M. Jean-Claude Fruteau attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de l'outre-mer sur l'avis rendu le 08 septembre dernier par l'Autorité de la concurrence et relatif aux mécanismes d'importation et de commercialisation des produits de grande consommation dans les départements d'outre-mer (DOM). Bien que les caractéristiques structurelles des marchés des DOM présentent des spécificités particulières (éloignement, insularité, petite taille des marchés, octroi de mer...), l'Autorité de la concurrence constate néanmoins que ces particularités ne « suffisent pas à expliquer l'importance des écarts de prix constatés entre la métropole et les DOM ». Ainsi, selon les relevés effectués sur un échantillon d'environ 75 produits importés de métropole dans les quatre DOM, les écarts de prix en magasin avec la métropole dépassent 55 % pour plus de 50 % des produits échantillonnés. L'Autorité constate que le secteur de la grande distribution à dominante alimentaire dans les DOM est trop peu concurrentiel, car protégé par des barrières à l'entrée spécifiques (longueur des circuits logistiques vers les territoires ultramarins, rareté et prix élevé du foncier commercial). Ce faible niveau de la concurrence provoque une « concentration élevée, certains groupes détenant des parts de marché en surfaces commerciales supérieures à 40 %, soit sur la totalité du département concerné, soit sur une ou plusieurs zones de chalandise ». Il indique que, lors de l'examen du projet de loi relatif à la modernisation de l'économie, il avait déposé un amendement pour que l'article L. 752-10 du code du commerce (qui limitait les concentrations commerciales) ne soit pas supprimé. Le Gouvernement et la majorité parlementaire avaient alors rejeté cette initiative prétextant que rien ne démontrait qu'une concentration trop élevée serait nuisible à la concurrence. Au cours des débats relatifs à la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM), il avait tenté à nouveau de réintroduire cette disposition dans la loi, sans succès. Or, aujourd'hui, force est de constater que l'Autorité de la concurrence dénonce vivement ce phénomène de concentration nuisible à la baisse durable des prix. Fort de ce constat, il lui demande si elle entend rétablir les limitations des concentrations commerciales dans les DOM, afin de lutter contre les effets pervers que génèrent les monopoles constitués dans ce secteur d'activité.
Les difficultés soulevées par l'honorable parlementaire ont amené le Gouvernement à prendre plusieurs mesures en vue de renforcer la concurrence dans les départements d'outre-mer. Le comité interministériel de l'outre-mer de novembre 2009 a inséré plusieurs mesures en ce sens dans le cadre de son atelier I « formation des prix, fonctionnement du marché et concurrence ». Ainsi, le droit de la concurrence va être renforcé outre-mer pour lutter contre les phénomènes de monopole et d'oligopole. Le seuil de notification des opérations de concentration dans le secteur de la distribution de détail outre-mer (art. L. 430-2 du code de commerce) est ainsi abaissé pour pouvoir contrôler des opérations de fusion jusqu'à des niveaux sensiblement inférieurs à ceux qui déclenchent le contrôle en métropole. Le projet de loi relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services, actuellement en discussion au Parlement, intègre ce dispositif. Il ouvre également aux présidents des observatoires des prix et des revenus de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de La Réunion, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon la possibilité de saisir l'Autorité de la concurrence de questions concernant les intérêts dont ils ont la charge. Le Gouvernement a ainsi entendu suivre très précisément les recommandations de l'Autorité de la concurrence. Cette démarche de lutte contre les concentrations abusives en outre-mer correspond bien à la prise en compte d'une réalité économique différente de celle de la métropole. L'étroitesse des marchés insulaires, l'absence ou l'insuffisance de la production locale, tout autant que l'éloignement par rapport aux circuits de distribution à l'échelle internationale contribuent à créer une situation de grande fragilité de l'équilibre concurrentiel. La création de groupes d'intervention régionale-concurrence constitue de ce point de vue une réponse, sur les plans juridique et opérationnel, et devrait conduire à un suivi efficace et rigoureux des règles de bonne concurrence dans les DOM.
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