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Jean Gaubert
Question N° 45699 au Ministère de la Justice


Question soumise le 31 mars 2009

M. Jean Gaubert attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences de sa décision, annoncée le 10 juin 2008, de supprimer le recours obligatoire à un avoué devant les chambres civiles et commerciales des cours d'appels à compter du 1er janvier 2010. Cette mesure, prise sans aucune concertation préalable, aboutira à la suppression de cette profession. Ainsi, en cette période de crise, et alors que le Gouvernement ne cesse de répéter que sa priorité est la sauvegarde de l'emploi, ce sont 235 études créant près de 2 000 emplois qui sont menacées, ce qui aura pour effet de creuser les chiffres, chaque jour plus préoccupants, du chômage. De plus, cette décision va se traduire par un transfert gratuit de l'activité des avoués, qui sont des officiers ministériels, aux grands cabinets d'avocats. Ces derniers n'étant pas contraints d'accepter les dossiers qu'on leur soumet, la mesure qu'elle propose va donc contribuer à remettre en cause l'effectivité du principe d'égalité de tous devant la justice, notamment en matière d'accès. Enfin, le remboursement par l'État du prix des charges que les avoués ont achetées pour pouvoir exercer, représentera une nouvelle charge pour les finances publiques, estimée à 8 millions d'euros. Il lui demande donc si une telle réforme, dont l'opportunité peut être contestée en cette période de récession économique et de crise sociale sans précédent, ne devrait pas faire l'objet de concertations avec les professionnels en question ainsi que leurs représentants, plutôt que d'être menée dans l'urgence et sans évaluation quant à son coût social et financier.

Réponse émise le 30 juin 2009

Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, informe l'honorable parlementaire qu'elle a présenté au conseil des ministres du 3 juin 2009 un projet de loi portant fusion des professions d'avocat et d'avoué près les cours d'appel. L'Assemblée nationale en a été saisie. Il pourrait être adopté avant le 1er janvier 2010 et prendre effet le 1er janvier 2011. Ce texte a pour objet de supprimer l'obligation de recourir à un avoué pour faire appel d'un jugement. Il simplifie l'accès à la justice en appel et en diminue le coût. Il assure également le respect de la directive européenne du 12 décembre 2006 sur les services. Tout au long de son élaboration, une concertation a été engagée avec les représentants des avoués et de leurs salariés. Il a été procédé à une évaluation approfondie de l'ensemble des conséquences de la réforme, tant pour eux que pour les cours d'appel et les justiciables. Les avoués seront indemnisés pour la perte de la charge qu'ils ont acquise et qu'ils ne pourront plus céder, dès le début de l'année 2010. Un fonds, géré par la Caisse des dépôts et consignations, est prévu pour être en mesure de réaliser des avances et verser rapidement l'intégralité des indemnités. S'il n'est pas envisagé que cette indemnisation soit intégrale, il est nécessaire qu'elle soit raisonnable et équitable. Il est prévu qu'elle soit fixée à 66 % de la valeur des offices. Un dispositif spécifique sera mis en place au profit des avoués qui sont actuellement endettés du fait l'acquisition d'un office ou de parts. L'endettement restant à échoir sera pris intégralement en charge par le fonds, également dès le début de l'année 2010. Le cas particulier des avoués qui ont acquis leur charge au moyen d'un apport personnel, distinct de l'endettement, est également pris en considération. Dans un tel cas, le montant de l'indemnité ne pourra être inférieur au montant de l'apport personnel ayant financé l'acquisition de l'office ou des parts de la société. Par ailleurs, les avoués et leurs collaborateurs diplômés pourront devenir automatiquement avocats s'ils le souhaitent et pourront ainsi continuer à faire bénéficier leurs clients de leurs compétences et de leur expérience des procédures judiciaires. Dès le 1er janvier 2010, les avoués pourront demander à être inscrits au barreau pour débuter une nouvelle activité d'avocat, parallèlement à celle d'avoué, maintenue pendant l'année de transition. Pour ceux qui ne le souhaiteraient pas, les voies d'accès vers les autres professions judiciaires et juridiques et celles permettant d'intégrer la magistrature seront améliorées. Le fonctionnement des cours d'appel ne devant pas être affecté par l'extension à tous les avocats de leur ressort de la faculté de s'adresser à elles, il a été décidé de rendre obligatoire l'introduction de l'instance par voie électronique devant ces juridictions. Les expérimentations actuellement conduites seront généralisées ; un avant-projet de décret en ce sens a été adressé pour avis aux représentants des avoués et des avocats et vient d'être également transmis au Conseil d'État. La communication ainsi mise en place sera sur le mode « structuré » afin qu'elle reste compatible avec les systèmes déjà en place dans plusieurs cours. Celles-ci n'auront pas à revenir sur les progrès qu'elles ont acquis en termes d'organisation. Pour faciliter cette mise en oeuvre dans chaque cour d'appel un groupe de travail réunissant magistrats, avoués et avocats, en lien avec le secrétariat général de la chancellerie, est mis en place. La situation des 1862 collaboratrices et collaborateurs des avoués a été prise en considération avec la plus grande attention. Le premier des objectifs à atteindre est qu'ils puissent conserver leur place dans cette nouvelle organisation, auprès de leur employeur devenu avocat. Si cela ne peut être envisagé, ils bénéficieront d'une aide personnalisée pour une reconversion professionnelle. À cette fin, il a été procédé le 10 mars 2009 à l'installation d'une commission tripartite composée de représentants de l'État, des employeurs et des salariés, chargée de préparer une convention relative aux mesures qui permettront de faciliter cette reconversion. Lorsqu'un licenciement ne pourra pas être évité, les indemnités auxquelles il donne droit seront majorées. Elles seront égales au double des indemnités légales, calculées en fonction du nombre d'années d'ancienneté dans la profession, dans la limite de vingt-cinq ans. Cette mesure permettra aux salariés ayant une ancienneté importante de percevoir jusqu'à quatorze mois de salaire. Ceci sans préjudice des mesures de droit commun qui portent notamment sur le versement d'indemnités compensatrices de la perte de salaire en cas de nouvelle embauche. C'est au Parlement qu'il appartient désormais de se prononcer sur l'ensemble de ce projet.

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