M. Jacques Remiller appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les victimes de l'inceste. Alors qu'il n'existe aucune véritable statistique sur l'inceste en France, une association de victimes a publié une enquête afin de faire éclater la réalité de ces drames. Selon cette dernière, 3 % des Français déclarent avoir été victimes d'inceste, et un Français sur quatre connaît au moins une victime dans son entourage. Ainsi, selon ce sondage, près de 2 millions de personnes sont concernées. Aussi, souhaite-t'il connaître les mesures concrètes que le Gouvernement envisage de prendre afin de diminuer le nombre de victimes d'inceste en France.
Le garde des sceaux, ministre de la justice, indique à l'honorable parlementaire que la lutte contre l'inceste et de manière plus générale la lutte contre toutes les infractions sexuelles est une politique pénale prioritaire. À titre liminaire, il convient de préciser qu'il n'existe pas de statistiques judiciaires sur les actes incestueux dans la mesure où les données chiffrées ne distinguent pas suivant que les faits de viol ou d'agression sexuelle ont été commis par un ascendant ou par une personne ayant autorité. Au-delà de cette difficulté pratique, la prévention de tels actes est en outre particulièrement complexe à mettre en place, ceux-ci étant par nature occultes et faisant l'objet d'un silence pesant de la part des membres de la famille eux-mêmes. Plusieurs dispositifs sont néanmoins mis en place ou sont à l'étude en vue de prévenir et de lutter contre de tels actes. Tout d'abord, dès lors qu'un enfant est considéré en danger ou risque de l'être, les services sociaux agissant sur mandat judiciaire ou sur celui du président du conseil général procèdent à un suivi au sein-même de la famille, avec l'assistance éventuelle de psychologues. Ils doivent signaler tout fait suspect aux autorités judiciaires. En outre, la prévention peut passer par l'instauration dans le code pénal de la notion même d'inceste traduisant ainsi de manière significative la réprobation sociale à l'encontre de ce type d'actes qui revêtent la particularité de se commettre au sein d'une famille. Ainsi, dans le cadre de la mission sur la question de l'édiction de l'inceste comme infraction spécifique qui lui avait été confiée en 2005, M. Christian Estrosi, à l'époque député des Alpes-Maritimes, a entendu un grand nombre de personnes de tous horizons (magistrats, psychiatres, responsables associatifs) dont les avis étaient partagés sur l'opportunité d'inscrire en tant que tel l'inceste dans le code pénal. Partant du constat que le code pénal, sans les désigner comme tels, réprime déjà la plupart des actes incestueux, M. Estrosi a jugé préférable de perfectionner ce système en précisant notamment la définition législative de la notion de contrainte, qui peut notamment résulter, dans le cadre des agressions sexuelles de nature incestueuse, du fait que la victime n'a pas encore atteint l'âge de la majorité sexuelle et que son agresseur est son ascendant ou une personne ayant autorité sur elle. Allant au-delà de ces préconisations, la mission de lutte contre l'inceste, instaurée par le groupe UMP à l'Assemblée nationale et dirigée par Mme Marie-Louise Fort, maire de Sens, dont le rapport a été déposé au mois de janvier 2009, a considéré que l'inceste était, plus qu'une circonstance aggravante du viol et de l'agression sexuelle, un élément constitutif de ces infractions. Le rapport propose ainsi de modifier les articles du code pénal définissant le viol et l'agression sexuelle. Serait ainsi réprimée à ce titre toute atteinte sexuelle ou toute pénétration sexuelle commise par violence, contrainte, menace ou surprise, « ou dans l'inceste lorsque la victime est mineure ». Un article définissant l'inceste et spécifiant les personnes susceptibles de le commettre serait également créé. Ces réflexions sont actuellement à l'étude au sein des services du ministère de la justice. Par ailleurs, participe à la prévention des actes d'inceste l'édiction claire de peines importantes, notamment sous la forme de peines plancher, prononcées en cas de récidive. L'instauration des peines plancher a un effet dissuasif dans la mesure où les peines minimales correspondent à une menace de sanction claire, précise et systématique, constituant un premier élément indispensable au travail de prévention de la récidive. La prévention, du moins celle de la récidive, passe également par le prononcé de peines comprenant des soins, telles que le suivi socio-judiciaire. En outre, la loi du loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs incite très fermement les personnes condamnées à suivre des soins en détention, en en faisant une condition pour l'octroi de réductions supplémentaires de peine ou d'une libération conditionnelle. De la même manière ont été mis en place des systèmes permettant le suivi d'une personne après l'exécution de sa peine, tels que la surveillance judiciaire, le placement sous surveillance électronique mobile, la rétention de sûreté ou la surveillance de sûreté. L'ensemble de ces dispositifs est destiné à lutter contre les actes incestueux, et, dans la mesure du possible, à les prévenir. Ils sont, pour certains, encore à l'étude au sein du ministère de la justice.
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