M. Patrick Balkany attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur le rapport des Nations-unies sur la culture du pavot en Afghanistan. Selon ce rapport, la culture du pavot en Afghanistan entretient un marché de l'héroïne et de l'opium représentant 65 milliards de dollars par an, qui fournit plus de 15 millions de drogués à travers le monde. Le document précise qu'avec 92 % de l'opium produit dans le monde, le pays alimente un marché finançant insurgés et groupes criminels, notamment en Asie centrale, en Russie et dans les Balkans. Ce rapport indique, par ailleurs, que moins de 2 % de l'opium et de l'héroïne sont saisis par les autorités avant de quitter l'Afghanistan. À travers le monde, seulement 20 % des opiacés venant d'Afghanistan sont saisis avant d'atteindre les consommateurs. Or le directeur de l'office des Nations-unies contre la drogue et le crime (ONUDC) estime qu'il est infiniment plus efficace et moins cher de saisir l'opium afghan là où il est produit que de tenter de le faire là où il est consommé. En 2003, les représentants d'une cinquantaine de pays s'étaient déjà réunis à Paris pour une conférence ministérielle, à l'initiative de la France, destinée à s'attaquer aux routes de la drogue en provenance d'Afghanistan. Un pacte de Paris sur les routes de l'héroïne avait par la suite été signé. Au vu de l'ampleur du phénomène, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les actions déjà mises en place dans le cadre de ce pacte de Paris, ainsi que celles qui viendront renforcer le dispositif existant.
Le pacte de Paris constitue le principal cadre de réflexion, de dialogue et de coordination des projets relatifs à la lutte contre le trafic d'héroïne en provenance d'Afghanistan. Il fait suite à une initiative française lancée en 2003, qui avait réuni les ministres des affaires étrangères de 55 pays, ainsi qu'une dizaine d'organisations internationales pour évoquer les « routes de la drogue de l'Asie centrale à l'Europe ». Cette première réunion avait permis de souligner, auprès de l'ensemble des participants, que le trafic d'héroïne était un facteur d'instabilité pour l'Afghanistan, mais également pour tous les pays de la région, et que ce phénomène relevait d'une responsabilité partagée entre pays producteurs, consommateurs et de transit. Cette initiative avait été saluée par l'Assemblée générale des Nations unies par la résolution R 58/141 du 22 décembre 2003, puis pérennisée dans le cadre de l'office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), qui en assure le secrétariat et coordonne les projets et réunions d'experts. Cet engagement des pays partenaires s'est traduit par la stratégie dite « Arc-en-ciel », développée par l'ONUDC, qui met en oeuvre les recommandations formulées par les experts nationaux participant au pacte de Paris. Les tables rondes d'experts, qui sont organisées trois fois par an dans le cadre du pacte de Paris, constituent des enceintes ad hoc pour évoquer l'ensemble des projets inscrits dans cette stratégie. Elles s'articulent autour d'une thématique spécifique ou régionale relative à l'héroïne afghane : principales routes du trafic, actions opérationnelles régionales mises en place pour l'endiguer, aspects économiques (blanchiment d'argent), conséquences sanitaires et sociales. Ces réunions favorisent une coordination accrue des actions opérationnelles qui sont mises en place dans les régions les plus durement touchées par le trafic d'héroïne (Asie centrale, Iran, Pakistan et Afghanistan), dans la mesure où les principaux bailleurs de fonds et les pays bénéficiaires de ces programmes y participent. Elles permettent également d'instaurer un dialogue politique continu sur le sujet. La stratégie « Arc-en-ciel », qui est la traduction concrète des recommandations des experts, attache une importance particulière aux pays voisins et aux partenaires régionaux, qui peuvent appuyer le développement et la stabilité du pays. Elle privilégie une approche intégrée prenant en compte autant la nécessité d'endiguer le narcotrafic par le renforcement des capacités sécuritaires de l'Afghanistan et des pays de la région, que la réduction de la demande, l'Afghanistan, le Pakistan et l'Asie centrale étant affectés par une progression rapide de la toxicomanie. Enfin, dans un pays où on estime à 3,3 millions le nombre de personnes vivant de la culture du pavot, l'ONUDC encourage des projets économiques et sociaux sur le long terme, notamment les actions d'éradication et le développement alternatif. Le pacte de Paris a conduit à une réelle prise de conscience du problème posé par le détournement de précurseurs chimiques, indispensables à la fabrication d'héroïne. L'opération TARCET, qui est organisée chaque année à l'échelle régionale (Asie centrale, Afghanistan, Pakistan et Iran) permet de professionnaliser les douaniers et de les sensibiliser à cette problématique. C'est dans le cadre du pacte que les États sont régulièrement encouragés à utiliser le système de notification préalable PEN-Online de précurseurs chimiques, qui permet d'assurer une traçabilité de ceux-ci, à la demande des États importateurs. La question de la mutualisation du renseignement est essentielle pour endiguer les trafics, et ce particulièrement dans des régions où les frontières sont poreuses et les mouvements difficiles à contrôler. La mise en place du CARICC (« l'Interpol » d'Asie centrale), constitue un progrès indéniable en ayant favorisé le développement d'une coopération opérationnelle entre pays voisins, ce qui a conduit à une augmentation des saisies et à une meilleure identification des réseaux criminels et des routes utilisées. La force du pacte de Paris est en effet de permettre la mise en place de coopérations opérationnelles et d'un dialogue politique, dans des contextes régionaux parfois difficiles. De manière générale, l'ONUDC s'est imposé comme un interlocuteur indispensable et le pacte de Paris comme une référence pour les actions visant à endiguer l'héroïne afghane. Les principaux bailleurs le soutiennent et la France y participe pleinement politiquement, financièrement et à un niveau opérationnel, par l'envoi régulier d'experts nationaux en Asie centrale et en Afghanistan.
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