M. François Sauvadet attire l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la position de la France par rapport au statut de Rome de la Cour pénale internationale, que la France a ratifié en 2000. En effet, la France n'a, depuis neuf ans, nullement modifié notre droit national. Le projet de loi adaptant notre droit pénal à l'institution de la CPI voté par le Sénat en juin 2008 n'a toujours pas été inscrit au calendrier parlementaire. Par ailleurs, il tend à limiter, de manière préoccupante, les dispositions du statut. En effet, le projet de loi voté par le Sénat constitue un recul par rapport aux dispositions du statut de Rome, puisque la compétence donnée aux tribunaux français pour juger de crimes commis à l'étranger est assortie de conditions fortement restrictives. En premier lieu, le texte adopté par le Sénat ne permet de juger que les suspects de crimes internationaux que s'ils résident habituellement sur le territoire français, assurant ainsi l'impunité à tous ceux qui viendraient en France sans y installer leur résidence habituelle. En second lieu, il introduit une condition de double incrimination en vertu de laquelle ces crimes ne seraient poursuivis en France qu'à condition d'être incriminés par la loi pénale du pays où ils ont été commis. Troisièmement, il confie le monopole des poursuites au ministère public, en rupture radicale avec la tradition pénale française, violant de plus le principe d'égalité des citoyens devant la loi. Enfin, il inverse le principe de complémentarité défini par le statut de la CPI en subordonnant les poursuites en France à la condition que la Cour ait décliné expressément sa compétence, alors que le statut prévoit l'inverse. Si le projet de loi voté par le Sénat est adopté en l'état, les victimes des crimes internationaux les plus graves risquent de ne pas obtenir justice dans notre pays, et les possibilités de poursuites à l'encontre des auteurs présumés de ces crimes seront restreintes, au point de faire de la France une terre d'impunité. Il est indispensable que la France se mette enfin en conformité avec le droit européen, et tout simplement avec le droit humain et la morale. C'est bien le moins qu'on peut attendre de la part du pays des droits de l'Homme et de la France des lumières. Il souhaite donc connaître la position du Gouvernement sur ce sujet, dans l'objectif de faire avancer les droits de l'Homme dans notre pays et, compte tenu de l'exemplarité qui doit être celle de la France, dans le monde.
En adoptant la loi n° 2002-268 du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, la France a respecté tous ses engagements au regard de la convention portant statut de la Cour pénale internationale. En effet, cette convention n'impose aux États qui y sont parties ni la création d'incriminations spécifiques dans leur droit interne pour les crimes qui relèvent de la compétence de ladite cour, ni la reconnaissance d'une compétence juridictionnelle élargie. Néanmoins, le Gouvernement a soumis au Parlement un projet de loi, adopté à l'unanimité par le Sénat, comportant toutes les dispositions nécessaires pour incriminer, de la manière la plus complète possible, les comportements prohibés par ladite convention, notamment crimes ou délits de guerre, et prévoyant des règles de complicité élargies. L'avancée réalisée en ce qui concerne la question de l'instauration d'une compétence juridictionnelle élargie pour les tribunaux français est indiscutable : aucune disposition du statut de Rome n'impose aux États parties de se reconnaître compétents pour juger les génocides, crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis à l'étranger, par des étrangers, à l'encontre des victimes étrangères. La France n'a jamais instauré une telle compétence sans y être expressément engagée par une convention internationale. Néanmoins, le Gouvernement a soutenu l'amendement déposé par le rapporteur du Sénat élargissant la compétence des juridictions pénales françaises au-delà de leur compétence habituelle. Depuis 2002, en application des articles 627-4 à 627-15 du code de procédure pénale, qui permettent l'arrestation et la remise à la Cour pénale internationale des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes ou délits de guerre qu'elle ne peut juger en raison de la territorialité des faits, de la nationalité de l'auteur et de la victime, la France peut dénoncer de tels faits à la Cour pénale internationale et en arrêter les auteurs qui se seraient refugiés sur le territoire de la République afin de les remettre à cette Cour. En outre, en application des dispositions votées par le sénat, la France pourrait juger elle-même de tels criminels, dès lors qu'ils résideraient habituellement sur le territoire français. La législation française est donc, dès à présent, en parfaite conformité avec les obligations résultant du statut de Rome de la cour pénale internationale.
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