Mme Delphine Batho appelle l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur la question du prix des aliments peu transformés. L'UFC-Que choisir des Deux-Sèvres a mené une enquête sur les prix d'aliments peu transformés, dont la matière première agricole constitue une part prépondérante. Son résultat est sans appel. Alors qu'en septembre dans ce département, les prix agricoles de la volaille, du porc et du lait étaient respectivement de 2,11 €, 1,34 € et 0,29 €, les prix moyens en rayon étaient quant à eux de 11,90 €, 6,12 € et 0,72 € soit des différentiels importants inexpliqués. Une étude plus approfondie permet de parler de marges injustifiées. En effet, industriels et distributeurs profitent des variations des prix agricoles, notamment des baisses, pour accroître leurs marges. Ce phénomène est particulièrement parlant en ce qui concerne le lait dont le prix payé à l'éleveur a baissé de 7 % alors que, dans le même temps, il a augmenté de 5 %, voire dans certains cas de 11 %, pour le consommateur. En l'absence de données publiques et en raison de la baisse significative des prix agricoles depuis mai 2008, le maintien des prix élevés laisse apparaître des marges injustifiées qui pénalisent les consommateurs. Il paraît donc nécessaire de mettre en place, lors des périodes de forte variation des prix agricoles, un dispositif réglementaire permettant d'encadrer les marges en cas de progression injustifiée. Un coefficient multiplicateur, qui a par ailleurs fait ses preuves depuis 2005 pour la filière fruits et légumes, paraît être le seul outil efficace pour limiter la progression des marges pour les produits alimentaires de première nécessité, peu ou pas transformés et au minimum pour les viande fraîches de boeuf et de porc. C'est pourquoi elle lui demande de bien vouloir indiquer les mesures que le Gouvernement compte mettre en place pour lutter contre les marges injustifiées et pour appliquer un coefficient multiplicateur aux produits alimentaires peu transformés.
La question de l'impact des prix agricoles dans la formation des prix alimentaires est sensible et complexe. La volatilité croissante ces dernières années des prix des matières premières agricoles et la crise que connaît aujourd'hui le monde agricole en font une question majeure. Les efforts importants de productivité tant de l'agriculture que de l'industrie ont permis une baisse des prix agricoles et alimentaires depuis des décennies. D'une manière générale, les produits alimentaires consommés sont de plus en plus transformés, avec une valeur ajoutée croissante. Cette tendance de fond se traduit par un poids généralement plus faible du prix de la matière première agricole dans celui du produit consommé. Toutefois, le poids des produits agricoles est encore très significatif dans l'ensemble des filières des produits frais, et certaines variations de prix méritent des explications. Les filières alimentaires sont nombreuses et diversifiées : elles font intervenir plusieurs intermédiaires et possèdent chacune leurs spécificités. Dès lors, l'étude des mécanismes de formation des prix au sein de la chaîne alimentaire doit se faire filière par filière. C'est pourquoi l'Observatoire des prix et des marges, qui a pour mission d'établir une plus grande transparence dans la formation des prix, a été doté en novembre 2008 d'un comité de pilotage spécifique pour les produits alimentaires. Ce comité de pilotage a pour mission la mise en place d'outils opérationnels de suivi et d'analyse des prix et des marges sur l'ensemble des maillons des filières alimentaires. Les travaux de l'observatoire ont été publiés tout au long de l'année 2009 sur la viande de porc, les produits laitiers et les fruits et légumes frais. Accessibles à tous sur Internet, ils sont régulièrement mis à jour. Chacun peut constater que les courbes d'évolution des prix à chaque stade de la filière considérée suivent, avec certains écarts et retards, à la hausse comme à la baisse, les variations des prix des matières premières agricoles, pour autant que le coût de cette matière première ait un poids significatif dans le prix du produit final. Par ailleurs, il convient de rappeler que les marges observées sont des marges brutes. L'observatoire publie en outre une ventilation de ces marges brutes selon les charges supportées par les entreprises. Il est proposé de renforcer l'action de l'Observatoire des prix et des marges dans le cadre du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche qui sera discuté en 2010 au Parlement. Son champ sera élargi à l'ensemble des produits de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture et il étudiera les coûts de production au stade de la production agricole. Il remettra chaque année un rapport au Parlement. Enfin, l'article L. 611-4-2 du code rural introduit, en périodes de crise conjoncturelle, la possibilité d'instaurer un coefficient multiplicateur encadrant les marges des fruits et légumes périssables, par la limitation du rapport entre le prix d'achat et le prix de vente. Ce mécanisme ne garantit pas le relèvement mécanique des prix à la production, mais peut conduire à une meilleure répercussion de la baisse des prix à la production auprès du consommateur final et favoriser ainsi l'écoulement des marchandises et la régulation des marchés. L'extension du coefficient multiplicateur à l'ensemble des produits agricoles n'a pas été prévue jusqu'à ce jour par la loi.
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