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Jean-Jacques Urvoas
Question N° 47555 au Ministère du de l'homme


Question soumise le 28 avril 2009

M. Jean-Jacques Urvoas attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme sur la vaste opération d'arrestations qui, en Turquie, vise depuis le 14 avril 2009 les cadres dirigeants du parti pour une société démocratique (DPT), qui a remporté une victoire sans appel dans les régions kurdes du pays lors des élections municipales du 29 mars 2009. À cette occasion, le DTP a en effet conquis, au détriment du mouvement islamo-conservateur au pouvoir, l'AKP, dix assemblées départementales, une ville métropolitaine et ses quatre arrondissements, sept villes-préfectures et quatre-vingt-dix communes dont cinquante-et-une grandes agglomérations. Durant les opérations de police de ces derniers jours, une cinquantaine de personnes ont été arrêtées et placées en garde à vue, dont plusieurs vice-présidents du DTP, le maire-adjoint de la ville de Bingöl, le rédacteur en chef d'une chaîne de télévision locale et trois avocats. Selon des sources, le parti au pouvoir tente par cette entremise de reprendre la main après le cinglant revers électoral qu'il a subi, en diabolisant la mouvance pro-kurde et en l'accusant d'être liée à la guérilla séparatiste du PKK. Ce durcissement du gouvernement turc paraît d'autant plus surprenant que la procédure d'interdiction du DTP, ouverte par le procureur de la cassation en 2007, semblait mise en sommeil. Il lui demande le sentiment que lui inspire cette atteinte manifeste aux droits de l'opposition dans un pays membre fondateur du conseil de l'Europe.

Réponse émise le 12 octobre 2010

Le gouvernement turc a adopté, depuis 2008, plusieurs mesures en faveur des droits économiques et culturels de la communauté kurde (relance du projet GAP [Güneydogu Anadolu Projesi] de développement économique du sud-est anatolien, lancement d'une chaîne télévisée émettant uniquement en kurde, cours optionnels en kurde dans plusieurs universités turques...). Cependant, cette stratégie a été sanctionnée par les élections municipales du 29 mars 2009, qui ont permis au Parti pour une société démocratique (DTP) de conquérir 43 nouvelles municipalités, ce qui a porté à 97 les villes gérées par ce parti dans le sud-est anatolien. À l'été 2009, le Gouvernement a lancé un processus d'ouverture démocratique visant, notamment, à renforcer les droits politiques, économiques et culturels de la population kurde. La décision de la Cour constitutionnelle turque d'interdire le DTP, le 11 décembre 2009, a toutefois porté un coup sévère à la représentation de la population kurde au Parlement, ainsi qu'à l'initiative d'ouverture démocratique du Gouvernement. À la suite de cette décision de justice, la représentation kurde n'a toutefois pas disparu du Parlement turc. La décision suscitée de la Cour constitutionnelle ne vise en effet pas ceux des membres du DTP qui avaient créé un nouveau parti en prévision de l'interdiction du DTP. Un groupe parlementaire du bureau du parti pour la paix et la démocratie (BDP) a donc pu naître. Ce nouveau parti éprouve toutefois des difficultés à définir une ligne claire lui permettant de prendre ses distances avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Depuis plusieurs mois, il a été procédé à l'arrestation de cadres du BDP, et de nombreuses procédures judiciaires sont encore en cours. Tous ces événements limitent la capacité du BDP à émerger comme un véritable interlocuteur politique de la cause kurde, alors que les chances de relance du processus d'ouverture démocratique par le Gouvernement Erdogan semblent réduites. La France soutient le processus lancé par les autorités turques, dans la voie du dialogue politique. La France et l'UE ne manquent d'ailleurs pas d'appeler, régulièrement, le Gouvernement turc à poursuivre ses efforts pour le renforcement des libertés individuelles et la consolidation de l'État de droit dans ce pays. Toutefois, il est évident que les représentants élus des populations d'origine kurde, s'ils souhaitent pouvoir être des interlocuteurs crédibles dans la recherche d'une solution politique et durable de la question kurde, doivent aussi prendre clairement leurs distances avec la violence du PKK, mouvement qui figure sur la liste des organisations terroristes de l'UE.

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