Mme Françoise Branget interroge Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les droits à l'expression des élus municipaux. Pour ce qui concerne le journal d'information d'une commune, elle lui demande de rappeler les règles de répartition des espaces de libre expression entre les groupes qui composent le conseil municipal. Plus précisément, elle souhaite savoir, d'une part, si le groupe majoritaire peut avoir un espace d'expression et, d'autre part, si les espaces consacrés aux groupes doivent être proportionnels à leur nombre d'élus.
La loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a introduit dans le code général des collectivités territoriales, par son article 9, des dispositions prévoyant qu'un espace d'expression est réservé, dans les bulletins d'information générale diffusés par la commune « aux conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale », alors que dans les bulletins diffusés par le département et la région un espace est réservé à l'expression « des groupes d'élus ». Ainsi, la notion de « groupes d'élus » n'a pas été adoptée par le législateur pour les bulletins municipaux. Il en résulte, en application des dispositions de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales issu de cette loi, que le règlement intérieur du conseil municipal doit définir l'espace d'expression consacré aux seuls élus minoritaires au sein du conseil. Il s'agit d'assurer aux administrés une information pluraliste, les bulletins d'information municipale ayant, de façon générale, pour objet de rendre compte aux administrés des actions entreprises par le maire et la majorité du conseil municipal qui ont toute possibilité de s'exprimer dans les publications dont ils ont en principe le contrôle. Il convient de remarquer que les tribunaux administratifs ont rendu des jugements qui semblent contradictoires en ce qui concerne la possibilité pour le groupe majoritaire de disposer d'un espace d'expression. Ainsi, le tribunal administratif de Montpellier, dans son jugement du 4 novembre 2008 n° 0605594, a considéré que « l'espace d'expression consacré à l'expression des conseillers municipaux doit être réservé uniquement à ceux qui n'appartiennent pas à la majorité » et a enjoint le maire de « réserver la rubrique dénommée « tribune politique » dans le journal municipal aux seuls élus n'appartenant pas à la majorité municipale ». Dans le même sens, le tribunal administratif de Rouen, par jugement du 24 mars 2005 n° 0202255, a considéré que « l'espace consacré à l'expression des conseillers municipaux doit être réservé à ceux qui n'appartiennent pas à la majorité ». En revanche, selon le tribunal administratif de Dijon (27 juin 2003 n° 021277), les dispositions de l'article L. 2121-27-1 précité, « si elles prévoient un espace réservé aux conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale, ne font pas obstacle à ce que les pages des publications municipales créées à cet effet soient également ouvertes aux conseillers de la majorité municipale ». Par ailleurs, le tribunal administratif de Lyon (22 décembre 2004 n° 0203646 et 0203658) a considéré que l'article L. 2121-27-1 « n'a pas pour objet d'exclure toute expression dans le bulletin publié par la commune des conseillers appartenant à la majorité ». Pour éviter les contentieux, le directeur de publication doit donc veiller à ce que la tribune politique dont les élus minoritaires doivent disposer se distingue nettement des articles que des membres du conseil municipal appartenant à la majorité pourraient éventuellement signer dans le cadre des responsabilités qu'ils exercent dans l'administration des affaires communales. S'agissant de la définition de l'espace d'expression des élus d'opposition dans les bulletins d'information générale, le conseil municipal doit y procéder dans son règlement intérieur conformément à la loi qui lui laisse une certaine liberté d'appréciation. Les dispositions de l'article L. 2121-27-1 « ne prescrivent pas que ces espaces soient proportionnels au pourcentage de voix obtenu par les groupes d'opposition lors des élections ou au nombre de leurs élus dans l'assemblée municipale » (CAA de Marseille, 2 juin 2006 n° 04MA02045 ; TA de Dijon, 27 juin 2003 n° 021277/GC). Mais, elles ne s'opposent pas non plus « à l'adoption d'un espace réservé aux conseillers municipaux n'appartenant pas à la majorité municipale par référence à la représentation proportionnelle et en appliquant la méthode du plus fort reste », ce qui a permis au tribunal administratif de Bordeaux, dans son jugement du 3 février 2004 n° 040102, de considérer que la délibération adoptant ce mode de répartition « n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation ». Le conseil municipal peut également décider de donner à chaque groupe d'opposition le même espace limité à un certain nombre de caractères d'imprimerie, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, « dans la mesure où cette règle ne fait pas obstacle à l'expression des élus minoritaires » (CAA de Versailles, 8 mars 2007 n° 04VE03177).
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