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Franck Reynier
Question N° 45628 au Ministère des Affaires européennes


Question soumise le 31 mars 2009

M. Franck Reynier attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes sur la tendance à l'unilinguisme au sein des institutions communautaires. En effet, le récent rapport de Monsieur Jacques Legendre, sénateur, sur le respect de la diversité linguistique dans le fonctionnement des institutions européennes présente des conclusions alarmantes sur l'état de multilinguisme au sein de l'Union européenne et de ses institutions. À la Commission européenne, la proportion de documents initialement rédigés en l'anglais a progressé sensiblement, passant entre 1996 et 2008 de 46 % à plus de 72 %. Si ces chiffres sont pour partie le reflet d'une expansion de la langue anglaise, ils sont également le signe d'une tendance lourde à l'uniformisation, qui n'est pas nécessairement le souhait de tous les États membres. Le rapport souligne les dangers que l'emploi d'une seule langue peut induire aux yeux des citoyens européens qui ne la pratiquent pas, ou des parlementaires qui ne peuvent faire entendre convenablement leur voix dans le processus décisionnel. En outre, la campagne d'information sur Internet pour le « 112 », numéro européen d'appel urgence unique, n'est disponible qu'en anglais, privant d'information une grande partie de la population de l'Union. De manière générale, plus de la moitié des sites Internet de l'Union européenne sont unilingues anglais. Certaines méthodes de recrutement et d'appels d'offres témoignent également d'une uniformisation en faveur de l'anglais, rompant la dynamique en matière d'égalité des chances. Loin de relancer une vaine polémique sur la place de l'anglais et d'autres langues historiques telles que le français et l'allemand, ces constats appellent à s'interroger sur les limites d'une généralisation excessive de l'anglais dans les négociations, les décisions et les campagnes d'information des membres et des institutions de l'Union européenne. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire part de son sentiment sur les conclusions de ce rapport et l'informer des mesures que le Gouvernement français entend prendre ou soutenir afin de veiller à la diversité des langues au sein des institutions de l'Union européenne.

Réponse émise le 15 décembre 2009

1. Il est indéniable que l'augmentation progressive du nombre des États membres et la technicité croissante des multiples sujets traités favorisent une tendance au monolinguisme au sein des institutions européennes. 2. Cette situation conduit naturellement la France à attacher une importance d'autant plus grande à la diversité culturelle, au maintien du plurilinguisme et à la défense du français au sein des institutions de l'Union européenne. C'est en effet un élément fondamental du respect des identités nationales. C'est aussi une condition essentielle pour que nos concitoyens continuent de se reconnaître dans le projet européen et d'y adhérer. C'est enfin, pour notre pays, un moyen nécessaire pour promouvoir sa vision et garantir son influence au sein de l'Union européenne. 2.1. Dans ce cadre, la France plaide d'abord pour la mise en oeuvre d'un multilinguisme effectif par les institutions et organes de l'Union européenne. a) À la faveur de sa présidence du Conseil, elle a ainsi fait adopter par le Conseil (éducation et culture) des 20 et 21 novembre 2008 une résolution sur le multilinguisme qui vise à promouvoir le multilinguisme autour de cinq axes : le renforcement de la cohésion sociale, du dialogue interculturel et de la construction européenne ; le renforcement de l'apprentissage tout au long de la vie ; la compétitivité de l'économie européenne et la mobilité des personnes ; le soutien à la traduction et l'engagement d'une réflexion sur la mise en place d'un éventuel programme européen spécifique de soutien à la traduction ; enfin, la promotion des langues de l'UE dans le monde. Ce texte appelle également à renforcer le multilinguisme dans les relations que les institutions européennes entretiennent avec les citoyens (en particulier sur les sites internet) et les institutions nationales, et invite la Commission à lui faire rapport d'ici la mi-2011 sur la mise en oeuvre de cette résolution. Les autorités françaises seront extrêmement attentives au contenu de ce rapport d'étape. Des conclusions ont également été adoptées par le Conseil (éducation et culture) de novembre 2008 sur la promotion de la diversité culturelle et du dialogue interculturel dans les relations extérieures de l'Union et de ses États membres. Elles visent notamment à mettre en exergue la place du multilinguisme et de la traduction dans le développement du dialogue culturel avec les autres régions du monde. b) Les autorités françaises, attachées à la mise en oeuvre d'un multilinguisme effectif par les institutions et organes de l'Union européenne, n'hésitent pas, lorsque cela s'avère nécessaire, à rappeler à leurs responsables leurs engagements en matière de diversité linguistique. C'est ce que le secrétaire d'État chargé des affaires européennes a fait très récemment dans une lettre adressée à M. Jerzy Buzek, président du Parlement européen, sur la diffusion d'informations sur l'ordre du jour des sessions plénières. Mais une telle action, si elle est nécessaire, pour être pleinement efficace, doit être complétée par d'autres initiatives. 2.2. Ainsi une politique active est-elle mise en oeuvre pour soutenir la langue française dans les institutions européennes : elle vise tout particulièrement l'apprentissage du français par les fonctionnaires non francophones, actuels ou futurs, des institutions européennes ainsi que par celui des fonctionnaires des États membres appelés à négocier à Bruxelles. La France a ainsi consacré plus de 2,5 MEUR en 2007 à cet objectif : 0,35 MEUR dans le cadre de son action bilatérale (formation des commissaires des pays adhérents et de leurs chefs de cabinet ; formations de hauts fonctionnaires tchèques et suédois, dont les pays assureront la présidence du Conseil de l'Union européenne après la France), auxquels doit être ajoutée notre contribution de plus de 2,2 MEUR au plan pluriannuel pour le français dans l'Union européenne, mis en place avec le Luxembourg, la Communauté française de Belgique et l'Organisation internationale de la francophonie (OIF). À l'occasion de la présidence française du Conseil, la contribution française à ce plan a été portée à 3 MEUR en 2008, et des formations pour diplomates représentant des pays de l'UE auprès de l'ONU et de l'OSCE, à Vienne, New York et Genève ont été mises en place. 3. De façon générale, le détail des actions entreprises sera présenté au Parlement dans le cadre du rapport que la délégation générale à la langue française et aux langues de France prépare chaque année en application de la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française. Le Parlement européen est une institution cruciale pour la promotion de l'usage du français. Le secrétaire d'État chargé des affaires européennes a ainsi effectué une démarche auprès du président du Parlement européen dès la première session plénière afin de demander que l'ensemble de la signalétique du Parlement européen figure en français - alors même que le siège du Parlement européen est en France - et également pour autres implantations de l'union européenne dans des pays francophones (Belgique, Luxembourg). Enfin, le secrétaire d'État chargé des affaires européennes a mis en place un forum, au sein du Parlement européen, qui permet aux eurodéputés francophones (dont le nombre a été estimé par nos ambassades à près de 300) de se retrouver et d'échanger régulièrement autour d'événements politiques et culturels. La présidence en a été confiée au député européen roumain Christian Preda. Il compte déjà près d'une trentaine de membres issus de plus de dix États membres, tous intimement convaincus que la promotion de la langue française revêt un enjeu d'intérêt général non pas seulement pour la France mais bien pour toute l'Europe.

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