M. Jean-Louis Gagnaire attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur l'évolution des prix du gaz. Depuis 2005 et la privatisation de Gaz de France, la facture de gaz de 11 millions d'abonnés s'est considérablement alourdie. Chaque ménage doit consacrer plusieurs centaines d'euros supplémentaires pour se chauffer. Nombre de nos concitoyens, déjà touchés par la baisse du pouvoir d'achat et la crise économique, doivent faire face à des factures de gaz plus élevées que jamais dans le contexte d'un hiver plus froid que les années précédentes. Cette hausse est encore plus marquée pour les entreprises. Les prix de l'énergie pénalisent considérablement notre économie. Le prix du gaz est indexé en France sur le prix du pétrole depuis les années soixante, dans le souci d'éviter une concurrence entre énergies. Alors que le cours du baril s'enfonce sous les 40 dollars, après six mois de baisse continue et après avoir dépassé les 150 dollars en juillet 2008 et alors que la parité euro-dollar favorise les importations de produits pétroliers, le report du nouveau calcul du prix du gaz prévu le 1er janvier au 1er avril est parfaitement incompréhensible, voire inacceptable. Après une série de hausses en 2008, + 4 % en janvier, + 5,5 % en avril et + 5 % en août, toutes justifiées par l'indexation sur les cours pétroliers, on ne peut que déplorer le peu d'empressement du Gouvernement à revoir les tarifs réglementés du gaz à la baisse, alors que prix du pétrole s'est effondré depuis le pic de l'été 2008 et que le mécanisme de lissage sur les six derniers mois aurait dû conduire à une révision à la baisse. Les explications données par les uns et les autres laissent l'impression que le discours en période de hausse consiste à dire « les prix du pétrole augmentent donc les prix du gaz augmentent » et en période de baisse, « les prix du pétrole se sont effondrés, s'ils continuent à baisser, le prix du gaz baissera peut-être ». Le déséquilibre entre les deux postures est évident. Les prix d'achat étant de droit privé, ils restent secrets et nul n'est capable de déterminer quelles sont les marges de GDF. On sait seulement que les bénéfices de l'entreprise et les dividendes ont considérablement augmenté avec la privatisation et l'envolée des prix. La bonne santé de l'entreprise ne semble pas bénéficier à ses clients. Les tarifs réglementés sont fixés par le Gouvernement, après demande de GDF et avis de la Commission de régulation de l'énergie. On peut légitimement craindre que l'État ne préfère maintenir des prix élevés afin de conforter ses rentrées fiscales et les revenus que son statut d'actionnaire lui assure. On peut enfin s'interroger sur le bilan de la privatisation de GDF et de sa fusion avec Suez. La baisse des prix pour les consommateurs était l'argument principal des promoteurs de ce nouveau statut afin de permettre la négociation des contrats au meilleur prix avec les fournisseurs. Il semble que cet argument ait été battu en brèche ! Compte tenu de la situation économique et sociale, le Gouvernement doit donc fixer un prix réglementé du gaz orienté à la baisse avant la fin de la période hivernale. C'est la capacité de chacun à se chauffer pendant l'hiver et la capacité de notre économie à faire face à la crise qui sont en question. Il lui demande donc quelle décision le Gouvernement compte prendre afin d'assurer la baisse des prix du gaz qui doit suivre l'effondrement des prix du pétrole. Il lui demande de réviser les prix dans les plus brefs délais, sans attendre la fin de la période hivernale. Il lui demande enfin quelle est l'évolution depuis cinq ans des revenus fiscaux et des dividendes perçus par l'État sur la vente du gaz.
L'évolution des tarifs réglementés du gaz naturel est notamment fonction de celle des prix d'importation de cette énergie, sachant que la France importe plus de 97 % du gaz qu'elle consomme et qu'il compte pour 50 % à 60 % du prix du service vendu au consommateur final. Dans le cas de GDF Suez, le gaz est principalement acheté (à plus de 80 %) dans le cadre de contrats de long terme géographiquement diversifiés, notamment auprès des grands pays producteurs (Norvège, Pays-Bas, Russie, Algérie). Ces contrats prévoient que les coûts d'achat du gaz sont indexés sur les cours de différents produits pétroliers. Le principe d'indexation, mis en place de longue date, permet de garantir la compétitivité du gaz vendu, dans la mesure où celui-ci est substituable aux produits pétroliers avec lesquels il entre en concurrence. L'évolution des coûts d'approvisionnement de GDF Suez se répercute dans ses tarifs réglementés de vente, conformément aux dispositions de l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003, selon une formule de lissage, convenue avec les pouvoirs publics, indépendante des contraintes éventuelles de rentabilité retenues par les marchés financiers. Le principe du lissage est protecteur du consommateur final en gommant la volatilité des indices ; il induit un effet retard, à la hausse comme à la baisse. Ainsi, le calcul des coûts d'approvisionnement est réalisé, préalablement à chaque date d'évolution tarifaire, à partir de la moyenne des cours des produits pétroliers de référence et du taux de change EUR/$ sur une période de six mois se terminant un mois avant la date du mouvement tarifaire. À titre d'exemple, un mouvement au 1er janvier répercute le cours moyen des produits pétroliers de référence des mois de juin à novembre de l'année précédente. À l'occasion du dernier mouvement tarifaire (arrêté du 12 août 2008 publié au JO du 14 août 2008), la période de calcul prenait en compte le coût lissé du gaz, donc des produits pétroliers, évalué au 1er juillet 2008. Sur la période du calcul, les produits pétroliers sont restés à des niveaux élevés, justifiant la hausse. Les trois mouvements tarifaires de 2008 ont ainsi répercuté un baril de pétrole (brent) d'une valeur moyenne de 56 euros au 1er janvier 2008, 61 euros au 1er avril 2008 (mouvement de fin avril) et 67 euros au 1er juillet 2008 (mouvement décalé au 15 août 2008). Aujourd'hui, le coût du gaz importé reste à un niveau élevé (équivalent à un baril de Brent moyen valant 68 euros) car la formule d'indexation et de lissage intègre des mois de pétrole cher, voire très cher (juillet, août), comme illustré par le tableau suivant :
2007 | 2008 | 2009 | |||||||||||||||||
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Juil. | Août | Sept. | Oct. | Nov. | Déc. | Janv. | Fév. | Mars | Avril | Mai | Juin | Juil. | Août | Sept. | Oct. | Nov. | Dec. | Janv. | |
Baril de brent | |||||||||||||||||||
en dollars | 77 | 71 | 77 | 82 | 93 | 91 | 92 | 95 | 104 | 109 | 123 | 132 | 133 | 113 | 98 | 72 | 53 | 40 | 44 |
en euros | 56 | 52 | 55 | 58 | 63 | 62 | 63 | 64 | 67 | 69 | 79 | 85 | 84 | 75 | 68 | 54 | 41 | 30 | 33 |
Baril répercuté/tarifs des particuliers | |||||||||||||||||||
en dollars | 62 | 63 | 67 | 69 | 72 | 74 | 79 | 82 | 84 | 88 | 93 | 97 | 102 | 109 | 116 | 119 | 118 | 112 | 100 |
en euros | 47 | 48 | 50 | 51 | 53 | 54 | 56 | 58 | 59 | 61 | 63 | 65 | 67 | 71 | 75 | 77 | 77 | 74 | 100 |
2008 | 2007 | 2006 | 2005 | 2004 | |
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Nombre d'actions | 2 193 643 820 | 983 871 988 | 983 871 988 | 983 871 988 | 903 000 000 |
Part de l'État | 35,7 % | 79,8 | 79,8 % | 80,2 | 100 % |
Dividende par action (euros) | 2,20* | 1,26 | 1,10 | 0,68 | 0,46 |
En milliards d'euros | |||||
Dividendes versés à l'État | 1,7 | 1,0 | 0,9 | 0n5 | 0,4 |
Impôts payés sur le bénéfice | 1,8 | 1,2 | 1,1 | 0,8 | 0,5 |
TVA sur les ventes de gaz | 3,3 | 2,6 | 2,9 | 2,4 | 2,2 |
TICGN | 0,2 | 0,1 | 0,2 | 0,1 | 0,1 |
Total | 6,9 | 4,9 | 5 | 3,8 | 3,2 |
(*) Dividende envisagé avant la fusion, dont 0,80 euro de dividende exceptionnel. Le dividende ordinaire a été partiellement versé (0,80) sous forme d'un acompte, en novembre 2008. |
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