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François Brottes
Question N° 56602 au Ministère de l'Écologie


Question soumise le 4 août 2009

M. François Brottes attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les conséquences de l'inclusion des biocarburants d'origine végétale dans le portefeuille énergétique des pays développés, dont la France. Il s'interroge en particulier sur la pertinence de consacrer des terres arables à la production de carburants, alors qu'on sait que les 252 kilos de maïs nécessaires à la production d'un seul plein d'agroéthanol suffiraient à nourrir un enfant pendant un an, et ce à l'heure ou un sixième des habitants de la planète souffre de malnutrition. Cette dimension sociale ne semble pas couverte par l'article 18 de la loi de mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, qui prévoit de subordonner la production des biocarburants « à l'obligation de mener des expertises exhaustives et contradictoires sur leur bilan écologique et énergétique comprenant en particulier leurs effets sur les sols et la ressource en eau ». Alors que l'on peut d'ores et déjà subodorer cet effet, la production d'agrocarburants recourant à des techniques culturales intensives, fortement consommatrices d'eau mais aussi d'engrais et pesticides (produits dérivés du pétrole, qu'ils sont paradoxalement censés contribuer à remplacer), avec un impact connu sur la qualité des sols et des eaux, qu'en est-il du bilan social de productions se faisant au détriment de cultures alimentaires dont le besoin n'a jamais été aussi criant ? Qu'en est-il du pillage organisé et légalisé des terres arables de la planète ? Les exemples se multiplient : en 2008, à Madagascar, GEM biofuels et Daewoo ont obtenu des droits de 50 à 99 ans sur un total de 1 750 000 hectares, soit plus de la moitié des terres arables du pays. La forêt amazonienne du Brésil et les forêts primaires d'Indonésie et Malaisie sont massivement détruites pour les cultures pour les carburants et la plantation de palmiers à huile pour l'approvisionnement du marché européen du biodiesel. Face à de tels enjeux commerciaux, comment les propriétaires peuvent-ils faire valoir équitablement leurs droits et s'opposer à la mainmise de multinationales sur leur sol, obérant ainsi leur capacité à assurer leur propre autosubsistance alimentaire ? Il lui demande, en conséquence, les mesures qu'il entend prendre pour qu'au niveau national, comme international, l'expertise écologique et énergétique des biocarburants intègre bien les aspects sociaux globaux, partie intégrante du développement durable, et que la satisfaction des besoins énergétiques des populations les plus riches ne conduise pas à l'affamement des populations les plus démunies de la planète.

Réponse émise le 8 décembre 2009

La France s'est engagée dans un programme ambitieux de développement des biocarburants et met en oeuvre une série de mesures permettant d'encourager leur production et leur mise sur le marché. Ainsi, l'objectif d'incorporation de 5,75 % de biocarburants dans les carburants, initialement prévu pour 2010 par la directive 2003/30/CE, a été avancé à 2008 et porté à sept en 2010 (en équivalence énergétique). Afin de permettre l'atteinte de cet objectif dans la filière « essence » à l'horizon 2010, le Gouvernement a lancé deux nouveaux carburants : le superéthanol E85 qui peut contenir jusqu'à 85 % d'éthanol. Il est destiné aux véhicules à carburant modulable (également appelés « flex fuel »). Depuis son lancement, le superéthanol bénéficie d'une fiscalité avantageuse, qui permet actuellement d'offrir au consommateur un prix de vente à la pompe d'environ 0,85 EUR/l, ainsi que de diverses mesures fiscales d'accompagnement (comme la réduction de la taxe sur les véhicules de sociétés pendant huit trimestres et l'exonération de 50 % de la taxe additionnelle aux certificats d'immatriculation). Entre 2006 et le mois d'août 2009, 8 770 voitures flexfuels se sont vendues en France. Il existe actuellement 313 stations-services qui distribuent du E85 ; le SP95-E10 qui peut contenir jusqu'à 10 % d'éthanol. Ce dernier carburant n'est pas compatible avec tous les véhicules du parc roulant en France. La décision du directeur de l'énergie du 3 mars 2009 fixe la liste des engins à moteur essence compatibles avec ce carburant. Le 9 octobre 2008, le Président de la République a rappelé le soutien de l'objectif européen de 20 % d'énergies renouvelables de la consommation totale à l'horizon 2020, dont 10 % dans le secteur des transports, conformément à la directive EnR. De plus, les objectifs de cette directive sont accompagnés d'exigences relatives à la durabilité des biocarburants. En la matière, une étude de l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), disponible dans les prochains jours, portera sur les bilans énergétiques et environnementaux des biocarburants de première génération pour les filières utilisées en France. Par ailleurs, le Gouvernement souhaite promouvoir le développement des biocarburants de deuxième génération, plus pertinents face aux défis environnementaux et énergétiques. À ce titre, l'État va soutenir des projets pilotes de production de biocarburants de deuxième génération qui ont vocation à devenir des références en Europe et dans le monde en matière de chimie verte et de biocarburants du futur, et qui permettront d'éviter la concurrence avec les productions à des fins alimentaires. S'agissant des importations extracommunautaires de biocarburants, elles sont limitées par les droits de douane sur l'éthanol, appliqués par l'Union européenne. De plus, tous les biocarburants consommés en Europe, de production communautaire ou extracommunautaire, devront respecter des critères de durabilité conformément à la directive 2009/28/CE relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables. L'article 16 de loi n° 2008-1425 de finances pour 2009 du 27 décembre 2008 prévoit effectivement une diminution de la défiscalisation accordée aux biocarburants produits dans des unités de production agréées. Cette défiscalisation, toutefois, maintient un avantage concurrentiel non-négligeable pour les biocarburants issus des unités de productions bénéficiant d'un agrément, comparativement aux biocarburants produits ailleurs, tout en allégeant sa charge sur les finances publiques. De plus, les biocarburants conservent, grâce à la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), un avantage fiscal incontestable sur leurs équivalents fossiles.

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