M. Jean-Louis Idiart attire l'attention de M. le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants sur la situation dans laquelle se trouvent certaines femmes conjointes survivantes d'anciens supplétifs. Nombre d'allocations destinées aux rapatriés d'Algérie, dont notamment l'allocation de reconnaissance instaurée par la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 « portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés » et l'allocation forfaitaire complémentaire issue de l'article 2 de la loi n° 94-488 du 11 juin 1994 « relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives ou victimes de la captivité en Algérie en raison de leur nationalité française », sont assises sur la condition de statut de rapatrié. Le versement de ces allocations par l'agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer (ANIFOM) est conditionné par les dispositions de la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés. Celle-ci stipule, au premier alinéa de l'article 9, que l'indemnisation est ouverte aux anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives ayant servi en Algérie « qui ont conservé la nationalité française en application de l'article 2 de l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 ». En application du principe selon lequel l'allocation est versée, dans les mêmes conditions, au conjoint survivant en cas de décès de l'intéressé, les conjoints survivants d'un ancien supplétif doivent ainsi avoir conservé la nationalité française par déclaration recognitive auprès du juge d'instance avant le 10 janvier 1973 pour bénéficier des indemnités et allocations de l'État français. Ces dispositions juridiques parfaitement légitimes entrent pourtant en contradiction avec la réalité du parcours de certaines personnes et amènent à les priver des allocations que l'esprit de la loi tend à leur accorder. C'est particulièrement le cas de femmes, dorénavant âgées, qui ont obtenu dans les années 1960 la délivrance de cartes d'identités par les préfectures après avoir effectué les démarches normales dans les commissariats de police. Le malheur de ces femmes, parfois analphabètes, réside dans le fait que personne ne les a informées, à l'époque, de la nécessité d'effectuer une déclaration recognitive auprès du juge d'instance. Ces femmes ont tout naturellement cru avoir conservé la nationalité française alors que l'État leur avait délivré une carte d'identité et qu'elles disposaient du droit de vote. Dans ces conditions, n'importe quelle personne se penserait légitimement française. Pourtant, à l'occasion du renouvellement des cartes d'identités, dix ans après leur délivrance, certaines femmes ont vu leur nationalité retirée au motif du défaut de déclaration recognitive ! Certaines d'entre elles, vivant en France depuis plus de quinze ans et ayant donné naissance à des enfants, ont même été confrontées à des menaces d'expulsion et à des gardes à vue ! Le délai pour la déclaration recognitive étant de fait passé, elles n'ont finalement pu obtenir la nationalité française (qui avait jusqu'alors toujours été la leur) que par réintégration. La réintégration dans la nationalité française n'équivaut cependant pas au statut de rapatrié et le défaut de déclaration recognitive continue à avoir des conséquences sur leur vie en les excluant des allocations et indemnités. L'État refuse de verser ces allocations et indemnités à des femmes conjointes de supplétifs et ayant parfois directement vécu la guerre dans les casernes françaises ! Cette situation est bien entendu indigne des valeurs de la République. Le Gouvernement a le devoir moral d'y apporter très rapidement une réponse et permettre à des femmes dorénavant âgées de bénéficier des allocations auxquelles elles ont moralement droit. Outre le problème administratif de défaut de déclaration recognitive, il est nécessaire de reconnaître que ces personnes remplissent manifestement les conditions qui guident l'esprit de la loi. Personne ne peut nier qu'il s'agit de personnes ayant fait preuve d'un attachement et d'un dévouement particuliers à l'égard de la France et ayant choisi de recouvrer la nationalité française. Le Gouvernement pourrait construire une réponse à ce problème en s'appuyant sur le défaut d'informations dont ont été victimes des personnes n'ayant jamais été averties de la nécessité d'effectuer une déclaration recognitive auprès du juge d'instance. Ce manque d'information constitue une discrimination par rapport aux personnes qui ont été informées de l'ensemble des démarches à effectuer. Devant l'urgence à réparer cette injustice, il lui demande s'il est dans les intentions du Gouvernement de répondre enfin aux attentes légitimes de ces femmes survivantes d'anciens supplétifs.
Le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants tient à rappeler que l'article 9 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés permettait l'attribution de l'allocation de reconnaissance aux harkis et aux veuves de harkis n'ayant pas opté pour la nationalité française avant 1973, par méconnaissance des textes législatifs et réglementaires antérieurs, à condition d'avoir acquis la nationalité française avant le 1er janvier 1995. Ce sont ainsi 384 harkis et veuves qui ont déposé une demande dans les délais. Cependant, le Conseil d'État, dans un arrêt du 6 avril 2007 a annulé les critères de nationalité édictés par le décret n° 2005-477 du 17 mai 2005 pris pour l'application des articles 6, 7 et 9 de la loi du 23 février 2005. L'intégralité des demandes a donc été étudiée sans tenir compte du critère de nationalité et l'allocation de reconnaissance a ainsi pu être attribuée à 261 harkis et veuves qui ne pouvaient pas y prétendre initialement.
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