Mme Catherine Quéré attire l'attention de M. le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants sur l'absence de mesures liées à la reconnaissance des conséquences sanitaires pour les victimes des essais nucléaires. Cela fait six ans déjà que dix-huit propositions de loi ont été déposées, par des parlementaires de l'opposition, comme ceux de la majorité, afin d'obtenir réparation pour toutes les victimes des essais nucléaires, à l'instar de ce qui a été fait en Angleterre, en Nouvelle-Zélande, en Australie et tout récemment au Canada. Malheureusement, à ce jour, ces initiatives sont restées sans réponses. Et en juin 2008, un comité de soutien appelé « vérité et justice », composé de personnalités politiques, scientifiques et artistiques, a été créé pour la reconnaissance des conséquences des essais nucléaires, ainsi qu'une juste indemnisation des victimes civiles et militaires présentes sur les sites d'expérimentation du Sahara ou de la Polynésie Française de 1960 à 1996. Par ailleurs, le 2 décembre 2008, une proposition de loi relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes a été présentée devant le Sénat. Par conséquent, elle lui demande si le Gouvernement entend, enfin, adopter des mesures concrètes pour la reconnaissance des conséquences des essais nucléaires pour les femmes et les hommes qui y ont participé.
Le Gouvernement, prêtant la plus grande attention au suivi des conséquences sanitaires des essais nucléaires français, a décidé de faciliter l'indemnisation des personnes atteintes de maladies radioprovoquées par les essais nucléaires réalisés par la France, entre 1960 et 1996, au Sahara et en Polynésie française. La loi relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, promulguée le 5 janvier 2010, aboutissement d'un travail long et approfondi, crée un régime de réparation intégrale des préjudices subis par les victimes des essais nucléaires français, quel que soit leur statut (civils ou militaires, travailleurs sur les sites d'expérimentations et populations civiles, ressortissants français ou étrangers). Elle permet à toute personne atteinte d'une maladie liée aux essais nucléaires français de constituer un dossier de demande d'indemnisation, qui doit comporter les éléments attestant la présence du requérant dans l'une des zones géographiques et au cours de périodes déterminées, fixées par la loi et son décret d'application. La liste des maladies radio-induites ouvrant droit à indemnisation sera fixée par un décret en Conseil d'État. Elle s'appuiera sur les travaux du comité scientifique des Nations unies pour l'étude des effets des rayonnements ionisants (UNSCEAR) et évoluera en fonction de l'état d'avancement des données scientifiques. Les demandes individuelles d'indemnisation sont soumises à un comité d'indemnisation, présidé par un conseiller d'État ou un conseiller à la Cour de cassation et composé notamment d'experts médicaux nommés conjointement par les ministres chargés de la défense et de la santé sur proposition du Haut Conseil de la santé publique. Les associations de victimes ne peuvent être représentées au sein de ce comité dans la mesure où il s'agit d'un organe d'expertise technique, chargé d'examiner des dossiers médicaux individuels. Pour autant, dans le cadre de l'examen de sa demande par ce comité, l'intéressé peut, s'il le souhaite, être assisté par une personne de son choix. Les ayants droit des victimes décédées avant la promulgation de la loi précitée, soit avant le 5 janvier 2010, peuvent saisir le comité d'indemnisation dans un délai de cinq ans à compter de cette promulgation. Toutefois, cette demande ne peut être déposée qu'au nom de la victime décédée, pour ses propres préjudices, et non au titre des préjudices des ayants droit. Ceux-ci ont néanmoins la possibilité de demander la réparation de leur préjudice propre selon les règles de droit commun. Le comité examine si les conditions de l'indemnisation sont réunies. Lorsqu'elles le sont, l'intéressé bénéficie d'une présomption de causalité à moins que, au regard de la nature de la maladie et des conditions de son exposition, le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable. Pour chacune des demandes individuelles, le comité d'indemnisation présente une recommandation au ministre de la défense qui décide de la suite réservée à la requête et notifie à l'intéressé une offre d'indemnisation ou le rejet motivé de sa demande. L'indemnisation est versée sous forme de capital, déduction faite des réparations déjà perçues par le demandeur à raison des mêmes chefs de préjudice. La loi du 5 janvier 2010 prévoit, en outre, que le ministre de la défense réunit au moins deux fois par an une commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires. Cette commission peut également se réunir à la demande de la majorité de ses membres. Elle comprend dix-neuf membres : un représentant de chacun des ministres chargés de la défense, de la santé, de l'outre-mer et des affaires étrangères ; le président du gouvernement de la Polynésie française ou son représentant ; le président de l'assemblée de la Polynésie française ou son représentant, deux députés ; deux sénateurs ; cinq représentants des associations représentatives de victimes des essais nucléaires ; ainsi que quatre personnalités scientifiques qualifiées dans ce domaine. La commission est consultée sur le suivi de l'application de la loi du 5 janvier 2010, ainsi que sur les modifications éventuelles de la liste des maladies radio-induites. À ce titre, elle peut adresser des recommandations au ministre de la défense et au Parlement. Il n'est en revanche pas prévu de créer un fonds d'indemnisation sur le modèle de celui des victimes de l'amiante, compte tenu de la spécificité du dispositif mis en place. En effet, un tel fonds est généralement créé pour indemniser les victimes lorsque l'auteur du dommage est insolvable, n'a pas pu être identifié ou encore lorsque la responsabilité ne peut être clairement établie, compte tenu du grand nombre d'intervenants. Le fonds est alors subrogé dans les droits de la victime pour exercer l'action récursoire à l'encontre de l'auteur du dommage, le cas échéant au terme d'une longue procédure judiciaire. Or, les essais nucléaires ayant été menés par l'État et sous sa seule responsabilité, c'est par conséquent l'État qui prend à sa charge l'indemnisation du préjudice semis exercer d'action récursoire d'aucune sorte. Ce dispositif volontariste n'a d'autre objet que d'instaurer un régime de réparation des préjudices des personnes victimes des essais nucléaires français.
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