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Sophie Delong
Question N° 67666 au Ministère de l'Écologie


Question soumise le 29 décembre 2009

Mme Sophie Delong attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur le type d'agriculture pratiqué en France depuis la guerre qui a, sans doute, fait ses preuves en termes de production mais qui a aussi entraîné des dommages sur le plan environnemental. Ainsi, le travail des sols en profondeur et souvent répété a tué la vie microbienne et a rendu ces sols de plus en plus dépendants des engrais et du travail mécanique. Le manque de matière organique à leur surface les a sensibilisés à l'érosion et aux dérèglements climatiques, ce qui a eu pour conséquence d'emporter les éléments fertilisants vers les cours d'eau. De nombreux pays tels le Brésil, le Chili ou les États unis d'Amérique, ont adopté un système qui consiste à ne jamais travailler le sol afin d'éviter l'érosion et de laisser se développer la vie microbienne. Les semis se font alors sous couvert d'une interculture avec des outils qui ne retournent pas la terre, l'objectif étant de reconstituer la faune et la flore du sol en imitant la forêt ou la prairie naturelle par la reconstitution d'un stock de matière organique en surface. Cette méthode a pour avantage de séquestrer le carbone de la plante dans le sol après la récolte. A contrario, lorsqu'on laboure le sol, le carbone qui s'y trouve se combine à l'oxygène de l'air pour faire du CO2 qui s'échappe immédiatement. On peut piéger ainsi entre 500 et 1 500 kg de carbone par an et par hectare en évitant l'érosion des sols par les pluies. Par ailleurs, l'économie du travail du sol améliore le bilan carbone de l'agriculteur qui peut diviser par deux sa consommation de fioul. Le principal écueil de la mise en place de ce procédé est la période de reconstruction de la vie du sol qui peut durer sept ans car c'est seulement après cette période de transition que l'on retrouve des niveaux de production identiques à l'ancien système. Elle lui demande de lui indiquer les mesures qu'il entend prendre pour permettre aux agriculteurs de mettre en pratique ces méthodes qui auront un impact positif sur l'environnement et qui feront que les générations futures n'hériteront pas de sols érodés et vidés des éléments fertilisants nécessaires à la production végétale. Par ailleurs, elle demande quel dispositif on pourrait mettre en place pour les accompagner, afin qu'ils puissent effectuer cette transition sans perte de revenus, une partie des recettes de la taxe carbone pouvant peut-être alimenter cette mesure.

Réponse émise le 14 juin 2011

Au regard des développements observés sur le continent américain, la simplification des opérations de travail du sol, et notamment la suppression du labour, semble susceptible d'apporter des réponses aux exigences économiques (diminution des charges de mécanisation, gain de temps et économie d'énergie) et environnementales (lutte contre l'érosion, stockage du carbone, biodiversité) de l'agriculture actuelle. En France, d'après la dernière enquête nationale relative aux pratiques culturales, un tiers des cultures annuelles est implanté sans retournement préalable du sol. Ces techniques, sur lesquelles l'Institut national de recherche agronomique (INRA) et les instituts techniques travaillent depuis de nombreuses années, consistent notamment en la suppression du labour et son remplacement par des travaux superficiels moins exigeants en consommation d'énergie et plus favorables au stockage de carbone dans le sol, lequel reste néanmoins très inférieur à celui assuré par des prairies permanentes par exemple. Si le développement de ces techniques dans certains systèmes de production selon les conditions pédoclimatiques semble bénéfique, la confirmation de leur intérêt systématique n'est pas acquise et nécessite encore de nombreuses expérimentations et références aux échelons régionaux. En particulier, des évaluations de certains effets antagonistes sur une longue durée dans la rotation semblent nécessaires. Il apparaît en effet que la suppression du labour se traduit par des difficultés de contrôle des adventices et conduit les agriculteurs à recourir plus fréquemment aux herbicides. On dénombre, en moyenne et toutes cultures confondues, 0,3 passage supplémentaire avec un herbicide par rapport aux agriculteurs labourant les sols. De même, il ressort que les effets bénéfiques de ces techniques en matière de stockage du carbone peuvent être entièrement perdus si un délai de trois à cinq ans n'est pas respecté avant de procéder à un nouveau labour. Enfin, la suppression du travail du sol augmenterait également les émissions de protoxyde d'azote (N2O). Sachant que le potentiel de réchauffement global du protoxyde d'azote est 300 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone (CO²), il est très important d'en évaluer les émissions qui, si elles se révélaient importantes, pourraient annihiler le bénéfice provenant de la séquestration du carbone. Il y a donc lieu, en l'état des connaissances, de poursuivre les efforts de recherche en complément des services de conseil agricole pour assurer le développement idoine de ces techniques.

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