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Jacques Remiller
Question N° 49945 au Ministère de la Défense


Question soumise le 26 mai 2009

M. Jacques Remiller appelle l'attention de M. le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants sur le dossier des actes de décès des déportés non rentrés des camps nazis. À ce jour, moins de la moitié des 115 500 personnes déportées de France (chiffres du ministère), déportation dite « raciale » et déportation dite de « répression » confondues, ont fait l'objet d'un acte de décès rédigé selon les dispositions de la loi n° 85-528 du 15 mai 1985 et publié au Journal officiel. Ce qui signifie, en clair, qu'aux yeux des lois et du code civil français, les déportés sans acte de décès sont considérés comme étant toujours vivants à l'heure actuelle ! La loi n° 85-528 du 15 mai 1985 impose au ministre des anciens combattants d'intervenir soit d'office, soit à la demande d'un ayant cause du défunt, pour l'apposition de la mention « mort en déportation » sur l'acte de décès des déportés non rentrés des camps nazis. Sans ambiguïté aucune, la loi pose : « Lorsqu'il est établi qu'une personne a fait partie d'un convoi de déportation sans qu'aucune nouvelle ait été reçue d'elle postérieurement à la date du départ de ce convoi, son décès est présumé survenu le cinquième jour suivant cette date, au lieu de destination du convoi ». Dans un courrier envoyé en réponse à la lettre d'une requérante dans le cadre de ce dossier, le cabinet du secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants semble remettre en cause la loi en question. En effet, il précise dans ce document que « [...] tous les déportés n'ont pas été exterminés lors de l'arrivée aux camps et la règle de fixation de la date du décès, soit cinq jours à partir du départ du convoi de référence, prévue par l'article 3 de la loi du 15 mai 1985, ne peut alors trouver à s'appliquer ». Or il paraît évident que c'est précisément pour estomper de telles incertitudes que la loi n° 85-528 du 15 mai 1985 avait institué un délai de cinq jours et le lieu d'arrivée du convoi pour lieu de décès. Dans un contexte où la politique mémorielle de la France souffre d'une dangereuse inanité qui pose la question de son avenir, l'approche qui semble être celle du cabinet du secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants ne peut que semer l'inquiétude, et rendre pessimiste quant au règlement rapide du dossier des actes de décès des déportés non rentrés des camps nazis. Il souhaite savoir s'il est envisagé de veiller au strict respect de la loi n° 85-528 du 15 mai 1985, et de rendre justice aux requérants de ce dossier et, ce faisant, de s'engager en faveur de la reconstruction d'une politique mémorielle enfin digne de ce nom.

Réponse émise le 22 décembre 2009

Le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants tient à préciser que la difficulté majeure concernant l'attribution de la mention « Mort en déportation » tenait, jusqu'à y a peu, au fait que les familles de déportés, qui devaient solliciter les tribunaux de grande instance afin d'engager une procédure de déclaration de décès, se heurtaient aux interprétations divergentes de la loi de 1985 par les parquets et que les procédures pouvaient dans certains cas, tarder, voire ne jamais aboutir. Toutefois, le garde des sceaux, ministre de la justice, saisie par le ministère de la défense a diffusé une circulaire en date du 29 octobre 2008 à tous ses parquets, afin que ceux-ci appliquent uniformément la loi du 15 mai 1985 relative à l'attribution de la mention « Mort en déportation » sur les actes et jugements déclaratifs de décès. Cependant, et de manière générale, il est indispensable, pour apposer la mention « Mort en déportation », de disposer des pièces officielles de l'état civil, ce qui, concrètement, se traduit par de nombreux courriers à destination des mairies, notamment pour savoir s'il existe un jugement déclaratif de décès dont les services n'auraient pas eu connaissance. Certaines investigations sont longues et difficiles, en particulier lorsqu'il s'agit de rechercher l'acte de naissance d'une personne née en Europe de l'Est. Dans ces conditions, une instruction doit être menée pour chaque apposition de la mention lorsque toutes les pièces nécessaires à la constitution du dossier ne sont pas réunies. Si le dossier ne comporte pas d'acte de décès ou de jugement déclaratif de décès, une procédure judiciaire doit être engagée auprès du tribunal de grande instance. Deux hypothèses peuvent alors se présenter. Si la personne concernée a fait partie d'un convoi de déportation sans qu'aucune nouvelle n'ait été reçue d'elle postérieurement à la date de départ de ce convoi, son décès est présumé survenu le 5e jour suivant cette date en application de l'article 3 de la loi du 15 mai 1985. Si elle a fait partie d'un convoi mais que la preuve est apportée qu'elle a été vue dans le camp d'arrivée ou tout autre camp postérieurement aux 5 jours prévus par la loi, le décès est alors présumé survenu 5 jours après la date attestant que la personne a été vue vivante, conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi du 15 mai 1985. Dans ces deux hypothèses, il incombe à l'autorité judiciaire de rendre un jugement déclaratif de décès valant acte de décès, préalable indispensable à l'attribution de la mention. Telles sont les raisons pour lesquelles le travail de l'administration ne peut se limiter, pour chaque dossier, à appliquer uniformément la règle des 5 jours au départ du convoi. Elle doit également s'attacher à rechercher les informations contenues dans les documents d'archives. Actuellement, près de 57 000 dossiers ont déjà été régularisés. En tout état de cause, tous les dossiers répertoriés ne répondent pas aux critères définis pour l'application de la loi et certains dossiers sont malheureusement inexploitables en raison du manque de pièces indispensables à leur instruction, telles les pièces d'état civil. Cependant, les services du ministère de la défense, conscients de l'importance de ce travail, mettent tout en oeuvre pour que l'application de la loi du 15 mai 1985 se fasse dans les meilleurs délais. C'est ainsi que depuis 2006, la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale a renforcé ses effectifs chargés de l'instruction des dossiers relatifs à l'attribution de la mention « Mort en déportation ». Cet effort a permis, depuis cette date, d'augmenter sensiblement la moyenne annuelle des dossiers traités, sans qu'il soit possible toutefois de prévoir une échéance précise pour le règlement définitif de ce dossier.

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