M. Jean-Paul Bacquet attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la protection pénale des anciens harkis. L'article 5 de la loi du 23 février 2005 interdit « toute injure ou diffamation commise envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur qualité vraie ou supposée de harki, d'ancien membre des formations supplétives ou assimilés ». Or il semble, qu'au vu des décisions de justice rendues récemment, la protection pénale des anciens harkis ne soit pas véritablement assurée et que l'article 5 soit inopérant. En effet, la Cour de cassation a, dans un arrêt du 31 mars dernier, précisé que « sur l'application de l'article 5 précité [...] se borne à préciser in fine que « l'État assure le respect de ce principe dans le cadre des lois en vigueur », ne détermine pas les éléments constitutifs de l'infraction ni la peine applicable et ne fait pas référence à l'article 32 de la loi sur la presse ; qu'en vertu du principe de légalité des peines, aucune peine ne peut être prononcée à raison d'un fait qui n'est qualifié par la loi ni crime ni délit ni contravention ; que dès lors, la juridiction correctionnelle ne saurait se fonder sur ce texte pour prononcer une sanction à l'égard des prévenus ». Une telle jurisprudence ne peut être satisfaisante pour les nombreuses familles de harkis qui ont été profondément meurtries par des propos indéfendables. Il apparaît plus que jamais nécessaire de légiférer pour réparer ce vide juridique. La réintroduction de l'ancien article 7 du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale (qui prévoyait l'insertion d'un article à la loi sur la presse de 1881) pourra réparer ce vide juridique. Les associations souhaitent même aller plus loin et proposent l'adoption d'un article 48-7 à la loi de 1881 ainsi rédigé : « Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, qui se propose, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l'honneur de personne ou un groupe de personnes en raison de leur qualité vraie ou supposée de harki, et d'anciens membres des formations supplétives ou assimilées peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les délits et crimes édictés par les articles 23, 24, 29, 30, 32, 33, et 48-2. En cas d'infractions commises envers des personnes considérées individuellement, l'association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de ces personnes ou de leurs ayants droit ». Enfin, elles souhaitent que le code de procédure pénale soit complété afin que les associations puissent agir même hors contexte de presse. Il lui demande donc d'indiquer quelles mesures elle entend prendre pour la protection pénale des harkis et si elle entend compléter la loi sur la presse de 1881, comme cela avait été voté par les députés lors du débat sur la loi du 23 février 2005.
Afin de concilier la liberté d'expression et la protection de la réputation des personnes, la loi sur la presse du 29 juillet 1881 réprime les propos injurieux ou diffamatoires dirigés contre une ou plusieurs personnes dès lors qu'elles sont ou peuvent être individuellement déterminées. Tel peut notamment être le cas si ces personnes sont mises en cause en raison de leur qualité de harki. Les articles 32 et 33 de cette loi répriment également, de façon spécifique et aggravée, les injures ou diffamations commises à l'encontre d'une personne ou d'un groupe de personnes, y compris si elles ne sont pas individuellement déterminées, à raison de leur origine, de leur appartenance à une ethnie, une race ou une religion, de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap. Cette énumération ne recouvre pas, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation, les injures ou diffamations proférées, de manière générale, à l'encontre d'un groupe de personnes en raison de leur qualité de harki. Une proposition de loi « visant à pénaliser les injures relatives aux harkis », déposée le 15 septembre 2009 à L'Assemblée nationale, prévoit de compléter les articles 32 et 33 en pénalisant de manière spécifique les injures envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leurs choix politiques réels ou supposés. Cette proposition de loi serait ainsi de nature à répondre aux souhaits exprimés par l'honorable parlementaire.
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