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Jacques Domergue
Question N° 60071 au Ministère de la Culture


Question soumise le 6 octobre 2009

M. Jacques Domergue attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur le risque de perte progressive de l'usage de la langue française ; en effet, lors de la création de l'agence internationale des énergies renouvelable en 2008, seule la langue anglaise fut admise. Il lui demande si ce n'est pas une régression dans le fonctionnement des institutions européennes.

Réponse émise le 19 avril 2011

Ainsi que l'indiquait le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer (MEEDDM) dans sa réponse du 22 décembre 2009, l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) est une agence dont le siège a été fixé à Abu Dhabi. La France a demandé et obtenu l'inclusion dans les statuts de l'agence d'une déclaration sur les versions authentiques desdits statuts faisant expressément référence aux langues officielles des Nations unies autres que l'anglais (c'est-à-dire le français, l'espagnol, l'arabe, le russe et le chinois), ainsi qu'à la langue du dépositaire, en l'occurrence l'allemand qui n'est pas une langue des Nations unies. Lors de la signature le 26 janvier 2009, à Bonn, des statuts de l'agence, le ministre d'État a fait valoir, en tant que chef de la délégation française, que l'existence d'une version française des statuts faisant foi conditionnait l'approbation par le Gouvernement français de l'accord. Depuis lors, l'Allemagne, État dépositaire, a diffusé en octobre 2009 à l'ensemble des 149 signataires des statuts, une version française à la mise au point de laquelle le MEEDDM et le ministère des affaires étrangères et européennes ont contribué, ainsi qu'une version espagnole et une version allemande. Dans sa note verbale du 6 octobre 2009, le dépositaire précise que ces versions seront réputées approuvées, sauf objection, à l'expiration d'un délai de trois mois. Étant donné que l'accord portant statuts relève de l'article 53 de la Constitution, son approbation a fait l'objet d'un projet de loi déposé le 5 janvier 2011 devant le Parlement par la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes. Par ailleurs, la France a demandé officiellement la révision du régime linguistique de l'agence lors de la réunion du comité administratif qui s'est tenue fin juin 2009 en Égypte, à Charm-el-Cheikh, à la veille de la deuxième session de la commission préparatoire (seul organe en exercice d'ici à l'entrée en vigueur des statuts). La délégation française a réitéré sa demande lors de la réunion du comité administratif organisée les 12 et 13 octobre 2009 à Abu Dhabi. Pour la réunion d'Abu Dhabi, les Émirats arabes unis ont eux-mêmes mis en place, à leurs frais, l'interprétation en français, en arabe et en espagnol. En dépit de ces efforts, la place effective laissée à la langue française risque d'être réduite dans le fonctionnement quotidien de cette organisation et dans la promotion de son action, comme en témoigne son site Internet presque exclusivement disponible en anglais. Cependant, on ne saurait inférer du régime linguistique de l'IRENA, qui n'est pas une agence européenne, la régression progressive de l'usage de la langue française dans le fonctionnement de l'Europe. S'il est vrai que l'usage du français comme langue de travail tend à diminuer régulièrement, par exemple dans les institutions de l'Union européenne (UE), comme en témoigne chaque année le « Rapport au Parlement sur l'emploi de la langue française » remis au Parlement par le ministère de la culture et de la communication, notre langue est protégée par son statut de langue officielle dans de nombreuses organisations européennes. Ce fait juridique essentiel n'est nullement remis en question. Le français est ainsi la seule langue de délibéré de la Cour de justice des communautés européennes. Il est également (avec l'anglais) l'une des deux langues officielles du Conseil de l'Europe : l'usage de ces deux langues reste dominant, malgré le contexte multilingue et multiculturel de cette organisation. Depuis 2006 ont été mis en place les groupes des ambassadeurs francophones (GAF), qui ont pour vocation le développement de la solidarité entre les États ayant le français en partage et la promotion de l'usage de notre langue, notamment dans les organisations internationales. Les GAF jouent donc le rôle de leviers politiques, avec une utilité indiscutable : il existe une corrélation entre le niveau de leur activité, l'emploi du français et la prise en compte des positions politiques francophones dans les enceintes multilatérales. De même, les visites à Bruxelles de M. Raffarin, représentant personnel du Président de la République pour la Francophonie, en janvier 2010, et de M. Abdou Diouf, secrétaire général de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF), en avril 2010, ont contribué à sensibiliser les institutions européennes à la francophonie. Plus généralement, la France a souhaité mettre à profit l'exercice de la présidence du Conseil de l'Union européenne (2e semestre 2008) pour mettre en valeur sa conception de la diversité culturelle et linguistique, en particulier lors des États généraux du multilinguisme du 26 septembre 2008. En effet, la promotion de notre langue en Europe et dans le monde sera d'autant plus efficace si notre pays inscrit ses actions dans une politique de solidarité des langues, de manière que l'utilisation dominante d'une langue n'entraîne pas la marginalisation de toutes les autres. La France a ainsi défendu le plurilinguisme dans le cadre de la réforme de la fonction publique communautaire : une troisième langue, en plus de la langue maternelle et d'une première langue étrangère, constitue désormais l'une des conditions de la promotion des futurs fonctionnaires communautaires. La préservation de la place de notre langue passe également par l'action des représentants français dans les enceintes de négociations. C'est en effet par une action quotidienne que la tendance au monolinguisme peut être ralentie. Un mémento sur « le français dans les institutions européennes » rappelle les règles qui garantissent aux fonctionnaires francophones l'usage de notre langue, dans différentes situations de communication. La vigilance sur la présence de ressortissants français, fonctionnaires européens ou experts nationaux détachés, dans l'ensemble des institutions contribue également au maintien de la place du français. La promotion du français en Europe représentant un enjeu décisif des efforts menés pour son emploi dans l'ensemble de la vie internationale, la France, associée à la Communauté française de Belgique et au Luxembourg, a engagé en 2002 le Plan pluriannuel d'action pour le français dans l'Union européenne. Le pilotage de ce plan est désormais assuré par l'OIF. Au total, ce sont un peu plus de 12 000 personnalités gouvernementales, diplomates, fonctionnaires, journalistes accrédités qui auront été concernés, pour des périodes généralement longues d'exposition à la langue française. Ainsi, à la lumière de ces divers exemples, on peut constater qu'un très grand nombre d'actions concrètes sont engagées en parallèle par divers départements ministériels en faveur de la promotion de notre langue. On peut ajouter à ces données le constat que le nombre de francophones ne cesse d'augmenter dans le monde et que le français est, avec l'anglais, la langue la plus diffusée dans les systèmes éducatifs nationaux. L'importance d'une langue ne peut au demeurant s'évaluer au simple nombre de ses locuteurs : de ce point de vue, la France cherche à mener une stratégie d'influence et de solidarité, qui est sans doute le moyen le plus efficace de faire prévaloir non seulement sa langue, mais plus généralement ses intérêts dans le monde.

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