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Jean-Marc Roubaud
Question N° 58095 au Ministère de la Santé


Question soumise le 8 septembre 2009

M. Jean-Marc Roubaud attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur une technique récemment mise au point à l'hôpital Bichat de Paris pour répondre en urgence aux accidents vasculaires cérébraux (AVC), qui sont la 3e cause de mortalité en France. Cette nouvelle technique combine deux traitements utilisés actuellement en cas d'AVC par occlusion d'une artère cérébrale. Le premier, le plus courant, consiste en une injection intra-veineuse, au pli du coude, du médicament actilyse (molécule alteplase) qui permet de guérir le patient dans 40 % des cas, si l'injection est commencée moins de trois heures après les premiers symptômes. Le second traitement consiste à délivrer le même médicament directement au contact du caillot qui bouche l'artère, en y passant un micro-cathéter. En conséquence, il lui demande de lui faire connaître si cette technique, qui pourrait donner jusqu'à 93 % de guérison, sera développée auprès d'autres hôpitaux.

Réponse émise le 12 janvier 2010

Au sein des différentes thérapeutiques de l'accident vasculaire cérébral (AVC), figurent celles de la phase aigüe et, parmi elles, la thrombolyse. Une étude réalisée dans le service du professeur Pierre Amarenco, a été publiée en septembre 2009 dans la revue The Lancet-Neurology, avec un certain écho dans la presse nationale. Cette étude compare deux traitements fibrinolytiques de l'AVC. Ses résultats nécessitent une analyse de leur éventuel impact sur l'organisation des soins et une mise en perspective avec les propositions du comité de pilotage national, sur la prévention et la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux en France, dont le rapport a été présenté le 9 octobre 2009, à Poitiers. L'étude conduite à Bichat repose sur un registre de patients ayant présenté un infarctus cérébral traité dans les trois heures par fibrinolyse. Les patients hospitalisés avant avril 2007 étaient traités par fibrinolyse « classique » par voie intraveineuse telle qu'il s'en réalise environ 2000 par an en France et, à partir d'avril 2007, par une double approche thrombolytique par voie intraveineuse doublée d'une voie artérielle (c'est-à-dire injection au contact du caillot) ; cet accès permet aussi une embolectomie immédiate, c'est-à-dire l'extraction du caillot par un système mécanique lorsque le vaisseau n'est pas recanalisé par le médicament seul. Les résultats publiés montrent une meilleure réouverture du vaisseau dans le groupe des 53 patients traités par la double approche, avec une sécurité identique en termes de mortalité et d'hémorragie intracrânienne. Toutefois, s'il existe aussi une amélioration neurologique précoce, il n'existe pas de différence à trois mois sur l'état fonctionnel des patients. Cette étude appelle plusieurs commentaires. Elle présente des limites méthodologiques, discutées par les auteurs de l'article. La méthode utilisée apparaît très prometteuse. Car elle associe la rapidité de mise en route du traitement par voie intraveineuse, à la plus grande efficacité de la voie intra-artérielle. Mais, si elle est associée à un meilleur taux de recanalisation de l'artère occluse, il n'y a pas d'amélioration significative de l'état clinique des patients. Cette étude ouvre une voie importante, qu'il est nécessaire de confirmer par des études multicentriques prospectives et comparatives, avec un nombre approprié de patients, qui sont d'ailleurs en cours. La fibrinolyse intra-artérielle, pratiquée en France et dans le monde depuis plusieurs années, nécessite une compétence et un environnement neuroradiologiques spécialisés, actuellement présents quasi exclusivement dans les CHU ; il s'agit d'une utilisation du médicament, qui relève toujours du domaine de la recherche et s'effectue en dehors de son cadre réglementaire d'autorisation de mise sur le marché (AMM). Les travaux du comité de pilotage, sur la prévention et la prise en charge des AVC, ont mis en évidence qu'environ 1 % des patients présentant un AVC bénéficient aujourd'hui d'une thrombolyse intraveineuse, proportion qu'il est souhaitable et possible d'augmenter considérablement, même si elle n'est destinée qu'aux AVC ischémiques, qui représentent 80 % des AVC. La société française neurovasculaire, société savante des neurologues spécialisés dans la prise en charge des AVC, considère qu'une fraction seulement des patients éligibles à la thrombolyse relèveraient de la voie combinée intra-artérielle et intraveineuse. Ce traitement n'est pas, en l'état actuel de la science, un traitement de masse. Ces résultats s'intègrent parfaitement dans les recommandations du comité de pilotage, qui préconise une forte impulsion de la recherche, fondamentale et clinique, qui permettrait aux équipes de mettre en place et/ou de participer fortement à des études internationales de haut niveau sur le sujet. Le comité recommande par ailleurs une organisation des soins régionale et graduée, qui place les centres de référence régionaux (intégrant la neuroradiologie) en relation étroite avec les filières territoriales AVC de la région. Ce qui permettra ainsi un accès des patients AVC aux soins de recours neuroradiologiques et neurochirurgicaux dans leurs indications validées, mais aussi pour l'avenir une impulsion des travaux de recherche en coopération avec les établissements des filières territoriales, le transfert des résultats de cette recherche dans les soins, et l'évolution des organisations sans doute nécessaire. L'un des objectifs principaux proposé par le comité de pilotage, qui sera traduit dans le plan d'actions national AVC 2010-2014 en cours d'élaboration, est de réduire le délai entre la survenue d'un AVC et la prise en charge hospitalière ; si le taux de patients pris en charge dans les délais compatibles avec une thrombolyse est d'environ 50 %, il est en effet inchangé depuis neuf ans. Il convient d'axer les efforts sur l'accès des patients victimes d'AVC aux soins pour lesquels les preuves scientifiques sont établies (réduction des délais de prise en charge, amélioration de l'accessibilité à l'IRM, aux unités neurovasculaires et à la thrombolyse intraveineuse), parallèlement à un soutien à la recherche permettant de mettre en place les études ambitieuses nécessaires à l'évolution des traitements.

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