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Jean-Jacques Urvoas
Question N° 60544 au Ministère de l'Immigration


Question soumise le 13 octobre 2009

M. Jean-Jacques Urvoas attire l'attention de M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire sur la proposition émise par plusieurs associations d'interdire le recours à l'examen dit « expertise osseuse », pratiqué afin de déterminer l'âge de mineurs isolés étrangers en quête d'asile. Cette technique s'avère en effet d'une efficacité plus que douteuse et soumise à certaines garanties (consentement du mineur, entretien entre celui-ci et le médecin, présence d'un interprète si besoin...) qui, dans les faits, sont rarement respectées. Il faut remarquer, à cet égard, que l'inspection générale des affaires sociales, tout comme la défenseure des enfants, ont également réclamé l'abandon de cette pratique, et que certains départements, à l'instar de l'Ille-et-Vilaine, se sont publiquement prononcés contre son usage. Il lui demande donc de prendre toute disposition nécessaire afin qu'elle soit prohibée dans notre pays.

Réponse émise le 13 avril 2010

En conformité avec ses principes constitutionnels, la Franceapplique une réglementation très protectrice pour les étrangers mineurs quelle que soit leur situation juridique. Ainsi, un mineur isolé présent sur le territoire national ne peut faire l'objet d'une décision d'éloignement (cf. articles L. 511-4 et L. 521-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile). Néanmoins, la garantie juridique liée à l'état de minorité nécessite qu'en cas de doutes sur les déclarations de l'intéressé il soit procédé à une vérification de celles-ci. La confirmation de la minorité juridique par des documents d'état civil constitue le premier moyen de vérification, consacré par l'article 47 du code civil qui dispose que « tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi.... ». Le second moyen de validation de la minorité, notamment en l'absence de documents d'état civil, repose sur l'examen physique. Pour ce faire, il est procédé notamment à une radiographie de la main et du poignet et au contrôle de la dentition. Cette méthode d'analyse osseuse, dite de Greulich et Pyle, constitue pour l'Académie nationale de médecine, d'après l'avis circonstancié du 8 mars 2006 qu'elle a rendu sur saisine conjointe des ministères de la justice et de la santé, un cadre référentiel « universellement utilisé » et offre « une bonne approximation de l'âge de développement d'un adolescent en dessous de 16 ans », sans pour autant permettre « une distinction nette entre 16 et 18 ans ». L'Académie conclut que cette méthode est plutôt favorable au mineur, en sous-estimant l'âge réel, de plus ou moins 18 mois observés, compte tenu de la marge de détermination scientifique de l'âge osseux, lors de ce test : « Il existe selon l'Académie de médecine, des situations relativement rares où âge de développement et âge réel comportent des dissociations, la plupart d'entre elles conduisant à une sous-estimation de l'âge réel. » Cette précision est importante puisqu'elle remet en cause l'idée selon laquelle le recours à cette méthode pourrait avoir pour effet de déclarer majeurs des jeunes mineurs. De même, dans son avis du 23 juin 2005, le comité consultatif national d'éthique « ne récuse pas a priori leur emploi », dans la mesure où ces tests permettent de protéger tous les jeunes étrangers. Il indique que « le statut de mineur est un statut protégé » et « que la protection qu'il entraîne pourrait encourager une certaine délinquance ou criminalité d'enfants ou d'adolescents instrumentalisés par des adultes ». En l'état actuel de la science, cette méthode constitue le meilleur test disponible, unanimement admis par les juridictions comme un mode de preuve de l'âge d'un jeune étranger, dans le respect de la personne du mineur et suivant des règles éthiques. Néanmoins, par communiqué de presse en date du 18 novembre 2009, le ministre chargé de l'immigration a présenté les premières mesures issues du rapport du groupe de travail sur les étrangers mineurs isolés, qui s'est réuni à son initiative de mai à octobre 2009. Parmi celles-ci figure celle consistant à étudier un éventuel remplacement de l'actuel procédé de détermination de l'âge par une nouvelle méthode. Compte tenu des positions exprimées au sein de ce groupe de travail, il a été décidé d'étudier les adaptations susceptibles d'être apportées au dispositif en vigueur. Une approche européenne sur cette question est également envisagée puisque la présidence espagnole de l'Union européenne a inscrit à son agenda le sujet des mineurs isolés.

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