M. Jean-Jacques Urvoas attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la vaste opération d'arrestations qui, en Turquie, vise depuis le 14 avril 2009 les cadres dirigeants du parti pour une société démocratique (DPT), qui a remporté une victoire sans appel dans les régions kurdes du pays lors des élections municipales du 29 mars 2009. À cette occasion, le DTP a en effet conquis, au détriment du mouvement islamo-conservateur au pouvoir, l'AKP, dix assemblées départementales, une ville métropolitaine et ses quatre arrondissements, sept villes-préfectures et quatre-vingt-dix communes dont cinquante-et-une grandes agglomérations. Durant les opérations de police de ces derniers jours, une cinquantaine de personnes ont été arrêtées et placées en garde à vue, dont plusieurs vice-présidents du DTP, le maire-adjoint de la ville de Bingöl, le rédacteur en chef d'une chaîne de télévision locale et trois avocats. Selon des sources, le parti au pouvoir tente par cette entremise de reprendre la main après le cinglant revers électoral qu'il a subi, en diabolisant la mouvance pro-kurde et en l'accusant d'être liée à la guérilla séparatiste du PKK. Ce durcissement du gouvernement turc paraît d'autant plus surprenant que la procédure d'interdiction du DTP, ouverte par le procureur de la cassation en 2007, semblait mise en sommeil. Il lui demande si le Gouvernement français entend réagir à cette situation, et sous quelle forme.
Les élections municipales du 29 mars 2009 en Turquie ont effectivement permis au DTP de conquérir quarante-trois nouvelles municipalités, ce qui porte à quatre-vingt-dix-sept les villes gérées par ce parti dans le Sud-Est anatolien. De fait, ce résultat, de même que la présence des députés du DTP au sein de la grande assemblée nationale de Turquie, démontre la réalité des progrès de la démocratie en Turquie. Si des arrestations dans le cadre d'enquêtes ont eu lieu contre des cadres du DTP, et si l'Union européenne ne manque pas d'appeler régulièrement le gouvernement turc à poursuivre ses efforts pour le renforcement des libertés individuelles et la consolidation de l'État de droit, force est de constater ces derniers mois une évolution de l'attitude des autorités de ce pays s'agissant de la question kurde. Le gouvernement turc a adopté plusieurs mesures en faveur des droits économiques et culturels de la communauté kurde (relance du projet GAP de développement économique du Sud-Est anatolien, lancement d'une chaîne télévisée émettant uniquement en kurde, cours optionnels en kurde dans plusieurs universités turques...). L'armée turque, elle-même, a reconnu, en la personne du chef d'état-major des armées, que la solution au problème kurde ne pouvait être uniquement militaire. Enfin, le Premier ministre turc a proposé, le 13 novembre 2009, devant le parlement, un plan dit « d'ouverture démocratique », qui doit conforter davantage les droits des citoyens turcs d'origine kurde, avec notamment la création de commissions indépendantes pour prévenir les discriminations et la possibilité d'une plus large utilisation de la langue kurde. Le gouvernement turc a également permis le retour en Turquie d'ex-rebelles du PKK. La France, comme l'Union européenne, soutient le processus lancé par les autorités turques, dans la voie du dialogue politique, et estime nécessaire que les représentants élus des populations d'origine kurde, prennent clairement leurs distances avec la violence du PKK, mouvement qui figure sur la liste des organisations terroristes de l'Union européenne.
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