M. Jean-Marc Nesme appelle l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la célébration du cinquantenaire de la découverte de la trisomie 21 par le professeur Jérôme Lejeune, Marthe Gautier et Raymond Turpin. Cette découverte a rendu l’espoir à des milliers de parents d'enfants handicapés car elle laissait présager la découverte d'un futur traitement permettant de guérir ce handicap. Malheureusement, certaines craintes exprimées alors par le Professeur Lejeune, s'avèrent, aujourd'hui, une triste réalité. Ne disait-il pas, à l'époque, avec effroi: « C'est un crève-coeur, on va utiliser notre découverte pour les supprimer. Je n'ai qu'une solution pour les sauver, c'est de les guérir ». Une récente étude de l'INSERM confirme ces craintes. Elle révèle que la plupart des femmes ne sont pas conscientes des implications possibles du dépistage de la trisomie 21. 40 % des femmes enceintes qui ont eu une échographie et un dosage sanguin n'ont pas conscience qu'elles pourraient être confrontées à un moment donné à la décision de ne pas poursuivre leur grossesse. En effet, aujourd'hui, la priorité est mise sur les diagnostics prénataux. Le manque d'information préalable et d'accompagnement lors de ce dépistage ne permet pas à la femme enceinte de prendre une décision éclairée face au risque d'une fausse couche ou d'une décision, grave, d'interruption médicale de grossesse. Nous sommes loin de la profonde humanité et de l'esprit qui a animé la recherche du professeur Lejeune. En cette année 2009 qui honore la mémoire de ce grand chercheur, reconnu par la communauté scientifique internationale, il nous est encore possible d'espérer que tant d'années consacrées au progrès humain et au respect de la vie, ne restent pas lettre morte mais continuent, malgré les obstacles, à porter du fruit. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer les moyens qu'elle envisage de proposer afin de mettre en place une véritable politique publique de recherche thérapeutique concernant la trisomie 21.
La trisomie 21 est une maladie qui expose le patient et sa famille à de grandes difficultés, et il convient en effet de promouvoir la recherche, concernant cette affection, dans la lignée des travaux du professeur Lejeune, qui a identifié voici cinquante ans l'anomalie chromosomique responsable du syndrome. Comme pour toutes les maladies, le front de la recherche n'avance pas de façon homogène sur le versant de la prévention, du diagnostic et du traitement. Il n'existe, au demeurant, pas de règle immuable dans la progression de cette recherche, tant l'approche empirique et les découvertes fortuites ont encore une emprise considérable. Cependant, il est aisé de comprendre que la nosographie (l'identification d'une maladie) précède, habituellement la découverte du diagnostic, et que seulement ensuite des procédés préventifs et/ou thérapeutiques peuvent être développés. Concernant la trisomie 21, c'est effectivement cette situation qui prévaut. Le retard mental associé à cette dysmorphie a permis l'identification de la maladie bien avant que le professeur Lejeune n'identifie la trisomie 21 comme étant l'anomalie chromosomique responsable. En l'absence de facteurs de prédisposition (l'âge parental est seulement un facteur de risque) suffisamment déterminants pour permettre d'agir efficacement, la seule prévention qui peut aujourd'hui être proposée aux parents est l'interruption volontaire de grossesse. Cette décision doit effectivement résulter d'un consentement libre et éclairé. Quant au volet thérapeutique qui de fait constitue l'aspect le plus important de la recherche, il suppose habituellement une connaissance approfondie du mécanisme de la maladie. Comprendre que le chromosome 21 existe en trois exemplaires au lieu de deux chez ces patients permet d'orienter les recherches vers les centaines de gènes portés par ce chromosome. Il importe, en effet, d'établir le lien entre ces anomalies génétiques, les anomalies du développement du système nerveux et le mécanisme de la mort neuronale prématurée. Ces recherches sur le mécanisme de la maladie avancent, au travers d'équipes travaillant spécifiquement sur les retards mentaux, mais aussi d'équipes travaillant sur le développement du système nerveux, sur les mécanismes de la mort cellulaire ou sur le mécanisme de la maladie d'Alzheimer, car la perte neuronale de la trisomie 21 est analogue à celle de la maladie d'Alzheimer. Il faut donc nourrir l'espoir que les retombées du plan Alzheimer touchent aussi la trisomie 21. Enfin, il existe des modèles animaux de cette maladie (des souris génétiquement modifiées), qui permettent d'ores et déjà de tester certaines pistes thérapeutiques. Ainsi, une étude a été publiée en décembre 2008 afin de tester l'effet de peptides neuroprotecteurs administrés en période prénatale (Toso L. et al., Prevention of developmental delays in a Down syndrome, mouse model. Obstet Gynecol, 2008, 112 :1242-1251). Ces recherches sont encore éloignées de l'application aux patients, mais il s'agit d'une étape importante vers le développement futur d'une réelle approche thérapeutique de cette affection telle que toute la communauté scientifique appelle de ses voeux.
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