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Jean-René Marsac
Question N° 47100 au Ministère de l'Intérieur


Question soumise le 21 avril 2009

M. Jean-René Marsac interroge Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les pratiques policières. Un rapport d'Amnesty international paru le 2 avril dernier dénonce les violences dont peuvent faire preuve les forces de l'ordre, mais s'étonne de l'impunité dont bénéficient de fait les policiers français. D'après les informations qu'Amnesty international a pu obtenir, sur 663 plaintes examinées par l'organe d'inspection de la police en 2005, seulement 16 ont conduit à la radiation des agents concernés ; en 2006, seules huit allégations de violence sur 639 ont abouti à une telle radiation. De très nombreuses plaintes déposées contre des agents des forces de l'ordre sont classées sans suite par le parquet avant même d'arriver jusqu'au tribunal. Amnesty a aussi découvert que certaines personnes portant plainte contre des policiers pour violences sont ensuite elles-mêmes victimes de poursuites pénales. Amnesty pointe déjà du doigt depuis plusieurs années les déviances du système policier français. Plusieurs cas de mort mettent en cause, de façon directe ou indirecte des policiers (en 2004, en 2008...). Un premier rapport dénonçant les mauvais traitements infligés par des membres des forces de l'ordre français était paru en 2005. Cette même année, le commissaire aux droits de l'Homme du conseil de l'Europe a aussi critiqué l'impunité des policiers. En 2006, le comité contre la torture de l'ONU lui-même s'est déclaré préoccupé par « le nombre et la gravité des allégations parvenues jusqu'à lui au sujet des mauvais traitements infligés par des agents de l'ordre public à des détenus et à d'autres personnes auxquelles ils se heurtent ». Il est maintenant urgent de remédier à la situation. Plusieurs solutions existent, dont la première serait la création d'un organisme indépendant chargé d'enquêter sur les plaintes contre les agents de la force publique et doté de vrais pouvoirs d'intervention. Face à cette situation intolérable dans notre pays, il lui demande ce que le Gouvernement compte faire pour mettre fin à ces agissements de membres des forces de l'ordre.

Réponse émise le 16 juin 2009

Le rapport de l'association auquel fait référence le parlementaire conduit en premier lieu à rappeler une évidence : la France est un État de droit, dans lequel les policiers assurent chaque jour un service public fondamental, la garantie du respect de la loi et de l'ordre républicains, au service de la sécurité des Français. Comme peu d'agents publics, les policiers assument leur mission en exposant leur sécurité, dans des conditions fréquemment difficiles, aux prises avec une population elle-même souvent difficile. Ce rapport reprend de surcroît, hors de leur contexte, un certain nombre d'appréciations formulées par divers organismes (dont certains émanant d'organisations composées d'États où le niveau de protection des libertés fondamentales n'est pas tout à fait le même qu'en France) et correspondant davantage à une présentation tendancieuse de la réalité qu'à une démonstration rigoureuse. Évoquer la prétendue impunité dont bénéficieraient les policiers ou la nécessité de créer une « commission indépendante chargée des plaintes contre la police » est une contrevérité qui revient à méconnaître voire à dévaloriser le travail des autorités administratives indépendantes créées par le législateur, ainsi que de l'autorité judiciaire dont l'indépendance est garantie par la Constitution. L'accusation de « racisme structurel » ne s'appuie sur aucun élément objectif et relève de la critique la plus tendancieuse. Il convient d'ailleurs de rappeler que les forces de sécurité sont au coeur du dispositif public de prévention et de répression des actes antisémites et racistes. La direction générale de la police nationale a notamment conclu, le 21 décembre 2006, avec la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE), une convention de partenariat destinée à mettre en oeuvre des actions communes pour lutter plus efficacement contre toutes les formes de discriminations. Les dispositions combinées du code pénal et de la loi du 6 juin 2000 modifiée portant création d'une Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) permettent aux autorités judiciaires de poursuivre pénalement le délit de dénonciation calomnieuse s'agissant de faits dénoncés à la CNDS dès lors que les éléments constitutifs de l'infraction sont réunis. La possibilité d'une poursuite pénale et d'une condamnation d'une personne qui dénonce à la CNDS un fait qu'elle sait être totalement ou partiellement inexact ne remet nullement en cause le fonctionnement de cette autorité administrative indépendante. De manière similaire, la dénonciation calomnieuse directe à l'autorité judiciaire ou administrative fait également encourir de telles poursuites sans pourtant obérer le fonctionnement de l'institution judiciaire ou la mise en jeu de la responsabilité disciplinaire. La possibilité de retenir la dénonciation calomnieuse, telle qu'elle apparaît rigoureusement encadrée par des éléments constitutifs nécessaires, constitue de surcroît une garantie pour la CNDS de ne pas être saisie pour des raisons fallacieuses. Il serait surprenant de priver les policiers d'un droit reconnu à l'ensemble des justiciables, celui de déposer plainte à l'encontre de l'auteur d'une dénonciation calomnieuse, et de leur droit d'obtenir réparation du dommage causé. Dans le cas contraire, il risquerait d'être porté atteinte à un principe fondamental : le droit à tout justiciable d'ester en justice. Le strict respect des principes déontologiques (respect d'autrui, dignité, etc.) constitue un fondement essentiel du travail policier, auquel le Président de la République comme le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ont à plusieurs reprises rappelé l'attachement qu'ils y portent. La police exerce ses missions dans le respect des droits fondamentaux et les manquements à la déontologie exposent leurs auteurs à des sanctions disciplinaires et, le cas échéant, pénales. En application de son article 7, les policiers sont tenus à « un respect absolu des personnes, quelles que soient leur nationalité ou leur origine, leur condition sociale ou leurs convictions politiques, religieuses ou philosophiques ». D'autre part, il n'est nulle part fait mention, dans le rapport cité, de la rigueur dont l'administration fait preuve en matière disciplinaire. Or, au cours des trois dernières années, le nombre de sanctions a augmenté de 16 % et, si les policiers représentent environ 8 % de la fonction publique de l'État, ils sont frappés par près de 40 % des sanctions disciplinaires prononcées chaque année. La fréquence des révocations, en particulier, est probablement sans équivalent dans la fonction publique. Dans sa mission disciplinaire, l'inspection générale de la police nationale est connue pour sa rigueur. Le respect de la déontologie repose, plus généralement, sur l'ensemble de la chaîne hiérarchique, en permanence mobilisée pour en garantir le respect constant, ainsi que sur une formation initiale et continue des personnels centrée notamment autour de la promotion de l'éthique professionnelle. Il importe également de redire que les forces de l'ordre sont placées sous le contrôle permanent de l'autorité judiciaire, et que cette garantie fondamentale n'est à aucun moment évoquée dans le rapport de l'association. Leur action est strictement encadrée par des textes, nationaux et internationaux, et fait l'objet de nombreux contrôles externes de la part d'un nombre impressionnant d'organismes nationaux et internationaux : qu'il s'agisse de la CNDS, du contrôleur général des lieux de privation de liberté, de la HALDE, du comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, ces organismes disposent de moyens d'investigations étendus qui leur permettent, en permanence, de s'assurer du respect par la police des droits fondamentaux. La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République, en créant le défenseur des droits, permettra d'aller plus loin encore dans la protection des libertés fondamentales. Les fautes, individuelles et relativement rares, existent au sein de la police nationale comme dans toutes les professions, du secteur public comme du secteur privé. Elles sont inévitables. Pour autant, elles ne sauraient justifier l'image caricaturale et outrancière véhiculée dans le rapport à l'encontre d'une institution consacrée à la protection des Français, et qui se fonde sur une analyse aussi sommaire qu'idéologique, méconnaissant la réalité de l'État de droit, les spécificités du travail policier et la rigueur des contrôles dont la police fait l'objet.

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