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Patrice Verchère
Question N° 57695 au Ministère des Affaires étrangères


Question soumise le 1er septembre 2009

M. Patrice Verchère attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur le risque d'une crise européenne du gaz d'ici à l'hiver prochain. En effet, le commissaire européen à l'énergie a averti récemment de la possibilité d'un tel évènement. L'Ukraine est encore aujourd'hui en difficulté de paiement, et fait transiter 80 % du gaz russe à destination de l'Union européenne. Sachant que le gaz russe représente 5 % de l'approvisionnement énergétique total de l'UE, ce qui reste très important, et qu'une réunion est prévue avec des représentants des pays européens sur la question, il voudrait savoir quelle est sa position sur le sujet, et quelles sont les mesures structurelles qu'il peut proposer pour éviter ces crises à répétition.

Réponse émise le 6 octobre 2009

L'Ukraine éprouve, chaque mois, depuis l'accord entre Moscou et Kiev, en janvier 2009, des difficultés à régler sa facture gazière due mensuellement. Ce problème de liquidités trouve notamment sa source dans la baisse de la consommation de gaz de l'UE (près de 40 %) : cette baisse se traduit par un problème de trésorerie pour Gazprom, mais aussi pour l'Ukraine qui voit diminuer d'autant ses recettes de transit. L'Ukraine s'est jusqu'ici adressée aux banques commerciales russes, et ce n'est que la veille de l'échéance de juin que celles-ci ont refusé un nouveau prêt. Les contrats, signés fin janvier entre Gazprom et l'entreprise nationale ukrainienne Naftogaz prévoient la livraison de 40 milliards de m³ de gaz russe à l'Ukraine en 2009. Fortement touchée par la crise économique, l'Ukraine a depuis lors annoncé qu'elle n'aurait besoin que de 33 milliards de m³ de gaz russe cette année. Gazprom a accepté de renoncer aux pénalités encourues. La Russie multiplie cependant les alertes, auprès de l'UE, sur l'incapacité de Naftogaz à financer le gaz nécessaire au remplissage des stocks ukrainiens qui, selon elle, ferait planer la menace d'une nouvelle crise gazière. La quantité de gaz stockée par l'Ukraine est néanmoins difficile à évaluer. La Russie a proposé la constitution d'un « pool » international de financeurs, afin d'examiner la possibilité d'un prêt à l'Ukraine pour ses achats de gaz. La Russie indique être disponible pour étudier sa participation, mais souhaite que les institutions financières européennes en prennent l'initiative. Elle a adressé un courrier dans ce sens à la Commission européenne. La Commission a jugé difficile, vu l'état actuel du budget de l'UE, d'accorder de nouveaux fonds européens à l'Ukraine. L'UE s'efforce toutefois de trouver une solution aux difficultés actuellement rencontrées par Naftogaz et l'Ukraine afin de se prémunir contre toute nouvelle rupture d'approvisionnement en gaz russe. Une conférence s'est déroulée, le 23 mars 2009, à Bruxelles sur la réhabilitation du réseau de gazoduc ukrainien. Les principaux enseignements de cette conférence sont : la réaffirmation de l'importance de la coopération UE-Ukraine dans le domaine énergétique, s'inscrivant dans le cadre du rapprochement de l'Ukraine avec l'UE (négociations de l'accord d'association, Partenariat oriental, processus d'adhésion de l'Ukraine à la communauté de l'énergie) ; la volonté de l'UE de contribuer à la modernisation du réseau de transit gazier ukrainien, sous condition de la mise en oeuvre par la partie ukrainienne d'un plan de réforme structurelle du secteur (accès des tiers au réseau, investissements décidés par un régulateur indépendant et unbundling légal, comptable et de management mais pas nécessairement de propriété, du gestionnaire de réseau de transport gaz) ; un engagement du Premier ministre et du président ukrainiens de mettre en oeuvre les réformes et d'adhérer à la Communauté de l'énergie en 2009, qui suppose la reprise de l'acquis communautaire d'ici 2012. Suite à une nouvelle réunion à Bruxelles, le 29 juin 2009, les institutions financières internationales (Fonds monétaire international, Banque mondiale, Banque européenne pour la reconstruction et le développement avec, dans une certaine mesure, la Banque européenne d'investissements) ont admis consentir une aide financière à l'Ukraine, dont les détails n'avaient pas été alors précisés. Deux contraintes existent cependant : mettre en place un tel dispositif ne serait pas possible avant octobre-novembre - les montants ne pourraient pas être de l'ordre de ceux demandés par l'Ukraine (4 à 5 milliards de dollars). Selon l'analyse russe, 2 à 3 milliards de dollars suffiraient à l'Ukraine pour remplir ses stockages. Le « package » ne pourrait qu'être inférieur à 2 milliards. Par ailleurs, la Russie a assuré s'être acquittée des droits de transits, jusqu'en 2010, pour un montant de 2 milliards de dollars. En outre, les institutions financières internationales ont dressé une liste des conditionnalités (réformes) auxquelles devrait s'engager l'Ukraine en contrepartie de ce soutien. Un engagement formel du président de la République, du Premier ministre ukrainiens et des autorités régionales concernées devrait notamment être pris. Le déblocage de la troisième tranche du FMI a permis à Naftogaz de payer sa facture de gaz du mois d'août ainsi que celle de septembre 2009. Un deuxième paquet d'assistance (Banque mondiale et Banque européenne pour la reconstruction et le développement) doit intervenir en octobre-novembre pour une solution de financement à plus long terme. Une aide macro-financière (2 milliards de dollars) à l'automne est également prévue par l'UE. Par ailleurs, la Commission et les États membres de l'UE, suite à la crise de janvier 2009, ont déterminé une série d'actions et de mesures envisageables à moyen-long terme pour assurer une meilleure circulation du gaz entre États membres et une résilience face aux interruptions d'approvisionnement. Ainsi, les principales idées portées par la France lors de la dernière crise, puis à l'occasion des discussions préliminaires sur le futur texte du règlement « Sécurité d'approvisionnement en gaz » ont été prises en compte, en particulier : la nécessité de concilier solidarité et responsabilité. La définition de standards de sécurité d'approvisionnement harmonisés entre les États membres devrait permettre un meilleur partage de l'effort de sécurité d'approvisionnement ; l'absence de « solution miracle » : il existe au contraire un éventail d'outils efficaces pour renforcer la sécurité d'approvisionnement en gaz (flexibilité d'importation, GNL, réduction de la demande, stocks) dont le choix doit rester du ressort de chaque État ; une approche fondée sur l'analyse des risques, et l'élaboration d'un plan d'action préventive tenant compte des risques identifiés ; le principe de coopérations régionales, au niveau des États et des entreprises, dont l'intérêt a été mis en évidence par la crise de janvier 2009. Une telle coopération se met ainsi par exemple en place entre la Grèce et la Bulgarie, qui fut très touchée par la crise de janvier, avec la construction d'une interconnexion gazière entre les deux pays ; le renforcement qualitatif des plans d'urgence déjà prévus par la précédente directive, mais qui se sont révélés peu efficaces en janvier : évaluations par les pairs, identification de mesures pouvant être mobilisées en cas de crise ; la prévention des crises et leur résolution, à travers la création d'une équipe permanente d'experts indépendants.

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