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Pierre Lang
Question N° 49071 au Ministère de l'Intérieur


Question soumise le 12 mai 2009

M. Pierre Lang attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les effets pervers de l'initiative "Cartocrime" sur Internet. Cette application en ligne est alimentée par des statistiques de l'Observatoire national de la délinquance (OND) et propose une cartographie des infractions selon les régions et les territoires. Or ce site offre une vision nécessairement partielle de la situation : en effet, les chiffres de la délinquance représentent les faits enregistrés, et non la délinquance réelle. On évalue qu'un tiers des victimes n'osent pas signaler les crimes aux autorités. Il y aura donc nécessairement des distorsions selon la proportion de personnes qui portent plainte dans les différents départements. Surtout, il est à craindre que ce type de cartographie ne renforce la stigmatisation et la discrimination à l'encontre de certains quartiers. Des territoires pourraient se voir disqualifiés, en raison de taux d'infraction jugés effrayants par les internautes qui consulteraient ce site. Les efforts des municipalités pour promouvoir mixité sociale et désenclavement des quartiers défavorisés risquent d'être remis en cause par une présentation sur Internet de chiffres trompeurs sur la sécurité dans les différents départements. Il lui demande si elle entend revoir ce dispositif "Cartocrime" dont les effets pervers semblent extrêmement préoccupants.

Réponse émise le 11 août 2009

L'application « CartoCrime.Net » a été mise en place par l'Observatoire national de la délinquance qui est une structure dirigée par un conseil d'orientation indépendant. L'application « CartoCrime.Net » propose une cartographie en ligne des faits enregistrés par les services de police et les unités de gendarmerie en France métropolitaine et dans les départements et régions d'outre-mer. Cette application Internet vise à permettre un accès plus aisé à des données statistiques publiques, par régions et départements exclusivement, déjà publiées dans des documents papiers depuis plus de dix ans ou qui ont fait l'objet d'études spécifiques de l'Observatoire national de la délinquance. Le décalage entre les données de la criminalité, qualifiée de « réelle », et celles issues des statistiques mises en ligne par l'Observatoire national de la délinquance est un élément majeur de la méthodologie mise en place par cet Observatoire qui a toujours prôné une approche multi-sources. C'est pourquoi, depuis quatre ans, l'OND réalise avec l'Insee une enquête de victimation nationale visant, notamment, à mesurer l'écart entre le nombre de faits rapportés aux autorités par les victimes et le nombre de faits que les victimes déclarent subir sans nécessairement déposer une plainte. Les résultats de cette enquête font l'objet d'une très large exploitation et permettent de compléter les informations issues des statistiques administratives. C'est ainsi que, grâce à cette enquête, pour la première fois, il a été possible de mieux appréhender le phénomène des violences intrafamiliales. L'outil statistique policier révèle les faits qui sont portés à la connaissance des autorités. Le principal écueil à éviter lorsqu'on commente ces statistiques est la confusion entre « faits constatés » et « criminalité ou la délinquance commise ». Un acte criminel ne peut être enregistré par la police ou la gendarmerie qu'à la suite d'une plainte d'une victime ou parce qu'il aura été révélé par l'action des services. En l'absence d'informations sur la proportion de faits qui ne sont pas portés à la connaissance de la police ou de la gendarmerie, on ne peut pas interpréter l'évolution du nombre de faits constatés en l'assimilant à celle des faits commis. Il peut arriver que les faits constatés suivent la tendance des faits commis mais, à eux seuls, ils ne peuvent en apporter l'assurance. Pour autant, ces faits sont révélateurs de l'activité d'enregistrement d'un service public et il est important, comme le demandent nos concitoyens et afin d'éviter tout soupçon de dissimulation, que ces données soient aisément accessibles. C'est d'ailleurs cette volonté de transparence qui a prévalu à la mise en place de l'Observatoire national de la délinquance, créé à la suite du rapport parlementaire Caresche/Pandraud, par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur. On peut comprendre cette inquiétude sur les éventuels effets pervers de la mise en ligne cartographiée par départements et régions et juger inopportun de publier des données relatives à la criminalité à une échelle géographique trop fine. C'est pour cela que le site CartoCrime. Net limite les espaces géographiques d'analyse aux départements et régions, et non pas aux communes et aux quartiers. Il n'existe donc aucun risque de stigmatisation à l'échelle communale.

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