M. Jean-Louis Idiart attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur l'avenir du musée national Picasso. Le musée national Picasso, installé dans l'Hôtel Salé, demeure achevée en 1659 et classée monument historique en 1964, abrite l'une des plus grandes collection d'oeuvres de l'artiste dans le monde. C'est en 1973, à la mort de Pablo Picasso, que l'État, grâce à la dation (loi qui permet aux héritiers de payer leurs droits de succession en cédant des oeuvres), choisit les oeuvres qui lui reviendront. Ouvert au public en 1985, le musée Picasso constitue le principal centre d'étude sur la vie et l'oeuvre de l'artiste, fréquenté par plus de 500 000 visiteurs par an, ce qui le place au 4e rang des musées parisiens en terme de fréquentation. À l'issue du conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril 2008, le Gouvernement a annoncé la fusion de la DMF avec la direction des archives de France (DAF) et la direction de l'architecture et du patrimoine (DAPA) afin de créer la direction générale des patrimoines de France, ainsi que la transformation du statut juridique du musée national Picasso (actuellement service à compétence national-SCN) en établissement public à caractère administratif (EPA), statut particulier qui confère notamment une large autonomie administrative et financière. Le changement du statut juridique en EPA permettrait notamment l'embauche légale d'un volant important de personnels précaires (vacataires, contractuels, CDD). À ce titre, les exemples des EPA du musée du Louvre et de la Bibliothèque nationale de France sont éloquents. En 2007, le Louvre employait 677 précaires sur les 2 095 agents présents, soit 32 % de l'effectif total. En 2006, la BNF employait quant à elle 913 précaires sur les 2 651 agents présents, soit 36 % de l'effectif total ! Pour mémoire, nous rappellerons qu'en 1996, la BNF disposait de 2 804 agents qui se répartissaient entre 1 929 fonctionnaires et 875 précaires ! Le statut juridique d'EPA accentue le phénomène de « marchandisation » des collections publiques et développe la notion d'accueil de « clients », au détriment des usagers du service public culturel, qui vont devoir payer de plus en plus cher pour avoir accès à des musées vidés de leurs oeuvres. Ce qui en jeu aujourd'hui, c'est la fin des musées nationaux tels qu'ils ont été pensés lors de la Révolution française. L'actualité du musée national Picasso, c'est aussi le lancement de lourds et longs travaux de rénovation et de réaménagement de Hôtel de Salé. Le décor est planté : un musée fermé pour travaux à partir de juin 2009, vidé de ses collections, vidé de son personnel, vivotant dans l'attente d'une réouverture avec un statut tout neuf d'EPA. Les travaux sont également une opportunité rêvée de rentabiliser un patrimoine national pourtant irrémédiablement opposé aux lois de l'économie de marché. Pour preuve, l'organisation du « Picasso world tour 2008 » (cf. Le Monde daté du 28 mai 2008) qui devrait rapporter, après des étapes programmées en Espagne, aux Émirats arabes unis, en Australie, au Canada, près de 15 millions d'euros, soit les trois quarts de la somme nécessaire pour les travaux (prévus pour un total de 20 millions d'euros). La boucle est bouclée. Aussi, devant l'urgence de la situation, il lui demande de bien vouloir conserver le statut actuel du musée national Picasso en SCN et les créations d'emplois statutaires et budgétaires nécessaires à son fonctionnement.
Il a été décidé à l'issue du conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril 2008 de conférer au musée national Picasso, comme au château-musée de Fontainebleau, et à l'ensemble Manufacture de Sèvres-musée de Sèvres, le statut d'établissement public administratif. Cette décision s'inscrit dans la continuité des évolutions statutaires du musée du Louvre (en 1992), de Versailles (en 1995) puis du musée d'Orsay et du musée Guimet (en 2003), qui ont considérablement renforcé le dynamisme de ces grandes institutions. Cette formule d'autonomie juridique et financière ainsi expérimentée depuis plus d'une décennie n'a conduit ni à la précarisation des personnels scientifiques ou administratifs dont le statut n'est pas mis en cause ni à une « marchandisation » des collections publiques et encore moins à ce que ces musées prestigieux soient « vidés de leurs oeuvres ». Au contraire, la responsabilisation de leur direction s'est opérée à travers un ensemble d'engagements de service public qui contribuent à mieux définir leurs objectifs scientifiques, ainsi que leurs devoirs de conservation et de présentation des oeuvres, d'action culturelle et d'accueil de leurs visiteurs. La richesse patrimoniale du musée national Picasso et son succès auprès du public tant français qu'international justifient pleinement que son développement se poursuive désormais selon ces mêmes principes de responsabilité. Dans la période récente, le musée national Picasso a su ainsi concilier d'une manière remarquée la production de manifestations internationales particulièrement bien reçues, une contribution majeure à l'exposition « Picasso et les Maîtres » aux galeries nationales du Grand Palais, qui a connu une fréquentation exceptionnellement nombreuse et attentive, une politique de renouvellement périodique de l'accrochage de sa collection permanente et de stimulantes confrontations avec l'art contemporain. Ces initiatives traduisent la volonté du musée et du ministère de la culture et de la communication d'assurer à tous les publics un accès à un service public culturel de haute qualité, en permanence adapté aux attentes des usagers. La pérennité de ce développement impose aujourd'hui que le musée national Picasso, plus de vingt ans après son ouverture, engage un programme de mise aux normes, d'extension et de modernisation des installations de l'hôtel Salé. Ces travaux, d'une durée d'environ vingt-quatre mois, sont rendus indispensables à la fois par l'accroissement des besoins de présentation de la collection, une importante dation étant intervenue dès 1990 alors que l'aménagement initial des espaces publics correspondait à la seule dation initiale de 1979, et par la nécessité de remettre à niveau certaines installations techniques ainsi que les dispositifs d'accueil du public. Au moment de la fermeture au public du musée, une partie des personnels sera naturellement réaffectée dans les autres musées nationaux de Paris ou d'Île-de-France. Les personnels du musée sont informés de l'ouverture prochaine de cette campagne de travaux et sont les premiers conscients des difficultés du fonctionnement actuel. Afin que soient bien confirmés les objectifs, le calendrier et les modalités de ce programme de modernisation ainsi que les exigences de service public gouvernant la réforme du statut juridique du musée, la direction du musée a organisé le 4 décembre 2008, en présence des services concernés de la direction des musées de France et de l'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels, une réunion d'information avec les personnels. Elle a permis de poursuivre et d'approfondir le dialogue sur l'ensemble de ces points et de préciser le protocole de rencontre de chacun des agents d'accueil et de surveillance concernés par le redéploiement à mener d'ici l'automne prochain. Durant cette même période, un ensemble d'oeuvres (environ 350 numéros sur les 5 000 que compte la collection) fera, comme ce fut le cas pour le musée de l'Orangerie pendant la durée de son chantier de rénovation, l'objet d'expositions qui renforceront encore l'attrait de la collection auprès du public international et les liens scientifiques et culturels établis par le musée Picasso avec de grandes institutions étrangères. La plus haute exigence scientifique et culturelle caractérise l'ensemble de ces manifestations, par exemple l'exposition au musée Reina Sofia à Madrid (février-mai 2008), la plus importante consacrée à l'artiste présentée dans son pays natal, ou l'exposition présentée à Abou Dabi (juin-septembre 2008), qui a constitué la première occasion d'explorer les rapports de Picasso avec l'art islamique. Les financements réunis en de telles occasions ne sont consentis par nos partenaires que parce qu'ils représentent la juste compensation des multiples apports matériels et intellectuels engagés sur fonds publics. Ils sont logiquement réinvestis dans l'amélioration des conditions de conservation et de présentation au public du musée de la collection nationale.
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