de la liste » n'existe. L'exemple de la Géorgie le prouve. Cet État a été retiré de la liste le 13 novembre 2009, soit plus d'une année après le conflit. La dissolution du parti démocrate turc prononcée le 11 décembre 2009 par la cour constitutionnelle sur des fondements législatifs contraires à la convention européenne des droits de l'Homme devrait entraîner la convocation immédiate d'un nouveau conseil d'administration sur ce point. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures il entend prendre afin qu'une procédure écrite et publique de révision de la liste des pays d'origine sûrs soit élaborée et qu'un suivi permanent sur la situation des droits de l'Homme soit mis en place par l'OFPRA dans les pays d'origine.

Réponse émise le 16 février 2010

L'établissement de la liste des pays d'origine sûrs ne relève pas du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire mais du conseil d'administration de l'Office français des réfugiés et apatrides (OFPRA), établissement public indépendant chargé de statuer, sous le contrôle de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) et du Conseil d'État, sur le bien-fondé des demandes d'asile. Le conseil d'administration de l'OFPRA se compose de représentants de l'administration mais également de parlementaires et de personnalités qualifiées dans le domaine des droits de l'homme ; enfin le représentant en France du Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés participe à ses réunions. L'élaboration de la liste des pays d'origine sûrs a pour objet de faciliter le traitement des demandes d'asile en distinguant, en fonction de critères objectifs, selon que les demandes d'asile proviennent ou non de pays qui veillent « au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales » (2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile). Cette procédure, qui repose sur une directive communautaire, a été jugée conforme au droit d'asile par le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel. L'examen de la demande d'asile d'un ressortissant d'un pays considéré comme d'origine sûr est soumis à une procédure « prioritaire » : examen par l'OFPRA dans des délais réduits ; recours devant la CNDA contre une décision de rejet de l'OFPRA, non suspensif ; prestations sociales limitées. L'application de ce dispositif ne signifie pas que les personnes sont inéligibles à une protection, et elle ne remet pas en cause les garanties d'examen de la demande par l'OFPRA. Ce dispositif n'a que des conséquences procédurales et vise à obtenir une décision plus rapide. Si l'intéressé n'a pas le droit à un recours suspensif devant la CNDA, il bénéficie d'une voie de recours suspensive devant le juge administratif, à l'occasion de son obligation de quitter le territoire français ou lors de la reconduite à la frontière. La liste ne comprend, pour être utile, que les pays qui remplissent les conditions légales et dont l'inscription présente un intérêt compte tenu du nombre de demandes d'asile présentées par leurs ressortissants. Une première liste des pays d'origine sûrs a été établie en 2005, complétée en 2006, et le Conseil d'État a annulé en 2008 l'inscription de l'Albanie et du Niger opérée en 2006. Cette liste vient d'être révisée par une décision du conseil d'administration de l'OFPRA du 20 novembre 2009 (publiée au Journal officiel du 3 décembre 2009). La révision de la liste se traduit par la suppression de la Géorgie, l'ajout de l'Arménie, de la Serbie et de la Turquie. La liste actuelle comporte dix-sept pays : Arménie, Bénin, Bosnie-Herzégovine, Cap-Vert, Croatie, Ghana, Inde, Madagascar, Mali, Macédoine, Maurice, Mongolie, Sénégal, Serbie, Tanzanie, Turquie, Ukraine. Le conseil d'administration de l'OFPRA procède avec soin à l'établissement et au suivi de la liste, qui s'appuie sur des données d'information fiables, avérées et provenant de sources multiples, notamment diplomatiques. En 2008, 3 239 demandes émanaient de ces pays, soit 9,5 % de la demande totale.

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