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Bernard Brochand
Question N° 55223 au Ministère de l'Industrie


Question soumise le 14 juillet 2009

M. Bernard Brochand attire l'attention de M. le ministre chargé de l'industrie sur l'inquiétude des éditeurs français face au poids croissant du moteur de recherche Google dans le secteur de la publicité et de la presse en ligne. En effet, il a été relevé, lors des états généraux de la presse, réunis à l'initiative du Président de la République, que le moteur de recherche Google captait désormais 90 % de la valeur de la publicité à ciblage contextuel, érigeant ainsi une position plus que dominante sur ce marché. De nombreux opérateurs de services en ligne ont ainsi estimé que Google était devenu "trop puissant" désormais, et constituait une "gêne" sur le marché publicitaire en imposant chaque jour davantage ses conditions. La position dominante de Google dans ce nouveau marché inquiète donc à juste titre les acteurs français de l'Internet, et en particulier les médias traditionnels présents sur Internet, et dont les revenus dépendent déjà significativement de Google. En outre, l'accord conclu entre Google, les éditeurs américains et la guilde des auteurs, relatif à la numérisation des livres par Google, fait aussi craindre à beaucoup qu'une grande partie des ressources de l'économie numérique ne devienne liée aux différents services de cette seule entreprise. Ces interrogations ne concernent d'ailleurs pas uniquement les éditeurs français, mais la plupart des éditeurs des pays européens, qui ont ainsi demandé à la Commission européenne d'ouvrir une enquête sur les implications économiques du projet de recherche sur les livres de Google, afin qu'il ne nuise pas à l'industrie européenne de l'édition. Le département de la justice aux États-unis a, de son côté, entamé une procédure sur d'éventuelles pratiques anti-concurrentielles. Il souhaiterait, par conséquent, savoir si le Gouvernement envisagerait de charger ses services de l'étude de cette question cruciale pour les éditeurs français, attachés au droit d'auteur et au principe d'une concurrence libre et non faussée, voire de saisir les autorités de la concurrence de ces questions.

Réponse émise le 19 janvier 2010

Les pouvoirs publics sont particulièrement attentifs aux évolutions en cours du marché de la publicité et aux préoccupations qu'elles peuvent susciter chez les éditeurs de presse, la part du vecteur Internet sur ce marché, encore limitée, ayant en particulier vocation à s'accroître dans les années qui viennent. Les moteurs de recherche captent une part importante de la publicité en ligne, en particulier Google qui est très largement en tête sur le marché de la recherche d'informations sur Internet, en Europe et en France. Les autorités de la concurrence veillent à ce que le fonctionnement des marchés concernés par l'activité de ces opérateurs ne soit pas affecté par d'éventuels abus de position dominante ou de pratiques concertées anticoncurrentielles. Les corps de contrôle de l'État veillent en particulier à ce que le développement des activités des moteurs de recherche, comme le référencement dit naturel ou encore le référencement commercial (liens sur des mots recherchés et liens contextuels figurant sur les sites Internet), se fasse dans le respect des règles de concurrence et des règles de protection économique des consommateurs. Ainsi une enquête de la direction générale de la concurrence, de la consommation, et de la répression des fraudes réalisée au quatrième trimestre 2008 a-t-elle conduit à établir treize notifications d'information réglementaire sur des aspects relatifs à la transparence des relations contractuelles (titre IV du livre IV du code de commerce). Il va de soi que la vigilance sera maintenue et que des mesures appropriées seraient prises dans l'hypothèse où des manquements aux règles en vigueur seraient constatés. Afin de permettre au secteur de la presse d'optimiser son positionnement par rapport à ces évolutions et, de façon générale, de surmonter la crise qu'il traverse, plusieurs mesures ont été annoncées par le Président de la République le 23 janvier 2009 à l'issue des États généraux de la presse écrite. Les mesures arrêtées représentent un plan exceptionnel d'aide à la presse écrite évalué à 200 MEUR par an, sur une période de trois ans. Déjà 150,7 MEUR ont été inscrits dans le cadre de la loi de finances rectificative du 20 avril 2009 (publiée au Journal officiel n° 0094 du 22 avril 2009). Cet effort budgétaire, sans précédent pour la presse, devrait être reconduit pour les années 2010 et 2011. Ces dispositions sont de nature à donner aux entreprises des moyens pour s'adapter aux mutations en cours et à la presse en ligne pour se développer et trouver son modèle économique. Dans le domaine du livre numérique, les pouvoirs publics souhaitent encourager l'émergence d'une offre abondante, diversifiée et de qualité, constituée à la fois d'ouvrages libres de droits et d'ouvrages sous droits. Ils veilleront à ce que le développement de cette offre puisse se faire dans le respect des règles de concurrence et que les initiatives prises dans ce secteur innovant soient fondées sur un modèle économique respectueux du droit d'auteur tel que le définit le code de la propriété intellectuelle. À cet égard, le ministère de la culture et de la communication a lancé en septembre 2009 une étude sur les modèles économiques du livre numérique et ses perspectives de développement. De façon générale, les ministères chargés du suivi de ce secteur sont très attentifs aux développements du programme de numérisation d'ouvrages engagé par Google depuis 2004, en particulier au regard de la protection du droit d'auteur tel que le définit le code de la propriété intellectuelle et du droit de la concurrence : la progression d'un opérateur sur le marché doit se faire dans le respect des règles de concurrence. Les autorités de concurrence nationales et communautaires sont vigilantes à cet égard. L'État français a ainsi déposé des observations devant le tribunal de New York en septembre dernier sur le projet de règlement conclu entre Google, les éditeurs américains et la Guilde des auteurs dans le cadre du contentieux qui les opposait sur l'exploitation des oeuvres numérisées, afin de prévenir les effets négatifs de son éventuelle validation pour les détenteurs de droits européens. Ces observations mettent l'accent sur les difficultés soulevées par ce projet au regard du droit de la propriété intellectuelle et du droit de la concurrence et sur la menace qu'il fait peser sur la diversité culturelle. Depuis, un nouveau projet de règlement a été déposé par les parties à la suite notamment des objections émises par le ministère américain de la justice. Ce nouveau projet, dont le champ a été modifié pour ne couvrir que les ouvrages disposant d'un copyright enregistré aux États-Unis et ceux publiés au Canada, au Royaume-Uni ou en Australie, fait l'objet d'un examen attentif. Enfin, en vue d'élaborer une réponse européenne aux défis de la numérisation des livres, la Commission européenne a lancé une vaste consultation auprès des éditeurs, des auteurs et des consommateurs des différents pays membres. Ceux-ci ont été invités à exprimer leur point de vue notamment sur l'incidence que pourrait avoir le projet de Google sur la notion de droit d'auteur et sur le marché du livre en Europe.

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