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François Deluga
Question N° 59846 au Ministère de l'Écologie


Question soumise le 6 octobre 2009

M. François Deluga attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les inquiétudes de l'industrie de la terre cuite quant au champ d'application de l'attribution gracieuse des quotas de CO2. Votée par le Parlement européen et adoptée par le Conseil européen en décembre 2008, la directive européenne « emission trading system », dite « quotas de CO2 », introduit, à compter de 2013, la mise aux enchères des autorisations d'émission de CO2, qui étaient jusqu'à présent allouées gratuitement aux industries émettrices dans le cadre des engagements européens de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les représentants de certaines industries lourdes, telles le ciment, la chimie ou le verre, ayant fait part en amont des risques de délocalisation en cas de durcissement du système d'échanges institué en 2005, les dirigeants européens ont décidé que les secteurs exposés à un risque significatif de « fuite de carbone » se verront octroyer gratuitement jusqu'à 100 % de leurs crédits de CO2. La Commission européenne a été chargée de préparer la liste des secteurs industriels concernés. Or il s'avère que cette mesure toucherait 90 % des émetteurs industriels, les plus pollueurs, et donc que les industries faiblement émettrices, composées le plus souvent par des petites et moyennes entreprises, seraient seules à supporter un fort surcoût. Tel est le cas de l'industrie de la terre cuite, qui représente seulement moins de 1 % des émissions industrielles de CO2 et s'attache à améliorer ses performances lors de l'élaboration des tuiles et briques, produits eux-mêmes à la pointe dans la construction de bâtiments de basse consommation d'énergie. Déjà fragilisée par la crise économique et le ralentissement de l'activité de construction, celle-ci pourrait être fatalement pénalisée par cette mesure, empreinte d'un paradoxe évident et prise à l'encontre de toute justice écologique. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures envisagées par l'État pour remédier à cette situation inique et, le cas échéant, intégrer l'industrie de la terre cuite dans la liste des secteurs industriels bénéficiaires de quotas d'émission de CO2 gratuits.

Réponse émise le 10 août 2010

La directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003, établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil, prévoit qu'en 2013 et chaque année suivante jusqu'en 2020 les installations des secteurs ou sous-secteurs soumises à quotas recevront les allocations à titre gratuit sur la base des règles d'étalonnage communautaires (souvent appelées « benchmarks »). Ces règles, en cours de définition, se fonderont sur la base de la performance moyenne qui pourra être définie à partir des 10 % d'installations les plus efficaces d'un secteur ou sous-secteur de la Communauté pendant les années 2007-2008. L'effet concret de la liste des secteurs exposés à un risque significatif de fuite de carbone sera que, pour les secteurs mentionnés sur la liste, l'allocation de quotas à titre gratuit sera fondée sur 100 % du benchmark. Pour les secteurs non exposés, cette allocation sera 80 % du benchmark en 2013, et réduite chaque année pour atteindre 30 % du benchmark en 2020. La liste des secteurs est déterminée suite à une analyse de critères quantitatifs complétée, notamment en cas de proximité aux seuils définis par la directive, par une analyse qualitative. Cette liste peut évoluer dans le temps puisque la directive prévoit qu'au plus tard le 31 décembre 2009 et tous les cinq ans par la suite la Commission détermine, après un échange de vues au sein du Conseil, les secteurs ou sous-secteurs concernés par le risque de fuites de carbone. Chaque année, la Commission peut, de sa propre initiative ou à la demande d'un État membre, ajouter à la liste un secteur ou un sous-secteur dont il peut être démontré, dans un rapport analytique, qu'il réunit les critères définis à la suite d'une évolution qui a eu une incidence notable sur ses activités. Le travail de préparation de la liste des secteurs exposés par les services de la Commission européenne a été mené de mi 2008 juin 2009, avec des échanges réguliers avec les parties prenantes, industriels et États membres. La France, conformément aux engagements pris sous sa présidence au second semestre 2008, lors des discussions sur le paquet énergie-climat, a été et reste particulièrement vigilante à ce que la liste des secteurs n'introduise pas de distorsion de concurrence entre les activités économiques. Elle a régulièrement interpellé la Commission pour obtenir des éclaircissements méthodologiques. Le secteur des tuiles et briques a la caractéristique de ne pas remplir les critères quantitatifs définis par la directive avec les choix méthodologiques de la Commission européenne et de ne pas remplir également les critères de l'analyse qualitative menée sur certains secteurs tangents. Cette situation a été identifiée par les autorités françaises et a fait l'objet de plusieurs remarques à la Commission en 2009. C'est dans cet esprit de participation active que la France a abordé le vote du comité du changement climatique du 18 septembre 2009, l'instance technique de décision de la directive 2003/87/CE. Dans le débat précédant le vote, les autorités françaises ont vivement exprimé leur désaccord sur plusieurs points. La première réserve de la France portait sur le refus de la Commission d'inclure certains secteurs dans le projet de décision et, au premier rang, celui des tuiles et briques alors que la méthodologie reste discutable, eu égard aux biais statistiques introduits par la version de la nomenclature des activités de la Communauté européenne (NACE) utilisée. La Commission, après avoir entendu l'ensemble des États membres, a décidé de procéder à une modification du projet de décision, en incluant explicitement dans un considérant de la décision la nécessité d'examiner à nouveau la situation de certains secteurs prochainement, en particulier celle des tuiles et briques. Par cette disposition, la Commission reconnaît la spécificité de ce secteur et s'engage à la prendre en compte dans les compléments d'analyse qu'elle conduira courant 2010. La Commission ayant satisfait à cette exigence exprimée par la France et portée par plusieurs États membres, la France a voté en faveur du projet de décision, ce qui a conduit à son adoption. La décision établissant, conformément à la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil, la liste des secteurs et sous-secteurs considérés comme exposés à un risque important de fuite de carbone a été adoptée le 24 décembre 2009. Les secteurs entrant dans le champ du considérant 16 de la décision CE du 24 décembre 2009 seront réévalués cette année à l'aune de l'article 10 bis, paragraphe 13 de la directive et, éventuellement, ajoutés à la liste. En particulier le secteur des tuiles et briques, expressément cité dans ce considérant, a initié une étude européenne devant permettre d'apporter à la Commission européenne des données objectives complémentaires dans l'optique de voir sa situation réévaluée. La France suit activement ce dossier et diffusera officiellement à la Commission l'étude du secteur des tuiles et briques dès son achèvement, conformément à la directive 2003/87/CE.

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