M. Dino Cinieri interroge M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la création d'une taxe sociale européenne à l'importation. Celle-ci, qui nous permettrait de compenser la concurrence acharnée que nous livrent certains pays pratiquant le dumping social et exportant au sein de l'Union européenne des produits à bas coûts, semble être une piste de travail intéressante. Ainsi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer son sentiment à ce sujet.
La France est tout à fait consciente des enjeux économiques et sociaux que soulève cette question et très préoccupée par le dumping social auquel se livrent certains pays. Confrontée à celui-ci, elle n'entend pas rester inactive. Lors de la 98e session de la conférence internationale du travail, le 15 juin 2009, le Président de la République a appelé à une mondialisation régulée et « coopérative » afin de lutter contre les dumpings monétaire, social et environnemental. À cette fin, il a marqué la détermination de la France à mettre « la même énergie à placer sur un pied d'égalité le droit de la santé, le droit du travail, le droit de l'environnement et le droit du commerce ». Il a d'ailleurs rappelé cet engagement au 40e Forum économique mondial de Davos, le 27 janvier 2010. Nous devons, dans ces domaines, faire preuve de la même détermination que celle déployée en faveur de la diversité culturelle. Un travail interministériel avec les organisations syndicales et patronales est actuellement en cours, afin de déterminer la traduction concrète qu'il convient de donner aux orientations définies par le Président de la République. La France agit pour que l'Union européenne porte et mette en oeuvre ce message. Elle plaide, notamment, pour l'affirmation d'une « dimension externe forte et opérationnelle » de la future stratégie économique de l'Union européenne 2010-2020 (dite « UE 2020 »), que les Européens définissent actuellement pour succéder à la stratégie de Lisbonne. L'UE doit, en effet, s'affirmer davantage comme un acteur mondial, mieux prendre en compte les décisions de ses partenaires dans l'élaboration de ses choix internes, mais aussi promouvoir ses standards économiques, environnementaux et sociaux, qui sont les plus élevés au monde. En matière environnementale, par exemple, la France invite l'Union européenne à examiner et à prendre les mesures appropriées pour faire face au risque de dumping écologique, notamment en mettant en place un mécanisme d'ajustement aux frontières visant les pays qui ne joueraient pas le jeu de la lutte contre le changement climatique, dans des conditions compatibles avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce. En oeuvrant à la promotion de ce mécanisme, notre pays agit conformément à ce que la Commission européenne a proposé en janvier 2008 et qui a été approuvé par le Conseil européen de décembre 2008, dans le cadre du paquet énergie-climat. En matière sociale, l'Union européenne dispose déjà de leviers pour faire respecter les standards internationaux. Ainsi, l'octroi du régime spécial d'encouragement en faveur du développement durable et de la bonne gouvernance (SPG+) est notamment conditionné au respect des grandes conventions de l'Organisation internationale du travail. Si ces dernières ne sont pas respectées, l'Union européenne peut retirer de manière unilatérale le bénéfice de ce dispositif. Face au dumping économique, qui se traduit souvent par du dumping social, l'UE dispose aussi d'instruments efficaces lui permettant d'agir de manière réactive et coordonnée, par le biais des droits de douane compensateurs que sont les droits antidumping. Mais l'Union doit aller plus loin, pour mieux défendre ses intérêts sur la scène internationale et définir une stratégie européenne claire face aux grands pays émergents. À notre sens, la promotion des normes sociales doit s'affirmer par la défense et la promotion du travail décent et des standards internationaux définis par l'Organisation internationale du travail en matière de droit du travail. L'Union européenne pourrait ainsi définir une stratégie commune pour inciter l'ensemble des organisations internationales à mieux prendre en compte le travail décent dans les politiques qu'elles développent.
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