M. André Gerin attire l'attention de M. le secrétaire d'État à la justice sur l'évolution sans cesse en hausse de la pratique de la garde à vue. L'an dernier, 577 816 personnes y ont été placées. Entre 2000 et 2007, leur nombre a augmenté de 54,2 %, celles de plus de 24 heures de 73,8 %. Elle est aujourd'hui devenue un élément de routine accompagnée de pratiques humiliantes et dégradantes sans justification, telles la mise à nu et la fouille au corps. La consigne donnée aux forces de police et de gendarmerie de « faire du chiffre » est évidemment très directement liée à cette dérive, qui ne correspond en rien à une lutte plus efficace contre la délinquance et l'insécurité. Plusieurs avis de la Cour européenne des droits de l'Homme ont dénoncé les conditions de la garde à vue dans notre pays. La commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) a, à plusieurs reprises, déposé des observations similaires. Le Premier ministre vient de déclarer que cette procédure pénale méritait d'être « repensée ». Mme la ministre a annoncé que la garde à vue ne serait possible que pour des faits pouvant entraîner une peine d'emprisonnement, ce qui demeure un critère arbitraire et aléatoire au moment où l'enquête débute et où les preuves du délit sont à établir. Il souhaiterait donc connaître les intentions du Gouvernement afin de mettre un terme à des pratiques qui sont une honte pour la France, et le calendrier de leur mise en oeuvre.
La garde à vue est un instrument d'enquête devant contribuer à la manifestation de la vérité et la décision de placement en garde à vue ne saurait être arbitraire. D'ores et déjà, le code de procédure pénale offre un certain nombre de garanties à la personne qui fait l'objet d'une telle mesure, dont l'usage doit être limité aux nécessités réelles de l'enquête. Dans le projet de réforme de la procédure pénale, sera réaffirmé le caractère exceptionnel de la garde à vue. Dans cette perspective, le recours à la garde à vue ne sera possible que dans le cas de crimes ou de délits punis d'une peine d'emprisonnement. En outre, pour des affaires ne présentant pas un caractère de particulière gravité, la personne concernée pourra, sous réserve de son accord, être entendue librement. Elle sera alors retenue quatre heures au maximum dans les locaux des services de police ou de gendarmerie, ce qui sera suffisant, dans bon nombre de cas, pour recueillir les éléments utiles à l'enquête. Néanmoins, si elle le souhaite, cette personne pourra demander à être entendue sous le régime de la garde à vue, qui ouvre en effet un certain nombre de droits : prévenir des proches, être assisté par un avocat, voir un médecin, connaître la nature de l'infraction reprochée. S'agissant du droit d'accès à un avocat, le projet de réforme du code de procédure pénale répond à la demande de développement de l'assistance apportée par l'avocat à la personne gardée à vue. Premièrement, le texte prévoit expressément qu'en matières criminelle et correctionnelle aucune condamnation ne pourra être prononcée sur le seul fondement de déclarations faites par un gardé à vue qui n'aurait pu bénéficier de l'assistance d'un avocat. Deuxièmement, dès le début de la garde à vue, l'avocat pourra recevoir une copie des procès-verbaux des auditions de son client dès que ceux-ci auront été réalisés. Enfin, si les auditions sont prolongées au-delà de vingt-quatre heures, ce qui est possible dans un certain nombre de cas sur autorisation du procureur de la République, le gardé à vue pourra être assisté par son avocat lors des auditions durant toute la durée de la prolongation. L'avocat du gardé à vue pourra alors poser des questions et faire des observations. S'agissant des mesures de sécurité qui visent à éviter que les gardés à vue ne portent atteinte à leur propre intégrité physique, certaines précautions sont nécessaires. Dans certains cas, les mesures sont excessives. Même si celles-ci ne relèvent pas strictement de la loi, il importe que l'ensemble de nos textes permettent un plus juste respect de la personne. Le ministre d'État, garde des sceaux, et son secrétaire d'État sont très attachés à ce que les conditions de garde à vue ne portent pas atteinte à la dignité des personnes. Il a été rappelé aux procureurs généraux, par une circulaire du 1er novembre 2009, l'importance des visites régulières, et en toute hypothèse au moins une fois par an, des locaux de garde à vue par les procureurs de la République.
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