M. Jean-Claude Fruteau attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité sur l'obligation alimentaire envers les ascendants. En effet, en France, selon le code civil, les enfants sont tenus à une obligation alimentaire envers leurs parents « qui sont dans le besoin » ainsi qu'envers leurs autres ascendants. Cette obligation n'est donc pas limitée par le degré de parenté puisque, le cas échéant, les petits-enfants peuvent être conduits à aider leurs grands-parents, les arrières petits-enfants à aider les arrières grands-parents, et caetera. En outre, l'obligation alimentaire s'applique également aux gendres et aux brus à l'égard de leur belle-mère et de leur beau-père. Dans sa traduction juridique, l'obligation alimentaire peut prendre différentes formes, allant de la mise à disposition d'un logement à l'aide matérielle et financière. Si, dans bien des cas, cette solidarité intergénérationnelle s'exerce spontanément, la législation relative à l'aide sociale considère que celle-ci est prioritaire sur la solidarité collective. Ainsi, l'article L. 132-6 du code de l'action sociale et des familles énonce en effet le caractère subsidiaire de l'aide sociale : « Les personnes tenues à l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l'occasion de toute demande d'aide sociale, invitées à indiquer l'aide qu'elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais ». Cependant, dans des situations très particulières, certains enfants contestent l'exercice de cette solidarité automatique car leurs parents n'ont pas assumé leurs obligations alimentaires à leur égard lorsqu'ils étaient mineurs. Cette situation rend les relations familiales encore plus complexes, puisque l'on exige de l'enfant qu'il soit solidaire de ses parents alors que ces derniers ne l'ont pas été. Aussi, il souhaite connaître l'état de la législation ainsi que de la jurisprudence à ce sujet afin de savoir quelles sont les obligations faites aux personnes se trouvant dans cette situation.
Un récent rapport du Conseil économique et social intitulé « L'obligation alimentaire : des formes de solidarité à réinventer », propose d'améliorer la mise en oeuvre de la subsidiarité, en établissant par décret, une liste des situations permettant de dispenser le débiteur d'aliments de ses obligations. L'obligation alimentaire imposée par la loi (art. 205 du code civil) ne concerne pas seulement la nourriture. Les « aliments », au sens juridique du terme, recouvrent en fait les besoins fondamentaux de la personne humaine à savoir : nourriture, habillement, soins, logement, etc. La pension peut être versée en espèces ou en nature (hébergement, etc.). Par définition, une pension alimentaire est toujours proportionnelle à la fois aux ressources de celui qui la verse (le débiteur) et aux besoins de celui qui la reçoit (le créancier). Le code civil dans ses articles 205, 206 et 207 énumère, de manière limitative, les personnes tenues à l'obligation d'aliments. La participation des obligés alimentaires et les recours exercés contre les débiteurs d'aliments en matière d'aide sociale sont fondées sur l'obligation alimentaire telle qu'énoncée aux articles 205 et suivants du code civil, hors les cas où la loi sociale a pris le soin de l'écarter. La loi, en matière d'aide sociale, exonère de cette obligation en fonction des prestations qu'elle met en place, de leur nature et finalité. Ces prestations correspondent à des catégories de situations précises ou à des catégories particulières de publics. En l'état, elles permettent aux situations individuelles, dans leur diversité, d'accéder à ces prestations car les critères catégoriels bien que précis sont suffisamment généraux. Il n'en serait pas de même d'une liste exhaustive de situations dispensant les débiteurs d'aliments de ces obligations. Outre le fait qu'une telle liste fixée par décret ne pourrait qu'être en partie redondante avec ce que pose la loi, elle serait de nature à figer le droit, à exclure certaines situations par la rigidité induite de la mention de situations décrétées, sans pour autant empêcher ou limiter les recours au juge judiciaire (notamment ceux nés de l'interprétation du décret). De surcroît, il peut être observé que le droit de l'aide sociale laisse la faculté aux collectivités de renoncer partiellement ou intégralement à toute participation au titre de l'obligation alimentaire, face aux situations qui le méritent et qu'il leur appartient d'apprécier, sous contrôle du juge judiciaire qui, en tout état de cause, et nonobstant les conditions ou situations d'exception posées par la loi sociale ou un décret, demeure pour l'application de ces textes et tout autre, seul compétent en matière d'aliments.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.