M. Bernard Roman demande à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de bien vouloir lui confirmer que, en matière de dégradation du domaine public appartenant à un établissement public de coopération intercommunale non pourvu de pouvoirs de police, celui-ci peut émettre un titre de recette à l'encontre d'un tiers responsable, en application de l'instruction codificatrice relative au recouvrement des recettes des collectivités territoriales et des établissements publics locaux du 29 juillet 2004, les dispensant ainsi de faire valider leurs créances par le juge compétent, ce qui d'ailleurs a été confirmé par les réponses ministérielles n° 56745 et 33369, par un arrêt du tribunal des conflits du 23 juin 2003 (SARL Transport Saint-Germain), et un arrêt du Conseil d'État du 13 février 1991. Il lui rappelle, par ailleurs, que l'utilisation de cette prérogative de puissance publique est de nature à favoriser le désengorgement des juridictions pénales et administratives et que cela présente un intérêt certain, compte tenu de la fréquence des dommages causés notamment au domaine public routier, tout en allégeant et en accélérant les procédures de recouvrement de ces créances au bénéfice des collectivités publiques gestionnaires.
Les créances qui naissent au profit d'une collectivité locale, d'un établissement public ou d'un établissement public de coopération intercommunale sont constatées par un titre qui matérialise ses droits. Ce titre peut prendre la forme, outre celle d'un jugement exécutoire ou d'un contrat, d'un acte pris, émis et rendu exécutoire par l'ordonnateur de la collectivité en vertu d'arrêtés, d'états ou de rôles. Le décret n° 66-624 du 19 août 1966 (modifié par le décret n° 81-362 du 13 avril 1981) relatif au recouvrement des produits des collectivités locales et des établissements publics locaux a conféré un privilège exorbitant du droit commun aux personnes publiques pour le recouvrement de leurs créances. Selon ce décret, codifié à l'article R. 2342-4 du CGCT, les titres des collectivités publiques sont exécutoires de plein droit. Le caractère exécutoire de plein droit des titres de recette émis par les collectivités territoriales pour le recouvrement de recettes de toutes natures, qu'elles sont habilitées à recevoir, a été consacré par l'article 98 de la loi de finances pour 1992, codifié à l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales. Il exclut les produits assis et liquidés par les services fiscaux de l'État et ne concerne pas les créances qui résultent de jugements ou de contrats exécutoires. La créance ainsi recouvrée doit avoir un caractère exigible, certain et liquide (CAA Marseille, 30 avril 2003, Cie gén. de stationnement). Cela étant, pour répondre au cas d'espèce, une collectivité ou un groupement de collectivités n'est pas en droit d'émettre un titre de recette exécutoire du montant des réparations à l'encontre de l'auteur, clairement identifié, de dégradations de son domaine public. En effet, la réparation d'un préjudice mettant en jeu la responsabilité du fait personnel de l'auteur du dommage, de même que la sanction, ne sauraient intervenir sans recourir au juge. Si, dans le cas d'espèce, l'EPCI émettait néanmoins un tel titre, celui-ci pourrait être immédiatement contesté, dans sa régularité formelle devant le juge judiciaire, ou dans sa régularité matérielle devant le juge de l'excès de pouvoir. La contestation suspendrait l'exécution du recouvrement, en vertu de l'article L. 1617-5 du C.G.C.T. En effet, le titre de recettes cesse d'être exécutoire dès l'introduction de la demande en justice tendant à son annulation (CE, 19 juin 1985, commune des Angles c/ Sté Arény Frères). Si l'EPCI ne peut légalement émettre un titre de recettes exécutoire en dehors de toute décision judiciaire, il dispose toutefois, pour obtenir réparation de la détérioration de son domaine privé, d'autres moyens d'action et de poursuite. Il peut notamment engager une action civile en responsabilité du fait personnel devant le juge judiciaire, en application des articles 1382 et suivants du code civil, afin d'obtenir une indemnité compensatrice de la dégradation. Enfin, en vertu des articles 322-1 et suivants du code pénal relatifs à la destruction, la dégradation et la détérioration des biens d'autrui, l'EPCI est également fondé à intenter une action pénale par un dépôt de plainte assorti, le cas échéant, d'une constitution de partie civile.
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