Mme Danièle Hoffman-Rispal attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique sur la question de la "vente liée" d'ordinateurs et de logiciels préinstallés. En effet, si la vente liée peut s'avérer utile pour les consommateurs les moins expérimentés, notamment en ce qu'elle évite les difficultés relatives à l'installation du système d'exploitation, elle reste indubitablement une infraction à l'article L. 122-1 du code de la consommation qui dispose que la subordination de vente est interdite et constitue donc un préjudice non négligeable pour les utilisateurs les plus expérimentés, dont le nombre grandit, et qui favorisent l'utilisation de logiciels libres. Le rapport France numérique 2012 prévoit dans ses actions 64 et 65 des actions spécifiquement dédiées à la lutte contre la vente liée, avec notamment la réunion d'un "groupe de travail rassemblant les acteurs de la distribution, les associations de consommateurs, les fabricants et fournisseurs de logiciels pour mettre en place un teste dès le premier trimestre 2009". La période des fêtes qui vient de se terminer a montré que la vente liée restait plus que jamais une réalité appelant une réponse rapide et concrète. Elle se demande donc si le calendrier prévu est maintenu et si des mesures complémentaires sont prévues.
Dans le cadre du plan France numérique 2012, le sujet des ventes d'ordinateurs avec logiciels préinstallés s'inscrivait dans la question plus générale de l'interdiction des ventes liées prévue par l'article L. 122-1 du code de la consommation. Ce texte dispose qu'« il est interdit de refuser à un consommateur la vente d'un produit ou la prestation d'un service, sauf motif légitime, et de subordonner la vente d'un produit à l'achat d'une quantité imposée ou à l'achat concomitant d'un autre produit ou d'un autre service ainsi que de subordonner la prestation d'un service à celle d'un autre service ou à l'achat d'un produit ». La pratique de vente subordonnée est punie des peines prévues pour les contraventions de 5e classe en vertu de l'article R. 121-13 2° du même code. Ce texte a servi de fondement juridique à la contestation menée par les associations de consommateurs. Le plan numérique 2012 a été présenté par le secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique, en octobre 2008, notamment pour répondre à cette contestation. Ce plan prévoit deux actions relatives aux ventes d'ordinateurs avec logiciels préinstallés, l'action 64 visant à promouvoir un affichage séparé des prix des logiciels et systèmes d'exploitation (ci-après OS) préinstallés et l'action 65, prévoyant de permettre la vente découplée de l'ordinateur et de OS. Le plan répond aux revendications des associations de consommateurs en menant une démarche participative qui associe les fabricants et les distributeurs plutôt que de suivre une voie plus coercitive. Dans le cadre de cette action, un groupe de travail a été réuni rassemblant les acteurs de la distribution, les associations de consommateurs, les fabricants et fournisseurs de logiciels pour mettre en place un test de vente découplée dès le premier trimestre 2009. Des réunions bilatérales ont de nouveau été organisées à la fin de l'année 2009 pour faire le point sur les pratiques des opérateurs à la lumière de l'abondante jurisprudence dégagée en matière de vente d'ordinateurs avec OS préinstallé en 2009. L'affichage séparé du prix de l'ordinateur et des logiciels préinstallés a été globalement mis en oeuvre par les distributeurs, notamment grâce à deux décisions judiciaires (TGI Paris, UFC Que choisir c/ DARTY, 24 juin 2008, infirmé par CA Paris, 26 novembre 2009 et TGI Bobigny, UFC Que choisir c/ AUCHAN, 15 mai 2009) qui ont contraint deux importants distributeurs à afficher séparément le prix de l'OS préinstallé. Les distributeurs ont exécuté ces décisions en indiquant le montant du remboursement offert, le cas échéant, par le fabricant de l'ordinateur, en échange de la désinstallation de l'OS. Il faut ici signaler que seuls certains constructeurs, représentant un peu moins de 50 % du marché français, proposent un tel remboursement. Force est de constater que les principaux distributeurs d'ordinateurs en France informent, sous une forme ou une autre, le consommateur de la possibilité de se faire rembourser ou non, selon les constructeurs, l'OS préinstallé sur la machine qu'il souhaite acquérir. Les consommateurs sont informés qu'en cas de désinstallation de l'OS Windows, le constructeur et le distributeur ne prendront pas en charge les éventuels dysfonctionnements liés au nouvel OS installé sur la machine. Au sujet du projet d'expérimentation d'une vente découplée de l'ordinateur et des logiciels préinstallés, des évolutions de l'environnement juridique sont intervenues depuis le lancement du plan France numérique 2012. En effet, depuis 2009, la vente d'un ordinateur équipé d'un OS préinstallé n'est plus illicite par principe. Selon la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), un État membre de l'Union européenne ne peut pas interdire de manière générale et absolue les ventes liées. Elle en a jugé ainsi, au visa de la directive 2005-29/CE du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales déloyales (dite directive PCD) dans un arrêt préjudiciel rendu le 23 avril 2009 au sujet d'une disposition de la législation belge comparable à l'article L. 122-1 du code de la consommation français interdisant les ventes subordonnées. En outre, le 25 juin 2009, l'État français a été mis en demeure par la Commission européenne de modifier sa législation, notamment dans ses dispositions interdisant la vente liée, afin d'assurer une transposition correcte de la directive précitée. Les juridictions françaises ont suivi l'arrêt précité de la CJCE. Ainsi, elles ont estimé que la vente d'un ordinateur avec OS préinstallé n'était pas illicite par principe, même en l'absence de procédure de remboursement. Pour autant, la vente liée peut être sanctionnée si elle remplit les critères de la pratique commerciale trompeuse. Or le fait de vendre des ordinateurs équipés d'un OS préinstallé ne constitue pas une telle pratique dès lors que le consommateur est informé de son intégration dans l'ordinateur. La Cour de cassation a d'ailleurs récemment rappelé que les juges du fond avaient l'obligation de vérifier que les critères d'une pratique commerciale déloyale n'étaient pas réunis avant de juger licite la vente d'un ordinateur avec système préinstallé (Cass. civ. 1re, 15 novembre 2010, M. Petrus c/ Lenovo). En matière pénale, la cour d'appel de Montpellier a relaxé la société DELL Southern Europe des poursuites engagées contre celle-ci pour vente liée par un arrêt du 7 mai 2009, en estimant que la prévenue répondait à la demande de la majorité des consommateurs en installant sur ses machines un OS permettant l'utilisation immédiate du produit qu'elle fabrique et commercialise. Cette abondante jurisprudence n'a pas permis aux pouvoirs publics d'obliger la mise en place des ventes d'ordinateurs sans OS. Il convient tout de même de signaler que certains cybermarchands proposent une offre d'ordinateurs nus ou équipés d'un autre OS que Windows afin de répondre à la demande de certains consommateurs. Les utilisateurs les plus expérimentés peuvent recourir à cette offre afin d'utiliser des logiciels libres. En outre, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes reste attentive à ce que les modalités des procédures de remboursement prévues par certains fabricants d'ordinateurs soient bien respectées. Cette solution permet d'ailleurs au consommateur de supprimer l'OS Windows de son ordinateur et de se faire rembourser le prix de cet OS.
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