M. Michel Hunault attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de loi pénitentiaire adopté en première lecture au Sénat. Une campagne d'interrogations est actuellement adressée aux députés concernant l'adoption de l'article 46, qui permettrait à tout prisonnier condamné, à qui il reste à effectuer deux années de prison, d'être automatiquement libéré. S'il est légitime de partager les objectifs de la loi pénitentiaire pour la dignité de la personne humaine, il n'est pas concevable d'opposer l'exigence d'humanité avec l'exigence de sécurité et donc de veiller à la réalité de l'application des peines. Il lui demande si elle peut rappeler la politique pénale applicable en matière de libération conditionnelle.
La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 concilie l'exigence d'humanité et l'exigence de sécurité, tout en veillant à la réalité de l'exécution des peines. Cette loi comporte en particulier plusieurs mesures tendant à promouvoir et à faciliter les aménagements de peine. Ainsi, l'article 65 de la loi a posé dans le code pénal le principe selon lequel, en matière délictuelle, l'emprisonnement ferme ne doit être prononcé qu'en dernier recours, lorsque toute autre sanction serait inadéquate, et qu'il doit si possible être aménagé. L'article 66 de la loi a porté de un à deux ans la durée des peines d'emprisonnement pouvant faire l'objet d'une mesure d'aménagement (semi-liberté, placement extérieur, placement sous surveillance électronique ou fractionnement de la peine) prononcée ab initio par le tribunal correctionnel. En parallèle, les articles 79 et 81 ont modifié le code de procédure pénale afin de permettre le prononcé par le juge de l'application des peines d'une mesure d'aménagement (fractionnement, suspension, semi-liberté, placement à l'extérieur ou placement sous surveillance électronique) pour les peines de deux ans d'emprisonnement ou lorsque le reliquat d'une peine est inférieur ou égal à deux ans. Ces mesures s'inscrivent dans la volonté commune du Parlement et du Gouvernement de développer les aménagements de peine afin de promouvoir la réinsertion et de lutter plus efficacement contre la récidive. Toutefois, le Parlement et le Gouvernement ont souhaité encadrer précisément ces nouvelles dispositions. Tout d'abord, aucun aménagement de peine ne sera décidé de manière automatique : le juge de l'application des peine comme le tribunal correctionnel devront apprécier au cas par cas si la personnalité du condamné justifie l'octroi d'un aménagement de peine. Il n'est nullement question de libérer par ce biais des personnes dangereuses ou ne manifestant aucun effort de réinsertion. La loi impose d'ailleurs la réalisation d'une expertise psychiatrique avant d'accorder un aménagement de peine lorsqu'une personne détenue a été condamnée pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru. De plus, le ministère public fera bien évidemment appel de toute décision d'aménagement d'une peine qui paraîtrait injustifiée eu égard à la personnalité du condamné ou à la nature des faits ayant entraîné la condamnation. Ensuite, l'élargissement du champ d'application de ces aménagements de peine est exclu pour les récidivistes : pour les condamnés en récidive légale, seules peuvent être aménagées les peines d'une durée d'un an maximum, comme cela était déjà le cas avant la loi pénitentiaire. Enfin, les condamnés bénéficiant d'une mesure d'aménagement de peines seront étroitement surveillés, si nécessaire par le port d'un bracelet électronique. À cet égard, il peut être noté que la loi du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle a prévu de nouvelles mesures afin de faire mieux respecter l'effectivité des obligations pesant sur les condamnés placés sous le contrôle d'un juge de l'application des peines. Les services de police et de gendarmerie peuvent dorénavant interpeller et placer en retenue toute personne violant les obligations qui lui sont imposées dans le cadre d'un aménagement de peine. Cette loi a aussi développé les possibilités de suivi des condamnés les plus dangereux en assouplissant les conditions du placement sous surveillance judiciaire. Si la privation de liberté demeure une sanction nécessaire, la limitation au maximum des « sorties sèches » ainsi que l'encadrement et la surveillance des condamnés hors du cadre carcéral sont nécessaires à sa réadaptation, et elles constituent un moyen de lutte contre la récidive particulièrement justifié.
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