Mme Danielle Bousquet attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la nomination de magistrats « en surnombre » à la Cour de cassation. En effet, il semblerait que plusieurs magistrats du parquet aient été nommés avocat général à la Cour de cassation « dans l'intérêt du service » mais que, compte tenu du nombre de membres du parquet déjà présents à la Cour de cassation, ces derniers soient « en surnombre » et se retrouvent sans tâche particulière à effectuer. Ces nominations ont, semble-t-il, été prononcées contre la volonté des magistrats concernés. Elles apparaissent alors comme des sanctions déguisées et semblent avoir été prononcées seulement pour libérer des postes-clés dans la hiérarchie du parquet. Pourtant, la Cour européenne des droits de l'Homme a déjà exprimé ses réserves sur le statut du parquet français en s'interrogeant pour savoir s'il présente toutes les garanties d'une autorité judiciaire. Elle lui demande donc de lui indiquer si ces informations sont exactes, si des magistrats sont effectivement nommés « en surnombre » à la Cour de cassation et si elle entend abandonner sa conception du lien entre les procureurs et le ministère pour adopter une position plus conforme aux engagements internationaux de la France.
Le statut des magistrats et les modalités de leur nomination sont définis par la Constitution (art. 64 à 66) et par l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Les magistrats du siège à la Cour de cassation, les premiers présidents de cour d'appel et les présidents de tribunal de grande instance sont nommés par décret du Président de la République, sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature. Les autres magistrats du siège sont nommés par décret du Président de la République sur proposition du garde des sceaux, après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature. Les magistrats du parquet, notamment les avocats généraux à la Cour de cassation, sont nommés par décret du Président de la République après un avis simple du Conseil supérieur de la magistrature. Le principe d'inamovibilité prévu par la Constitution et rappelé par l'article 4 de l'ordonnance statutaire pour les magistrats du siège ne s'applique pas aux magistrats du parquet. Il convient de souligner que l'article 65 de la Constitution, dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République, prévoit désormais que le Conseil supérieur de la magistrature émet un avis sur tous les projets de nomination des magistrats du parquet, y compris ceux qui concernent les procureurs généraux, dont les emplois sont pourvus en conseil des ministres. En application de l'article 38 de la loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010 relative à l'application de l'article 65 de la Constitution, ces nouvelles modalités entreront en vigueur lors de la première réunion du Conseil supérieur de la magistrature dans sa composition issue de la loi constitutionnelle. S'agissant en particulier de la nomination des avocats généraux à la Cour de cassation, aucun texte ne limite leur nombre depuis l'abrogation, par le décret du 26 novembre 2007 fixant les effectifs du service de documentation et d'études de la Cour de cassation, du décret du 8 mars 2002 fixant les effectifs des magistrats près la Cour de cassation. Le nombre d'avocats généraux en fonction à la Cour de cassation est fixé au vu de l'activité de la cour et en fonction des besoins exprimés par le procureur général près ladite cour. Dans l'élaboration des projets de nomination, il est retenu plusieurs critères d'appréciation : les qualités professionnelles des magistrats, leur adéquation au profil du poste à pourvoir, leur ancienneté. La mobilité géographique et fonctionnelle est également un élément important. Les magistrats du parquet, tout comme ceux du siège, appartiennent au corps judiciaire (art. 1er de l'ordonnance statutaire) et le Conseil constitutionnel a rappelé, dans plusieurs décisions, que « l'autorité judiciaire qui, en vertu de l'article 66 de la Constitution, assure le respect de la liberté individuelle, comprend à la fois les magistrats du siège et ceux du parquet ». À ce titre, le principe de l'indépendance de l'autorité judiciaire posé par l'article 64 de la Constitution s'applique à l'ensemble du corps judiciaire.
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