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Laurent Hénart
Question N° 60094 au Ministère de l'Écologie


Question soumise le 6 octobre 2009

M. Laurent Hénart attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur la définition de la notion de « sinistre minier ». Un nombre important de communes et de particuliers des anciens bassins miniers de Lorraine sont chaque année confrontés à des affaissements de terrain et de bâtiments. De même que certains particuliers demeurent de longues années dans l'attente d'une indemnisation, certaines communes doivent puiser dans leurs propres ressources pour financer les réparations. Le système de garantie et d'indemnisation mériterait d'être redéfini afin de garantir la sécurité des personnes concernées, autant que l'équité en termes d'assurance et de couverture des risques. Sur la base des propositions du Collectif de défense des bassins miniers lorrains, la notion de sinistre minier pourrait être définie selon les quatre principes suivants : en cas de sinistre imminent, évacuer une maison au titre du principe de précaution et prévoir l'indemnisation des victimes ; en cas de sinistre avéré, évacuer une maison abimée par des effondrements et prévoir l'indemnisation des victimes ; en cas de réparation, veiller à n'exclure aucune partie de la propriété lors du chiffrage ; définir clairement un seuil de pente et veiller à une même application sur l'ensemble du territoire national. Dans la continuité des évolutions apportées au code minier par les lois de 1994, 1999 et 2003 et par différents règlements, il lui demande dans quelle mesure ces propositions peuvent conduire l'État à envisager une nouvelle définition du sinistre minier.

Réponse émise le 13 avril 2010

Les conditions de prise en compte des dégâts d'origine minière ont fortement évolué depuis la fin des années 1990, à la suite des affaissements miniers importants survenus en particulier dans le bassin ferrifère lorrain. Le code minier a ainsi été modifié à plusieurs reprises pour étendre les possibilités d'indemnisation. L'article 75 de ce code prévoit, de manière générale, une pleine responsabilité de l'ancien exploitant minier ou à défaut du titulaire de la concession par une réparation intégrale des dommages résultant de l'exploitation minière. Il indique également que cette responsabilité n'est pas limitée à la durée de la concession. Bien évidemment, cette responsabilité est limitée, selon les principes de base de notre droit, par la prescription décennale : elle ne peut plus être recherchée lorsque la victime d'un dégât n'a engagé aucune action pendant plus de dix ans après la fin des dégâts. Toutefois, certains biens immobiliers ont été cédés par l'ancien exploitant minier, en particulier dans le bassin ferrifère lorrain, avec une clause exonérant cet exploitant de sa responsabilité en cas de dégâts futurs. De telles clauses sont dorénavant interdites dans les nouveaux contrats de vente, mais les plus anciennes restent valides. Dans un tel cas, l'indemnisation est assurée par l'État en application de l'article 75-2 du code minier. La loi a toutefois prévu que ce dispositif d'indemnisation est applicable en cas de vente d'un bien clausé à un particulier ou à une collectivité, et non à un professionnel. Cette limitation du dispositif d'appel à la solidarité nationale a été voulue par le législateur pour éviter de réparer aux frais du contribuable des dégâts miniers occasionnés à des bâtiments connus pour être situés dans une zone où des mouvements de terrain étaient possibles et achetés en toute connaissance de cause, à très bas prix, par des professionnels de l'immobilier. Par ailleurs, le code minier a prévu dans son article 75-1 qu'en cas de disparition de l'ancien exploitant minier ou d'insolvabilité de celui-ci, c'est l'État qui assure à sa place, et dans les mêmes conditions, la réparation des dégâts miniers. Cette subrogation de l'État est valable dans tous les cas : elle concerne tous les dommages miniers. Elle est conditionnée à la disparition effective de l'ancien exploitant ou à la preuve de son insolvabilité : tel n'est pas le cas de la société Lormines, filiale du groupe Arcelor, titulaire de la plus grande partie des concessions du bassin ferrifère lorrain, actuellement en liquidation amiable mais non en cessation de paiement et qui, au demeurant, était assurée au moment de la plupart des dégâts miniers importants survenus à la fin du siècle précédent dans le bassin minier lorrain. L'expérience, particulièrement dans le cas de l'affaissement minier de Roncourt, a toutefois montré la difficulté qu'il y avait pour obtenir une indemnisation effective et rapide des dommages miniers auprès de l'ancien exploitant minier et de ses assureurs ayant multiplié les recours devant les tribunaux. C'est pour cette raison que le code des assurances a été modifié une nouvelle fois le 30 juillet 2003 pour prévoir l'intervention du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAOD) qui procède à l'indemnisation immédiate des dommages aux biens immobiliers et se charge ensuite d'engager les procédures auprès du responsable. Le législateur a souhaité limiter cette possibilité d'intervention du Fonds de garantie aux seuls dégâts immobiliers des particuliers. Une telle limitation paraît justifiée : en effet, les particuliers doivent pouvoir compter sur la solidarité nationale pour obtenir une indemnisation très rapide, mais les collectivités locales ou les entreprises (en particulier les grandes entreprises exploitant des réseaux qui peuvent être significativement touchés par des sinistres miniers) disposent des moyens nécessaires pour obtenir réparation directement de la part du responsable, au besoin en faisant appel aux tribunaux compétents. Au demeurant, la complexité technique pour déterminer la réparation équitable dans de tels cas d'atteintes à des infrastructures est telle que le recours à des expertises judiciaires pourra difficilement être évité. L'intervention du FGAOD a également été limitée dans le temps aux dégâts postérieurs au 1er septembre 1998, ce qui a permis de prendre en compte tous les dégâts des sinistres importants de la fin de la décennie, sans pour autant ré-ouvrir les dossiers antérieurs, pour la très grande majorité déjà réglés, et dont l'expertise, plus de cinq ans après les faits, apparaissait pratiquement impossible. En tout état de cause, une modification de cette date n'est plus aujourd'hui possible compte tenu des principes de la prescription décennale rappelée ci-dessus. Parallèlement à ce dispositif d'indemnisation des dégâts miniers, le code minier prévoit également des mesures visant à prévenir les risques miniers. À la fin des concessions minières, l'État est chargé d'assurer la surveillance des anciens travaux miniers, de continuer à faire fonctionner les équipements nécessaires à la sécurité et au besoin de procéder à des travaux pour assurer la prévention du risque minier. Dans les cas où le coût des mesures de prévention excéderait la valeur des biens à protéger et, en cas de grave risque pour la sécurité, le code minier prévoit la possibilité, pour l'État, d'exproprier préventivement les habitations soumises à un tel risque. Les dispositions législatives applicables en la matière, en ce qui concerne l'indemnisation, sont celles du code de l'expropriation : il paraîtrait en effet difficile de fixer des règles différentes selon le type d'expropriation et de prévoir des conditions d'indemnisation plus favorables quand l'expropriation est motivée par un risque minier que dans tous les autres cas. Bien évidemment, dans des situations aussi traumatisantes que celles qu'ont connu près d'une centaine de familles qui ont dû être expropriées à Moutiers, en Meurthe-et-Moselle, il est tout à fait justifié qu'au-delà des règles d'expropriation de droit commun, l'État mène des actions de complément pour rendre cette expropriation moins pénible. C'est ainsi qu'a été mis en place un dispositif d'accompagnement social, ainsi que la construction sur la même commune, avec d'importantes subventions publiques, d'un lotissement destiné à accueillir les familles expropriées. Mais de telles actions d'accompagnement, pour nécessaires qu'elles soient, ne peuvent être formalisées par la loi. Toutes ces dispositions rassemblées dans le code minier peuvent apparaître complexes. Elles ont été ajustées au fil du temps pour apporter un très haut niveau de protection aux éventuelles victimes de dégâts miniers. Bien qu'inspirées essentiellement par les difficultés rencontrées en Lorraine, elles s'appliquent de manière identique sur l'ensemble des bassins miniers. Aller au-delà de ces dispositions déjà très protectrices et, étendre encore les droits à indemnisation ou les obligations de l'État, conduirait à remettre en cause des principes fondamentaux de notre droit, telle la prescription décennale ou encore le principe « pollueur-payeur » de valeur constitutionnelle depuis son inscription dans la charte de l'environnement. Au demeurant, même si des dégâts miniers restent possibles dans l'avenir, aucun sinistre minier d'importance n'a eu lieu depuis le début de ce siècle : en conséquence, aucune difficulté nouvelle réelle n'est apparue en la matière. Certes, il subsiste divers dossiers en cours à la suite de dégâts anciens où les conditions d'indemnisation n'ont pu être déterminées à l'amiable dans le cadre législatif précité et où il existe un contentieux entre les victimes et, soit l'ancien exploitant minier ou ses assureurs, soit l'État aujourd'hui responsable de l'indemnisation, soit encore le FGAOD. Ces contentieux portent notamment sur la juste indemnisation des « mises en pente ». L'impatience de certains devant la longueur et la complexité de ces procédures judiciaires est légitime, mais il est bien clair que le recours aux procédures judiciaires constitue un droit fondamental de chacun. L'État lui-même ne saurait, aux frais des contribuables, donner un accord systématique à toutes les demandes d'indemnisation, lorsqu'il apparaît que celles-ci sont injustifiées : ces différends doivent donc être réglés par les tribunaux compétents en la matière.

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