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Gisèle Biémouret
Question N° 68689 au Ministère du des sceaux


Question soumise le 12 janvier 2010

Mme Gisèle Biémouret attire l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la mise en conformité du droit pénal français avec le statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), ratifiée en 2000. En effet, la France n'a, depuis neuf ans, nullement modifié son droit national : le projet de loi adaptant notre droit pénal à l'institution de la CPI voté par le Sénat en juin 2008 n'a toujours pas été inscrit au calendrier parlementaire. Par ailleurs, le projet de loi voté par le Sénat tend à limiter les dispositions du statut et constitue même un recul. En premier lieu, le texte adopté ne permet de juger que les suspects de crimes internationaux que s'ils résident habituellement sur le territoire français, assurant ainsi l'impunité à tous ceux qui viendraient en France sans y installer leur résidence habituelle. En second lieu, le texte introduit un principe de double incrimination, et confie le monopole des poursuites au seul ministère public. En troisième lieu, il inverse le principe de complémentarité défini par le statut de la CPI en subordonnant les poursuites en France à la condition que la cour ait décliné expressément sa compétence, alors que le statut prévoit l'inverse. Si le projet de loi voté par le Sénat est adopté en l'état, les victimes des crimes internationaux les plus graves risquent de ne pas obtenir justice dans notre pays, et les possibilités de poursuites à l'encontre des auteurs présumés de ces crimes seront restreintes, au point de faire de la France une terre d'impunité. Cette demande de mise en conformité est portée par nombre d'associations et d'ONG dont l'Association des chrétiens pour l'abolition de la torture. Aussi, elle lui demande quelles mesures elle entend prendre afin de mettre en conformité le droit français avec le droit européen et dans quel délai.

Réponse émise le 2 mars 2010

En adoptant la loi n° 2002-268 du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, la France a respecté tous ses engagements au regard de la convention portant statut de la Cour pénale internationale, signée à Rome le 18 juillet 1998. En effet, cette convention n'impose aux États qui y sont parties ni la création d'incriminations spécifiques dans leur droit interne pour les crimes qui relèvent de la compétence de ladite cour, ni la reconnaissance d'une compétence juridictionnelle élargie. Néanmoins, le Gouvernement a soumis au Parlement un projet de loi, adopté à l'unanimité par le Sénat, comportant toutes les dispositions nécessaires permettant au droit pénal français d'incriminer, de la manière la plus complète possible, les comportements prohibés par ladite convention, notamment pour les crimes et délits de guerre, et prévoyant des règles de complicité élargies. Il convient de mesurer l'avancée indiscutable réalisée en ce qui concerne la question de l'instauration d'une compétence juridictionnelle élargie pour les tribunaux français : bien qu'aucune disposition du statut de Rome n'impose aux États parties de se reconnaître compétents pour juger les génocides, crimes contre l'humanité et crimes de guerre prévus par le statut sans même qu'un lien personnel ou territorial ne rattache les faits, les auteurs ou les victimes de ces crimes à leur propre territoire ou à leurs ressortissants et alors même que la France n'a jamais instauré une telle compétence sans y être expressément engagée par une convention internationale, le Gouvernement a soutenu l'amendement déposé par le rapporteur du Sénat élargissant la compétence des juridictions pénales françaises au-delà de leur compétence habituelle. Depuis 2002, en application des articles 627-4 à 627-15 du code de procédure pénale, qui permettent l'arrestation et la remise à la Cour pénale internationale des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes ou délits de guerre qu'elle ne peut juger en raison de la territorialité des faits, de la nationalité de l'auteur et de la victime, la France peut dénoncer de tels faits à la Cour pénale internationale et en arrêter les auteurs qui se seraient refugiés sur le territoire de la République afin de les remettre à cette cour. En outre, en application des dispositions votées par le Sénat, la France pourrait juger elle-même de tels criminels, dès lors qu'ils résideraient habituellement sur le territoire français. La législation française est donc, dès à présent, en parfaite conformité avec les obligations résultant du statut de Rome de la Cour pénale internationale.

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