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Philippe Duron
Question N° 6119 au Ministère de la Justice


Question soumise le 2 octobre 2007

M. Philippe Duron attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les modalités du projet de réforme de la carte judiciaire en Basse-Normandie et sur les conséquences économiques et sociales qu'elle pourrait avoir sur des territoires déjà fragilisés. Il rappelle au préalable que la réforme de la carte judiciaire ne peut s'envisager sans approfondir en parallèle la réflexion sur les moyens accordés à la justice (avec 51 euros par habitant, la France est derrière des pays comme l'Espagne, le Royaume-Uni : 60 euros ; les Pays-Bas : 90 euros ou de l'Allemagne : 102 euros), et celle sur l'organisation judiciaire afin d'améliorer l'accès à la justice et au droit. Ainsi, toute réforme de la carte judiciaire doit avant tout viser une amélioration du service public de la justice et non répondre à une simple exigence comptable. L'usager de la justice doit être placé au centre du projet. Il souhaite en particulier appeler attention sur, fait qu'il n'existe pas de taille idéale pour un tribunal, valable en tout lieu et de tout temps. Au-delà des schémas de principes organisant la carte judiciaire à l'échelle nationale, il souhaite que la réforme vise à adapter l'offre à la réalité des territoires vécus, comme cela avait été le cas lors de la réforme des tribunaux de commerce menée par Mme Élisabeth Guigou durant l'avant-dernière législature. Par ailleurs, la suppression de nombreux tribunaux de commerce, d'instance, de grande instance comme de conseils de prud'hommes pourrait avoir des conséquences extrêmement néfastes pour les territoires fragiles de Basse-Normandie, qui risquent d'être les premiers touchés par la réforme. La Basse-Normandie dispose d'un réseau de villes moyennes, constitutif de son identité territoriale et gage d'équilibre et de cohésion, qui doit être absolument préservé. Ces territoires, qui ont eu à subir des restructurations industrielles, le départ de très nombreuses administrations et qui furent longtemps enclavés, doivent bénéficier à leur juste mesure de l'effort de solidarité nationale. La justice, en tant que service public régalien, doit y contribuer. C'est pour l'ensemble de ces raisons qu'il s'interroge sur les intentions du ministère concernant l'avenir des tribunaux de grande instance d'Alençon, Argentan, Avranches, Cherbourg-Octeville, Coutances et Lisieux ; des tribunaux d'instance d'Alençon, Argentan, Avranches, Bayeux, Cherbourg-Octeville, Coutances, Domfront, Falaise, Lisieux, Mortain, Mortagne-au-Perche, Pont-l'Évêque, Saint-Lô, Valognes, Vire ; des tribunaux de commerce d'Alençon, Argentan, Bayeux, Cherbourg-Octeville, Condé-sur-Noireau, Coutances, Honfleur, Lisieux ; des conseils de prud'hommes d'Alençon, Argentan, Avranches, Cherbourg-Octeville, Coutances, Flers, Lisieux, Trouville-sur-Mer, Vire. Le Gouvernement souhaite-t-il supprimer l'une de ces juridictions ? souhaite-t-il opérer des regroupements. Et si oui, lesquels et quels en seront les conséquences pour le tribunal de Caen ? Quels seront les dispositifs de compensation que le Gouvernement envisage de mettre en place pour des villes qui auraient à souffrir de la fermeture de tribunaux (notamment en ce qui concerne le maintien de la présence judiciaire sur le territoire) ? Enfin, au regard du coût social important que cette réforme induit, le Gouvernement a-t-il estimé le montant des économies qu'il espérait réaliser, que ce soit au niveau national, régional et départemental ? Et si oui, est-il possible d'en connaître la hauteur pour la Basse-Normandie ? Dans tous les cas, il considère qu'il serait indispensable de procéder à une étude d'impact précise avant toute fermeture de site, permettant de comparer les coûts sociaux aux bénéfices financiers potentiels.

Réponse émise le 10 mars 2009

La garde des sceaux, ministre la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la réforme de la carte judiciaire était une nécessité pour améliorer le fonctionnement de la justice et garantir au justiciable une justice de qualité. Il importait en effet de prévoir des implantations judiciaires ayant une activité suffisante pour garantir la qualité et l'efficacité de la réponse judiciaire, en permettant d'assurer, dans des conditions optimales, la continuité du service public de la justice, l'accueil du justiciable et la sécurité des personnels et des justiciables. Cette réforme qui a donné lieu à une vaste consultation tant au niveau national qu'au plan local se traduit, pour la Basse-Normandie, par le regroupement du tribunal de grande instance d'Avranches avec celui de Coutances et des tribunaux d'instance et juridictions de proximité de Bayeux et Falaise avec les juridictions de même nature ayant leur siège à Caen, de Pont-l'Evêque avec Lisieux, de Mortain avec Avranches, de Valognes avec Cherbourg, de Saint-Lô avec Coutances, de Mortagne-au-Perche avec Alençon et de Domfront avec les juridictions créées à Flers. Le greffe détaché de Bretteville-sur-Laize, qui d'ores et déjà n'était plus en fonctionnement, est également supprimé et celui de Flers transformé en tribunal d'instance. La réforme prend effet pour les tribunaux de grande instance le 1er janvier 2011 et pour les tribunaux d'instance et juridictions de proximité le 1er janvier 2010. Pour le greffe détaché de Bretteville-sur-Laize, la suppression est intervenue dès la publication du décret. Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2009, les tribunaux de commerce de Bayeux, Condé-sur-Noireau, Argentan et Honfleur sont fusionnés avec les tribunaux de commerce de Caen, Alençon et Lisieux. Enfin, les conseils de prud'hommes de Vire, Trouville-sur-Mer et Flers ont été supprimés le 3 décembre 2008 au profit de ceux de Caen, Lisieux et Argentan. Ainsi, la carte judiciaire de la cour d'appel de Caen est-elle désormais plus rationnelle. En effet, avec moins de 1,5 million d'habitants cette cour d'appel comptait avant la réforme 45 juridictions, pour seulement 38 dans la cour voisine de Rouen, qui compte 1,8 million d'habitants. La réorganisation ainsi intervenue, loin de répondre à une logique comptable, vise avant tout à renforcer la qualité et la rapidité de la justice. La mutualisation des moyens, la souplesse d'organisation qu'elle permet et la plus grande spécialisation des magistrats permise par la réforme de la carte judiciaire vont permettre d'atteindre ces objectifs. Par ailleurs, la déjudiciarisation et la simplification des procédures que permettront les réformes inspirées par les rapports Guinchard et Magendie vont avoir un impact sur l'amélioration de la qualité et de la rapidité de la justice. La réforme de la carte judiciaire aura pour conséquence de dégager des marges de manoeuvre, notamment en termes d'emplois. Il convient de souligner que parallèlement à sa mise en oeuvre, a été entreprise une rénovation des dialogues de gestion entre la direction des services judiciaires et les chefs de cour. La détermination des moyens, notamment humains, nécessaires pour la bonne marche des juridictions repose désormais sur une approche fondée d'une part sur les résultats constatés en termes de qualité et de productivité et d'autre part sur les objectifs à atteindre. En conséquence, la profonde transformation de l'organisation des juridictions, en cours et à venir, trouve ses origines dans la réforme de la carte judiciaire, dans un mouvement de déjudiciarisation et de simplification des procédures, dans l'utilisation grandissante des nouvelles technologies et dans la modernisation poussée des méthodes de gestion. Dès lors, même a posteriori, il ne sera guère possible d'isoler la part des économies qui seront réalisées du seul fait de la réforme de la carte judiciaire. Il convient enfin de souligner que l'ensemble de ces réformes s'inscrit pleinement dans la révision générale des politiques publiques. L'investissement initial aura pour conséquence une meilleure efficience du service public de la justice.

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