M. Jacques Remiller appelle l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la crise dans la presse. Alors que la presse mondiale est confrontée à un effondrement sans précédent de ses ressources publicitaires, qui se cumule avec la baisse historique de sa diffusion, Google a décidé d'ouvrir à la publicité son site d'actualités détournant ainsi une manne déjà bien maigre et trouvant également le moyen d'arrondir ses revenus - pléthoriques - sur le dos de fournisseurs d'informations agonisants. Il aimerait qu'elle lui fasse savoir ce qu'en pense le Gouvernement et ce qu'elle compte faire afin d'aider la presse.
La perte de ressources publicitaires dans la presse écrite est réelle, mais inégale selon les familles de presse. D'après les derniers résultats de l'Institut de recherches et d'études publicitaires (IREP), en 2008, le marché publicitaire dans son ensemble enregistrerait une baisse de 2,2 %, y compris internet et annuaires (la baisse est de 3,4 % hors Internet et annuaires). L'ensemble de la presse écrite ne serait pas le secteur le plus touché dans ce contexte (- 3,7 %), alors que le cinéma enregistre une baisse de 15,4 % et la télévision une baisse de 4,5 %. On note cependant une forte baisse de ressources pour les quotidiens nationaux (- 4,4 %), alors que les quotidiens locaux, gratuits ou non, progressent respectivement de 6,7 % et de 1 %. La presse magazine et la presse technique/professionnelle supportent les plus fortes diminutions de recettes publicitaires en 2008 (- 4,1 % et - 5,2 %). Les prévisions de Carat, agence de communication médias du groupe Aegis Media, montrent, pour 2009, un recul des dépenses publicitaires de 5 % en France. La société prévoit cependant une augmentation en 2010 à + 0,5 %. Dans le même temps, le marché publicitaire sur internet a augmenté de 12,1 % entre 2007 et 2008, selon les chiffres de l'IREP. Cette évolution est en net ralentissement : la publicité sur internet était en augmentation de 45 % entre 2005 et 2006 et de 32 % entre 2006 et 2007. Les recettes publicitaires d'internet ne représentent que 4,5 % du marché total, alors que celles de la presse sont de 40 %. Si cette diminution doit être replacée dans son contexte, elle est néanmoins réelle et les pouvoirs publics en sont conscients. C'est dans ce cadre que les états généraux de la presse écrite ont été organisés. Plusieurs mesures prises par le Président de la République le 23 janvier 2009 sont destinées à permettre à la presse de sortir de la crise qu'elle traverse et à lui donner les moyens d'affronter l'avenir. Ainsi, le Président de la République, à l'issu des états généraux de la presse écrite, a annoncé un plan d'accompagnement triennal ambitieux et exhaustif, articulé autour de sept grands chantiers : 1. Accompagner le virage stratégique du numérique par la refonte et la réévaluation du fonds service en ligne, à hauteur de 20 MEUR accompagnés de mesures fiscales favorisant l'investissement (extension du champ des provisions pour investissement : 39 bis A du code général des impôts, exonération de taxe professionnelle). La reconnaissance du statut d'éditeur de presse en ligne, adopté dans le cadre de la loi « Création et Internet » a été une étape préalable nécessaire à la mise en place de ces nouvelles mesures. Le développement de l'offre numérique de la presse écrite, indispensable au maintien de l'activité imprimée traditionnelle pour de nombreuses entreprises, sera aussi favorisé par la définition d'un nouveau cadre juridique pour l'exploitation multimédia des contenus éditoriaux adopté au Parlement dans le cadre de la loi « Création et Internet ». 2. Réformer le système de la vente au numéro par la revalorisation de la rémunération des diffuseurs de journaux qui passera par une réforme de la chaîne logistique. Dans l'attente de cette réforme de fond, le décret n° 2009-856 du 8 juillet 2009, publié au Journal officiel du 11 juillet, a institué une aide exceptionnelle au bénéfice des diffuseurs de presse. Cette aide directe consiste en un versement unique de 4 000 EUR, correspondant à un allégement de 30 % des cotisations sociales des diffuseurs de presse spécialistes et indépendants. 3. Soutenir massivement le portage avec une subvention directe de 70 MEUR, sous forme d'une aide aux exemplaires portés de la presse quotidienne et de la presse hebdomadaire d'information politique et générale. Ce dispositif d'aide directe, mis en place par le décret n° 2009-535 du 13 mai 2009, est accompagné d'un soutien au réseau de portage par l'exonération des charges sociales patronales pesant sur les porteurs au niveau du SMIC. Cette dernière mesure a été adoptée dans le cadre de la loi de finances rectificative n° 2009-431 du 20 avril 2009. 4. Accompagner la négociation d'un nouveau contrat social de la fabrication. Ce nouveau contrat doit permettre d'abaisser les coûts d'impression français d'approximativement 30 à 40 % en les ramenant au niveau des standards européens. Le Président de la République a annoncé que l'État accompagnerait l'issue des négociations entre partenaires sociaux qui se déroulent depuis le mois de mars. 5. Adapter la formation des journalistes aux nouvelles pratiques journalistiques. Deux personnalités indépendantes ont été chargées de la mise en place d'une conférence nationale sur les métiers des journalistes telle que souhaitée dans les recommandations du livre vert des états généraux de la presse écrite. 6. Renforcer les fonds propres des entreprises de presse, notamment par l'élargissement des règles appliquées au mécénat en faveur de la presse écrite. Le rescrit existant en la matière a été modifié le 10 avril par le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, confirmant ainsi l'engagement pris à l'issue des états généraux de la presse écrite. 7. Reconquérir le lectorat à travers des mesures d'encouragement de la lecture pour les jeunes (abonnements gratuits pour les jeunes de 18 ans, en complément des mesures coordonnées par l'éducation nationale auprès des plus jeunes). L'abonnement gratuit pour les jeunes de 18 ans sera disponible à la rentrée 2009. À ces sept grandes orientations, le Gouvernement a souhaité ajouter deux mesures d'urgence destinées à compenser les effets de la crise conjoncturelle survenue à la fin de l'année 2008. Elles concernent notamment la neutralisation des augmentations des tarifs postaux de la presse prévues dans les accords signés le 23 juillet 2008 et la réorientation des dépenses publicitaires de l'État et des organismes qui lui sont attachés, dont la part consacrée à la presse passera de 18 à 36 MEUR en 2009. Les mesures prises lors des états généraux de la presse représentent un plan exceptionnel d'aide à la presse écrite évalué à 200 MEUR par an, sur une période de 3 ans. Déjà 150,7 MEUR ont été inscrits dans le cadre de la loi de finances rectificative du 20 avril 2009 (publiée au Journal officiel du 22 avril 2009). Cet effort budgétaire, sans précédent pour la presse, devrait être reconduit pour les années 2010 et 2011. Ces dispositions permettront aux entreprises de bénéficier de moyens pour s'adapter aux mutations en cours et de ne pas rater le virage technologique, ce qui signerait leur condamnation à terme.
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