Mme Catherine Lemorton attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la menace que fait peser le démantèlement de la protection judiciaire de la jeunesse sur les missions éducatives auprès des jeunes mineurs en grande difficulté. La restructuration opérée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques prévoit pour la protection judiciaire de la jeunesse la suppression de 800 postes sur toute la France, pour une administration qui compte environ 8 000 personnes. Elle met en évidence la dissolution des moyens mis en oeuvre au titre de la prévention de la délinquance, privilégiant la politique pénale et l'enfermement. La construction de sept établissements pénitentiaires pour mineurs et, surtout, la disparition de neuf foyers d'hébergement en France confirment l'orientation de l'État, qui, aux mesures éducatives, préfère substituer des mesures répressives. Il semble que le désengagement de l'action civile de prévention de la délinquance soit initié. La preuve en est la fermeture de plusieurs centres d'accueil pour mineurs condamnés sur l'ensemble du territoire. Cette absence d'accueil nous interpelle, car elle va, de fait, contraindre au placement sans délai des mineurs en familles ou en foyers hors département. Or l'éloignement des enfants de leurs familles ne fera qu'accroître leurs difficultés. Par ailleurs, les professionnels investis de missions éducatives et de prévention sont très inquiets du démantèlement progressif du service public de la protection judiciaire de la jeunesse et de ses conséquences. Elle lui demande si ces fermetures de centre d'accueil peuvent être annulées et quelle politique elle souhaite mettre en place dans un avenir proche.
La garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de rappeler à l'honorable parlementaire que ce sont les lois de décentralisation de 1982 qui ont donné compétence aux conseils généraux en matière d'aide sociale à l'enfance. La loi du 5 mars 2007 sur la protection de l'enfance a renforcé le caractère subsidiaire de l'intervention de la justice en cette matière. Désormais, les conseils généraux centralisent tous les signalements d'enfants en danger. Ils doivent ensuite les traiter ; en évaluer le bien-fondé et proposer, le cas échéant, une aide à la famille. Ce n'est que si les services de l'aide sociale à l'enfance ne parviennent pas à obtenir l'adhésion des familles qu'ils peuvent saisir le procureur de la République qui peut lui-même saisir le juge des enfants. Le juge est ainsi parfaitement dans sa mission : vérifier si les conditions légales sont réunies pour pouvoir imposer une mesure de protection tout en recherchant l'adhésion de la famille. Il ne s'agit pas d'un transfert de charges car celui-ci résulte des lois de décentralisation de 1983 et 1986, renforcées par la loi du 5 mars 2007. En revanche, en matière pénale, a été décidé un recentrage de l'activité des services du secteur public de la PJJ sur la prise en charge des mineurs délinquants. Ce recentrage au pénal ne fait qu'accompagner une évolution ancienne et continue de baisse de l'activité civile (- 20 % depuis 2002). 66 % de l'activité de la protection judiciaire de la jeunesse est aujourd'hui au pénal. Il permet aux juges des enfants, et plus encore à la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), de dégager davantage de temps pour assurer la prise en charge pénale des mineurs. Ces jeunes délinquants sont eux aussi en grande difficulté. Et, contrairement aux mineurs en danger, aucune autre institution en dehors de la justice n'est compétente pour eux. Cette évolution se traduit naturellement dans les moyens nécessaires à la mission de la PJJ. Leur évaluation est faite sur la base du projet stratégique national 2008-2011, qui est mis en oeuvre sur chaque territoire de façon rationnelle et équilibrée. Certaines structures relevant de la PJJ sont appelées à fermer : celles qui ne sont plus aux normes et ne justifient pas l'engagement de travaux, d'une part. Et celles qui ne reçoivent pas suffisamment de jeunes, d'autre part. Enfin, s'agissant des effectifs de la PJJ, le chiffre de 800 suppressions de postes se doit d'être démenti. Il s'agit du nombre d'emplois (805 exactement) qui seront redéployés de l'activité civile vers l'activité pénale afin de mieux prendre en charge les mineurs délinquants. Il n'y a donc aucun démantèlement du service public de la protection de l'enfance.
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