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Danielle Bousquet
Question N° 66102 au Ministère des Affaires étrangères


Question soumise le 8 décembre 2009

Mme Danielle Bousquet attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur le trafic d'ivoire, en particulier depuis les pays d'Afrique. En effet, selon certaines estimations, au moins 30 000 éléphants, sur une population totale d'environ 470 000, sont tués chaque année pour alimenter le commerce illégal de l'ivoire. Le trafic d'ivoire et de gibier semble être devenu l'un des commerces illégaux les plus lucratifs en Afrique. Ce commerce illégal constitue une menace de premier ordre pour la biodiversité et la préservation des espèces concernées. Pour de nombreux pays d'Afrique, la lutte contre ce trafic constitue également un enjeu économique de premier plan puisque leur économie, largement dépendante de l'activité touristique, repose sur la préservation de cette biodiversité. Elle lui demande donc de lui indiquer quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour soutenir les pays d'Afrique dans leur lutte contre le trafic d'ivoire.

Réponse émise le 4 mai 2010

L'un des principaux instruments de lutte contre le trafic d'ivoire est la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), signée à Washington en 1973 et à laquelle la France a adhéré dès 1978. Son objectif est de garantir que le commerce international des espèces inscrites dans ses annexes, ainsi que des parties et produits qui en sont issus, ne nuit pas à la conservation de la biodiversité et repose sur une utilisation durable des espèces sauvages. À cette fin, la CITES fixe un cadre juridique et une série de procédures pour que les espèces sauvages faisant l'objet d'un commerce international ne soient pas surexploitées. La 14e session de la Conférence des parties à la CITES (La Haye, juin 2007) a décidé d'un moratoire sur toute nouvelle vente d'ivoire jusqu'en 2017 pour les quatre pays d'Afrique australe qui ont actuellement leurs populations d'éléphants à l'annexe II. Cette décision aboutit de facto au même résultat qu'un classement à l'annexe I, puisque la vente de l'ivoire y est interdite. Les études approfondies menées depuis vingt ans par le secrétariat CITES, TRAFFIC et l'UICN ont démontré que les principales menaces pour l'éléphant sont la perte et la fragmentation de son habitat, le braconnage pour l'ivoire et la viande, et les conflits hommes-éléphants. En outre, le manque de capacités institutionnelles et de ressources dans certaines parties de l'Afrique a entraîné une gestion des éléphants souvent médiocre. Les conflits hommes-éléphants et la surabondance locale d'éléphants ont été identifiés comme des questions émergentes affectant négativement la conservation et la gestion de cette espèce. Les causes fondamentales des conflits hommes-éléphants sont des pratiques d'aménagement du territoire inappropriées, la pauvreté rurale, l'absence de régime foncier et de droits de propriété sur la faune sauvage. La CITES a mis en place depuis 1989 la base de données ETIS (Système d'information sur le commerce des produits de l'éléphant), qui est un dispositif d'information complet pour recenser et analyser le commerce illégal de l'ivoire et des autres produits issus de l'éléphant. L'analyse ETIS la plus récente fondée sur 12 378 données de saisies enregistrées pour la période 1989-2006 invalide l'hypothèse selon laquelle les décisions de la CITES sur les éléphants envoient des signaux susceptibles de conduire à l'augmentation du commerce illicite de l'ivoire. Par ailleurs, l'analyse des données MIKE (Suivi du braconnage de l'éléphant) recueillies sur le continent africain depuis 2000 révèle que la proportion d'éléphants braconnés est inversement proportionnelle à l'effort de conservation de l'espèce, à la bonne gouvernance et au bien-être social, et confirme que rien ne corrobore une quelconque relation entre la proportion d'éléphants abattus illégalement et les décisions de la CITES sur la vente de l'ivoire. Au contraire, il est constaté que le braconnage a baissé au cours des deux années qui ont suivi la précédente vente expérimentale des stocks d'ivoire gouvernementaux d'Afrique australe en 1999. À ce sujet, il convient de rappeler que la vente unique des stocks gouvernementaux d'ivoire d'Afrique du Sud, du Botswana, de la Namibie et du Zimbabwe, acceptée par consensus en juillet 2007 par 172 États et réalisée fin 2008, portait uniquement sur de l'ivoire dûment contrôlé comme provenant d'éléphants : morts de causes naturelles au cours des vingt dernières années ; ou éliminés sélectivement en tant qu'animaux posant problème ; ou abattus avant 1994 dans le cadre d'un programme de régulation des effectifs. Les produits de la vente ont été affectés exclusivement à la conservation de l'éléphant et à des programmes de développement des communautés locales partageant son habitat. Entre mars et avril 2008, le secrétariat CITES s'est rendu dans les quatre pays concernés pour vérifier que les stocks d'ivoire déclarés avaient été correctement enregistrés au 31 janvier 2007, qu'ils se composaient uniquement d'ivoire d'origine légale (l'ivoire saisi et l'ivoire d'origine inconnue étant exclus de la vente), que l'ivoire était marqué selon les règles de la CITES et que les poids étaient conformes aux données enregistrées. La population d'éléphants d'Afrique comprend ainsi plus de 500 000 individus, dont 88 % en Afrique de l'Est et en Afrique australe et est considérée comme en augmentation, en dépit du déclin de certaines petites populations. La France, partie à la CITES, contribue à la formation des administrations des États concernés afin que les actions de conservation de l'espèce soient menées en priorité par les parties prenantes. À titre d'exemple, notre pays a financé en 2009 deux ateliers de sensibilisation à la CITES et de formation au dispositif ETIS, dans l'est du Cameroun et dans la province orientale de la République démocratique du Congo ; il a également financé la participation de deux responsables des autorités CITES du Cameroun au cours de maîtrise CITES de l'université de Cordoue. Plus globalement, la France soutient techniquement et financièrement la mise en oeuvre du plan d'action pour l'éléphant d'Afrique qui vient d'être adopté à l'échelle panafricaine pour s'attaquer concrètement aux véritables menaces qui pèsent aujourd'hui sur l'éléphant : lutte contre le braconnage et le commerce illicite de l'ivoire ; suppression des marchés intérieurs non contrôlés (principaux débouchés de l'ivoire illégal) ; organisation de formations ; gestion des transferts d'éléphants ; réduction des conflits hommes/éléphants ; amélioration des programmes communautaires de développement et de conservation de l'éléphant dans les zones hébergeant cette espèce et à proximité.

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